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Cour des comptes - Tourisme en Languedoc-Roussillon : une copie à revoir pour la région Occitanie

Si la Cour des comptes n'est pas souvent tendre avec l'Etat, le chapitre de son rapport public 2018 intitulé "Le tourisme en Languedoc-Roussillon : un défi pour la nouvelle région Occitanie" laisse percer un certain regret d'une époque où les politiques de l'Etat ne s'embarrassaient pas trop de considérations locales. Le rapport relève en effet que "l'impulsion donnée par l'Etat dans les années 60 a fortement contribué à augmenter l'attrait de ce territoire mais, cinquante ans plus tard, cet acquis s'avère insuffisant au regard d'une économie touristique fragile, caractérisée par un manque de dynamisme et par des difficultés en matière d'emploi". Aux yeux de la cour, les collectivités territoriales n'ont manifestement pas su prendre le relais.

Fragilité et "manque de dynamisme"

Le rapport considère en effet que "l'effort financier des collectivités territoriales, bien inférieur aux recettes produites par le tourisme, n'a engendré que des résultats décevants", qui "s'expliquent essentiellement par le défaut de cohérence stratégique du conseil régional de Languedoc-Roussillon dans le domaine touristique".
Si le potentiel touristique du Languedoc-Roussillon demeure intact (climat, façade maritime, massifs montagneux, diversité des paysages, six sites inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco...), l'économie touristique est en revanche fragile et doit être "confortée". Le rapport apporte diverses preuves de cette fragilité et de ce "manque de dynamisme" : des taux d'occupation inférieurs à la moyenne nationale dans l'hôtellerie et les autres hébergements touristiques (mais en progression pour le camping), une occupation moyenne des hébergements touristiques de 42 jours par an, un logement en résidences secondaires représentant 60% des nuitées...

Une clientèle "peu diversifiée" et des touristes étrangers en baisse

La clientèle est également "peu diversifiée", avec en particulier une clientèle étrangère en baisse et moins nombreuse que dans les autres grandes régions touristiques, des flux dans les cinq aéroports du territoire nettement inférieurs à ceux des régions Paca ou Aquitaine, ou encore une activité de croisière qui reste "très réduite". Autre point faible relevé par la cour : un tourisme qui demeure très saisonnier et concentré sur le littoral.
A ces éléments s'ajoute - comme une conséquence logique - la fragilité du tissu économique des entreprises du secteur de l'hôtellerie-restauration, encore renforcée par la difficulté à recruter du personnel qualifié.

Des dépenses touristiques sans rapport avec les recettes

Face à ce constat qui ne brille pas par son optimiste, la Cour des comptes estime que l'action des collectivités affiche "des résultats mitigés". Leur contribution financière semble en effet relativement modeste au regard des enjeux et du potentiel, le rapport la chiffrant, pour l'année 2014, à 69,5 millions d'euros en fonctionnement et 27 millions en investissement.
Des chiffres sans commune mesure avec les retombées financières de l'activité touristique pour les collectivités, estimées à 565 millions d'euros en 2014 (dont 435 millions d'euros de taxes - TH et TFB - sur les résidences secondaires). Ces ressources sont toutefois concentrées sur quelques collectivités, "dessinant une carte très segmentée de l'espace touristique régional".

Une stratégie touristique régionale qui "manque de cohérence"

La stratégie touristique régionale de l'ancienne région Languedoc-Roussillon ne trouve pas davantage grâce aux yeux de la cour, puisqu'elle "manque de cohérence". Tout y passe en l'occurrence : un schéma régional "manquant de consistance", un comité régional du tourisme "affaibli" (par le transfert de ses principales compétences à la Sem Sud de France Développement et à la direction du tourisme du conseil régional), une stratégie de marque "hasardeuse" (la marque "Sud de France" se cantonnant de fait aux produits régionaux), une gouvernance touristique "complexe" (avec en particulier 138 offices de tourisme)...
Conséquence attendue d'une telle situation : des "résultats décevants", avec une nouvelle volée de critiques de la part de la Cour des comptes, comme l'accompagnement "imparfait" du secteur économique du tourisme ou des sites culturels insuffisamment mis en valeur.

Heureusement, l'Occitanie est arrivée...

Seul point positif après cet enterrement en règle de l'action de la défunte région Languedoc-Roussillon : des "perspectives nouvelles avec la région Occitanie". Encore faudra-t-il adapter la stratégie adoptée en juin 2017 pour la nouvelle région - le schéma "Cap sur l'innovation touristique" - aux enjeux particuliers du Languedoc-Roussillon et aux retard accumulés. De même, il conviendra d'assurer un pilotage "plus opérationnel" de la formation professionnelle, afin de disposer des compétences nécessaires au développement du secteur du tourisme.
Enfin il faudra aussi, pour la cour des comptes, instaurer une gestion unique des aides financières aux acteurs privés et reconsidérer les possibilités de dérogation aux transferts de compétences touristiques à l'intercommunalité, afin de pallier les retards évidents de cette dernière.

 

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