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Environnement - Troisième conférence environnementale : quel bilan ?

Santé-environnement, biodiversité, transports. Les tables rondes ayant rythmé la troisième conférence environnementale du quinquennat, qui s'est tenue les 27 et 28 novembre, déboucheront-elles sur des mesures intéressant directement les collectivités locales ? Pour l'heure, beaucoup d'annonces, peu de réalisations et du retard pris sur nombre de dossiers ont de quoi frustrer des élus attendant plus de réactivité de la part de l'État.

Article initialement publié le 1er décembre 2014.

Ségolène Royal avait prévenu : cette grand-messe annuelle qu'est la conférence environnementale, qui s'est tenue les 27 et 28 novembre, est l'occasion d'annonces gouvernementales mais les débats et travaux de fond, eux, restent à mûrir et déboucheront sur des actions rendues publiques en janvier prochain. "Le calendrier reste à fixer en face de chaque recommandation issue des tables rondes, où la qualité du dialogue fut bien supérieure à ce qu'on était en droit d'espérer", a-t-elle confié. "Les échanges se sont résumés à une succession de courtes interventions dans un cadre trop restreint et n’ont fait que renforcer le trouble de la majorité des participants" contredit Bertrand Pancher, député de la Meuse et responsable du pôle Écologie à l'UDI.

Le diesel, jugé coupable

D'un côté donc, des annonces ou perspectives, par exemple celle de Manuel Valls en faveur du bois-énergie, qui intéressera les élus de territoires forestiers, même si sur le fond il n'y a rien de bien nouveau : en mobilisant mieux le fonds Chaleur de l’Ademe, il a appelé à redonner plus de valeur à cette ressource. Le gouvernement mettra aussi en place en 2015 des aides à la conversion des vieux appareils de chauffage au bois dans les zones polluées et proposera aux collectivités de s'y associer. En discours de clôture, le Premier ministre a pris acte des conséquences sanitaires de la politique du "tout diesel" et réactivé, à travers une étonnante annonce, le serpent de mer des zones d'actions prioritaires pour l'air (Zapa), issues pour rappel de la loi Grenelle II mais qui n'ont jamais été expérimentées en France. Prudent, il a juste dit qu'"un système d'identification des véhicules en fonction de leurs émissions polluantes sera mis en place en 2015", et ce afin d'"aider les collectivités à développer des politiques favorisant les véhicules les plus propres". Les "techniques existent", a ajouté Ségolène Royal. Et se sont à coup sûr améliorées depuis l'apparition des premières pastilles vertes, que ce nouveau système semble vouloir ressusciter, suivant en cela les recommandations plusieurs fois formulées par des rapports d'ingénieurs et hauts fonctionnaires.

Pastilles vertes : le retour ?

Mais si le macaron pour véhicules propres a disparu depuis dix ans des pare-brise français, n'est-ce pas en raison du casse-tête généré ? A Berlin, Cologne et Hanovre, où le dispositif porte ses fruits mais en irrite aussi plus d'un, c'est toute une organisation qui est mise en branle tant pour le délivrer – des centaines d'établissements habilités – que pour le contrôler, avec à la clé amendes, retrait de points du permis de conduire et exclusion du véhicule jugé polluant à l’extérieur d'une zone pré-délimitée. Les municipalités françaises auront-elles l'audace de fixer ces zones ? Seules les zones couvertes par un plan de protection de l’atmosphère (PPA) seront-elles visées ? Et les habitants possédant un vieux véhicule diesel d'occasion sans filtre à particules seront-ils priés de ne plus (trop) circuler en bas de chez eux ? Inimaginable, répondent les uns ; envisageable et déjà expérimenté disent les autres, du moins à l'échelle d'un bout de quartier à Paris via de la détection et identification de véhicules en mouvement, mais toute proportion gardée car ce fut appliqué aux déplacements d'une poignée d'agents municipaux, et non à ceux des habitants. Signe d'une méfiance à l'égard de ce genre d'annonce, les associations d'élus se sont en tout cas bien gardées pour l'heure de réagir à ce sujet.

Covoiturage et logistique

Il faut dire que leurs yeux sont braqués ailleurs, entre autres, sur le troisième appel à projets pour les transports collectifs en site propre, pour lequel le pâle exercice de style du gouvernement consiste à renverser le retard accumulé en annonces et promesses de résultats – enfin ! - attendus dans les prochaines semaines. De la table ronde sur la mobilité, il ressort aussi des actions en vue sur le covoiturage - campagne de communication nationale et référentiel de bonnes pratiques sur les aires de covoiturage en 2015 – et l'ouverture des données sur l'offre de transport. "Il a été esquissé l'intention de rénover la Loi d’orientation des transports intérieurs (Loti) datant de 1982 mais j'attendais plus d'ambition", a commenté par voie de communiqué François-Michel Lambert, député écologiste des Bouches-du-Rhône. Côté fret ferroviaire, la création de clusters dédiés et la mise en service de la troisième autoroute ferroviaire Calais-Le Boulou (Pyrénées-Orientales) ont été abordés. Annoncé il y a plus d'un an, cet axe longeant les Landes pour aller jusqu'au Nord soulèvera vite un autre enjeu, celui de son raccordement aux ports de la côte d'Opale et de l’Île-de-France, et plus globalement celui de la coordination entre ports, régions et RFF. Ce sujet sera d'ailleurs au cœur de la prochaine conférence pour la relance du fret ferroviaire, prévue le 12 décembre prochain où des mesures seront annoncées.

Climat, biodiversité, santé-environnement

Après les dégâts causés par une série de tempêtes sur le littoral aquitain (lire notre article ci-contre), de nouvelles mesures s'esquissent : un réseau national cohérent des observatoires du trait de côte devrait voir le jour en 2015, et l’État continuer d'accompagner les collectivités tentant de relocaliser des activités et des biens. L'adaptation au changement climatique fait aussi l'objet de diverses préconisations. En ville, le ministère de l’Écologie devrait aussi accroître son effort d'accompagnement des initiatives croisant mobilisation citoyenne et qualité de l'air (responsabilisation des habitants, capteurs en temps réel, etc). Et l'Ademe aider des agriculteurs à réduire leurs rejets atmosphériques. Le 17 décembre, au prochain conseil des ministres européens, Ségolène Royal a rappelé qu'elle présentera une initiative sur les perturbateurs endocriniens, dont la définition reste à préciser avant de pouvoir les réguler. "La ministre s’est engagée à être en pointe sur le sujet, nous veillerons à ce que des actes forts soient pris", a réagi François Veillerette, porte-parole de l'association Générations Futures. Un message sur les risques auxquels ces perturbateurs endocriniens exposent les femmes enceintes et jeunes enfants pourrait figurer dans les carnets de santé et de maternité, bientôt révisés. Enfin, alors que s'élabore au niveau européen une stratégie sur les résidus de médicaments présents dans les eaux, divers travaux et un guide technique sont prévus.