Trafics de drogue : avec ses opérations "place nette XXL", Gérald Darmanin veut viser la tête des réseaux

Alors que la commission d'enquête sénatoriale sur l'impact du narcotrafic poursuit ses travaux, avec un point d'étape attendu ce jeudi 28 mars, le ministre de l'Intérieur veut passer à la vitesse supérieure. Après ses actions de "pilonnage" de points de deal, il lance des opérations "place nette XXL" un peu partout en France, expliquant vouloir atteindre les têtes de réseaux. 

"Soit nous lâchons le travail contre la drogue et alors nous sommes comme les Pays-Bas, comme la Belgique, parfois comme l'Espagne, comme d'autres pays d'Amérique du Sud, aux mains des narcotrafiquants", soit "nous luttons contre une pieuvre dont on ne doit pas simplement couper les pattes mais atteindre la tête". Cette petite phrase lâchée par le ministère de l'Intérieur, Gérald Darmanin, lundi 25 mars, lors d'un déplacement à Roubaix sur le thème de la lutte contre le trafic de stupéfiants, en dit long sur le climat délétère qui règne au sein même de l'Union européenne. Elle fait écho aux travaux de la commission d'enquête sénatoriale qui, audition après audition, révèle l'ampleur du trafic en France et en Europe, n'épargnant plus aucun territoire. Son rapporteur, le sénateur Étienne Blanc, n'avait pas hésité à brandir le risque que la Belgique et les Pays-Bas ne deviennent de véritables "narco-États" (voir notre article du 29 février). Le sujet était d'ailleurs au cœur des réflexions du Forum européen pour la sécurité urbaine (Fesu) qui organisait la huitième édition de la conférence internationale sur le thème "sécurité, démocratie et villes" du 20 au 22 mars 2024, dans la capitale belge.

850 personnes à interpeller

Après sa politique de "pilonnage" (voir notre article du 6 octobre 2023), le ministre entend donc passer à la vitesse supérieure à travers ce qu'il nomme désormais les opérations "place nette XXL". Derrière ces efforts de communication, il souhaite faire du chiffre et couper les trafics à la racine. "Nous avons un objectif de 850 personnes à interpeller", a déclaré Gérald Darmanin, soulignant qu'il souhaitait "démanteler des points de deal en intégralité", en incluant les "têtes de réseau". "Nous sommes à peu près à un quart de cet objectif", a-t-il ajouté, précisant que 187 interpellations avaient déjà eu lieu, une semaine après le lancement de ces nouvelles opérations anti-drogue à Marseille où Emmanuel Macron s'était lui-même rendu le 19 mars, annonçant alors 89 interpellations en un jour. Déplacement qui avait valu la mise à pied du directeur de la rédaction de La Provence pour une Une jugée peu respectueuse par le propriétaire du journal Rodolphe Saadé.

15.000 policiers et gendarmes mobilisés

Ce lundi, quatre nouvelles opérations de ce type ont été menées simultanément en France, dans le Nord, dans l'agglomération lyonnaise, à Dijon et en région parisienne, notamment à Sevran (Seine-Saint-Denis) et Colombes (Hauts-de-Seine). Le ministre a annoncé que d'autres opérations de ce type seraient menées "dans plusieurs autres agglomérations dans les jours et les semaines qui viennent". 15.000 policiers et gendarmes seront mobilisés à cette fin. Dans le Nord, où près de 900 policiers ont été mobilisés, le préfet a fait état 74 interpellations lundi matin, soulignant que l'opération était "multidélinquance", avec un focus sur les stupéfiants. Ces opérations ont visé des villes comme Lille, Roubaix et Tourcoing, ville dont Gérald Darmanin a été le maire de 2014 à 2020. Ces villes pâtissent "de la proximité avec la Belgique". Seulement, le démantèlement de réseaux de ce côté-ci de la frontière n'auront aucun impact outre-quiévrain, à moins d'opérations concertées.

En attendant, la commission d'enquête sénatoriale poursuit ses travaux. Elle auditionnera ce mardi le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, et fera un point d'étape jeudi, à Valence, capitale d'un département, la Drôme, qui a été durement frappé par le narcotrafic, "avec des règlements de comptes violents et plusieurs narchomicides en 2023", indique la commission d'enquête, qui s'est déjà déplacée en Seine-Saint-Denis, à Verdun et Commercy, en Bourgogne, à Lyon, à Marseille et à Anvers.

 

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