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Tourisme : en 2020, la France a perdu 28,4 milliards de recettes internationales

Atout France publie sa "Note de conjoncture de l'économie touristique" qui donne les résultats complets de l'année 2020 en termes de recettes touristiques internationales. Ces résultats montrent entre autres, après la reprise de l'été, une nette dégradation sur la fin de 2020 : -63% en novembre et -50,5% en décembre par rapport aux mêmes mois de 2019.

Dans le dernier numéro mensuel de sa "Note de conjoncture de l'économie touristique" (janvier 2021), Atout France retrace les chiffres de l'ensemble de l'année 2020, qui s'est révélée catastrophique pour les arrivées de touristes internationaux. Au cours de cette année en effet, la pandémie de Covid-19 a provoqué la perte de 28,4 milliards d'euros de recettes touristiques internationales. Celles-ci représentent près de la moitié des "60 milliards d'euros de recettes qui manquent à l'appel pour le tourisme français", évoqués il y a un mois par Jean-Baptiste Lemoyne, le secrétaire d'État en charge du Tourisme (voir notre article du 11 janvier 2021).

La situation de dégrade fortement en fin d'année 2020

Ces 28,4 milliards de pertes de recettes touristiques internationales représentent une chute de près de 50% par rapport à 2019. Elles pèsent sur l'activité touristique française, mais aussi sur la balance des paiements (même si, à l'inverse, les touristes français sont beaucoup moins partis à l'étranger en 2019). Malgré une forte dégradation, le solde du tourisme (les recettes des touristes internationaux moins les dépenses des Français à l'étranger) est toutefois resté positif en 2020 à 3,9 milliards d'euros, contre 10,8 milliards en 2019, soit une perte de près de 7 milliards.

L'un des principaux enseignements de la dernière livraison d'Atout France réside toutefois dans la dégradation de la situation en fin d'année 2020, conséquence de la reprise de la pandémie dans la plupart des pays européens et du durcissement des règles sanitaires. Après l'embellie de l'été – qui a vu à la fois le retour de touristes étrangers et le choix des Français de passer leurs vacances au pays –, les recettes du tourisme international reculent à nouveau plus fortement en fin d'année (-63% en novembre et -50,5% en décembre par rapport aux mêmes mois de 2019). Seule consolation : cette situation est partagée par tous les grands pays européens.

Location touristique entre particuliers : le fossé Paris-province

La note de conjoncture d'Atout France s'intéresse aussi à certains aspects sectoriels. Ainsi, la location touristique de particulier à particulier, notamment par le biais des plateformes, poursuit sa baisse en fin d'année. Elle recule en décembre de 28% pour ce qui concerne la demande (par rapport à décembre 2019), mais aussi de 15% pour ce qui concerne l'offre, confirmant ainsi le retrait d'un certain nombre de biens du marché de la location meublée. Ces chiffres recouvrent toutefois de très forts contrastes régionaux, particulièrement entre Paris-Ile-de-France et la province. Le recul de la demande en décembre est en effet de 65% pour la première (et de 43% pour l'offre) et de 20% (et 11%) pour le reste de la France. Les métropoles (y compris Paris) reculent de 43% (et 27% pour l'offre).

Atout France précise que "les destinations touristiques classiques du pourtour méditerranéen sont également frappées par une chute de l'activité, ainsi que les massifs de montagne affectés par la fermeture des remontées mécaniques. En revanche, le littoral atlantique et celui de la Manche affichent des indicateurs moins impactés par rapport à décembre 2019". Ces résultats sont d'autant plus à souligner que la clientèle de loisirs semble pourtant privilégier les modes d'hébergement individuels (favorisant la distanciation sociale), ce qui limite ainsi les reculs d'activité dans le locatif de particulier à particulier.

