Aménagement numérique - Très haut débit : les élus sollicitent l'arbitrage du Premier ministre sur les zones conventionnées
Lorsque les solutions techniques sont épuisées, reste le recours politique... C'est le levier que viennent d'utiliser cinq associations d'élus (1) en demandant l'arbitrage du Premier ministre dans le domaine de l'aménagement numérique. Pour elles en effet, l'échec avéré des négociations entre collectivités et opérateurs sur la mise au point de la convention type de programmation et de suivi des déploiements du très haut débit crée une impasse dont il faut sortir rapidement.
La réussite du plan France Très Haut Débit repose notamment sur la consolidation des intentions d'investissement des opérateurs privés dans les réseaux FTTh. A cet effet, il est prévu que les engagements de déploiement soient encadrés dans les zones urbaines par des conventions "garantissant leur crédibilité et leur transparence". Collectivités territoriales et opérateurs ont planché cet été avec la mission France Très Haut Débit à la mise au point d'une convention type définissant des règles communes. Le projet en cours de préparation compte pas moins d'une trentaine de pages et aborde souvent les questions sous un angle très technique. Mais deux pierres d'achoppement sont au centre du débat
La première concerne les zones dont le débit est mauvais. Dans de nombreuses agglomérations, il existe encore des zones de bas débit et il est admis que les collectivités locales puissent négocier pour que les opérateurs les traitent en priorité dans leurs plans de déploiement (2), d'autant que le gouvernement avait fixé une date butoir pour leur résorption à 2017 (3). Or le projet de convention renvoie désormais les discussions à une négociation locale, sans référence de date, et prévoit de commencer la couverture en fibre optique de ces zones sans fixer d'échéance pour leur achèvement ni garantir la complétude des déploiements. Ainsi, les opérateurs seront en mesure d'amorcer un déploiement sans donner de garanties d'achèvement, même au delà de la date d'échéance de trois ans fixée par l'Union Européenne.
La seconde est relative au refus des opérateurs de donner des précisions de déploiement dans les zones très denses, alors que ce point était également prévu initialement dans le plan national (4).
Certes, les associations d'élus disent comprendre la situation des opérateurs et leur difficulté à définir des engagements d'investissement à moyen terme et plus généralement à quantifier leurs engagements. Mais devant un texte qui, de l'avis des élus, est moins engageant pour les opérateurs que les propositions initiales de la Mission, ils demandent l'arbitrage du Premier ministre afin de définir des clauses permettant de constater l'avancement des engagements privés. Ce point est nécessaire pour permettre juridiquement au secteur public d'intervenir à la place de l'opérateur en cas de doute avéré.
Ce "coup de pouce" semble en tout cas nécessaire, non seulement pour permettre à la mission de boucler son projet de convention, mais aussi pour garantir aux élus qu'ils n'auront pas de mauvaises surprises après avoir signé un accord conventionnel avec un opérateur.
Philippe Parmantier / EVS
(1) Association des maires de France (AMF), Association des maires de grandes villes de France (AMGVF), Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), Assemblée des communautés de France (ADCF) et Assemblée des départements de France (ADF).
(2) "Ces conventions doivent faire l'objet de discussions entre l'opérateur et les collectivités territoriales concernés afin d'envisager, dans la limite des contraintes opérationnelles, une priorisation des déploiements dans les zones ne bénéficiant pas à ce jour d'un accès à un bon haut débit (3 à 4M bits/s) compensé, le cas échéant, par un retardement du déploiement dans les zones bénéficiant déjà d'un bon haut débit" (PFTHD P.10)
(3) "Un objectif de cohésion urgent et crucial : réduire la fracture numérique en apportant du haut débit de qualité (3/4Mbits/s) à l'ensemble des foyers, par l'utilisation de toutes lestechnologies qui peuvent s'inscrire dans l'objectif final" (dossier de présentation de la feuille de route gouvernementale). Toutefois l'échéance de 2017 annoncée à plusieurs reprises publiquement par Fleur Pellerin ne semble pas être mentionnée dans les textes officiels….
(4) "Les opérateurs devront préciser leurs engagements de déploiement, indifféremment que ces zones soient classées en zones très denses ou non" (PFTHD P.9)