Le trou noir pour l'hôtellerie et le transport aérien

A l'inverse, l'hôtellerie subit de plein fouet l'absence de la clientèle internationale. En décembre, les hôtels affichent un taux d'occupation de 22% (11,4% à Paris), soit un recul de 35 points par rapport à décembre 2019 (moins 58 points à Paris). Ce recul est plus marqué dans le haut de gamme (-53 points), fréquenté par la clientèle internationale, que dans la gamme économique (-33 points). Sur l'ensemble de l'année 2020, à peine un tiers des chambres d'hôtel ont trouvé preneur en France métropolitaine. L'hôtellerie parisienne est particulièrement frappée, avec un taux d'occupation moyen annuel de 22,6% contre 80% en 2019. Et, au niveau national, le chiffre d'affaires par chambre disponible à la vente (RevPAR) s'effondre de plus de 60%.

Enfin, en matière de flux aériens internationaux, l'année 2020 s'achève avec des flux vers la France particulièrement faibles (comme dans les autres grandes destinations européennes) : -92% depuis l'Allemagne, -87% depuis la Chine, -83% depuis les États-Unis, -77% depuis le Royaume-Uni... En ce domaine, les prochains mois ne s'annoncent pas vraiment meilleurs. Atout France observe ainsi que les perspectives "restent très sombres pour le secteur aérien". En effet, "l'état des réservations à 3 et 6 mois révèle des carnets de commande très peu remplis [...]. Les réservations sont le plus souvent réalisées à la dernière minute, suivant l'évolution de la situation sanitaire des destinations et des contraintes de mobilités fixées par les autorités".   
 

Les hôteliers de disent "à l'agonie"

"Les derniers chiffres de l’activité hôtelière pour janvier 2021 sont alarmants et sans précédent dans l’histoire de la profession. Sur tout le territoire, les chiffres sont en chute libre, faute de déplacements de la clientèle touristique et avec la disparition de la clientèle affaires. Pour exemple, 60% des hôtels à Paris sont fermés." C'est ainsi que  l'Union des métiers des industries de l'hôtellerie (Umih) décrit la situation du secteur.
Les hôtels sont bien autorisés à rester ouverts. Mais qui va aujourd'hui à l'hôtel ? Côté tourisme de loisirs, rien n'incite la clientèle française, à défaut de clientèle étrangère, à y séjourner. C'est en tout cas ce que décrit l'Umih dans son communiqué du 12 février : "L'hôtellerie repose aussi sur un écosystème local, or le tissu touristique est rompu. Les restaurants, cinémas, musées, bars et discothèques sont fermés. Les offres touristiques ne sont plus attractives, les touristes ont déserté les hôtels aussi parce qu’ils sont contraints de se restaurer dans leur chambre, et ce dans les limites d’un couvre-feu à 18h." Certes, les vacances scolaires d'hiver débutent. Pourtant, "l'état des réservations, sur tout le territoire français, affiche un taux d’occupation catastrophique de 13.4%". En montagne, "seuls 10% des hôtels sont ouverts en montagne". Et, ajoute l'Umih, "ceux qui sont ouverts n’ont pas des perspectives réjouissantes, contrairement aux résidences et aux meublés, qui sont privilégiés en raison de leurs cuisines intégrées".
Quant à la clientèle d'affaires, entre le télétravail, les visioconférences et la mise à l'arrêt du secteur de l'événementiel… elle a pratiquement disparu. Reste à savoir dans quelle proportion elle reviendra un jour, sachant que les rendez-vous professionnels à distance nés avec la pandémie pourraient bien en partie rester durablement dans les moeurs.
Conclusion de l'Umih : les quelque 18.000 hôtels qu'elle représente "sont juridiquement ouverts mais économiquement fermés". Et estiment ne pas être suffisamment aidés : le fonds de solidarité serait moins favorable aux hôtels-restaurants qu'aux restaurants purs, l'aide mensuelle versée aux "gros-porteurs indépendants fermés faute de clients" serait dérisoire par rapport à leurs charges… et banquiers comme assureurs seraient peu conciliants.
C.M.

 

 

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