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Election - Tenue des bureaux de vote : comment Strasbourg suscite des vocations chez les citoyens

Dans un contexte inédit pour un second tour de l'élection présidentielle, des communes peinent à recruter des assesseurs. Ce n'est pas le cas de Strasbourg. La capitale de la région Grand Est tire régulièrement au sort des électeurs, puis leur lance un appel. Par centaines, ils répondent présents.

Dimanche prochain, la ville de Strasbourg ne manquera pas d'assesseurs dans ses 143 bureaux de vote. 1.175 personnes au total seront mobilisées toute la journée pour l'organisation du scrutin. Parmi elles, 811 seront des bénévoles dont les noms ont été tirés au sort. "Dans chaque bureau de vote, nous avons tiré au sort 80 à 100 électeurs", explique Eric Schultz, adjoint au maire notamment en charge des opérations électorales. "Ce sont donc quelque 14.000 électeurs à qui nous avons adressé ensuite un courrier, dans lequel nous leur avons proposé de devenir assesseur durant au moins une demi-journée de leur choix."
L'opération s'est révélée fructueuse. "Entre 500 et 800 personnes de toutes les catégories sociales et de tous les quartiers de la ville ont accepté notre proposition", révèle l'élu de sensibilité écologiste. Il précise que "beaucoup d'entre elles n'étaient pas au courant qu'elles peuvent participer à la tenue du bureau de vote."

"Une citoyenneté plus engagée"

Pour l'élection présidentielle de 2012, la ville ne disposait que de 146 assesseurs bénévoles. La cote d'alerte était franchie. Les élus municipaux ont alors initié des rencontres avec les représentants des partis politiques. "Ils nous ont envoyé des observateurs pour le dépouillement, mais nous n'avons pas eu d'assesseurs supplémentaires", se souvient Eric Schultz. En 2014, la municipalité a réagi en décidant, donc, de tirer au sort des électeurs. "Sur le plan technique, c'est très simple à organiser. Et la plus-value est importante : cela permet de rendre en quelque sorte au citoyen un droit qui lui appartient et ainsi de favoriser une citoyenneté plus engagée", met en avant l'adjoint au maire.
Certaines personnes tirées au sort ont tenté l'aventure et y ont pris goût. Si bien que la mairie dispose aujourd'hui d'un vivier de près d'un millier de bénévoles, lui permettant de voir venir sereinement les prochaines échéances électorales. Par exemple, elle compte déjà 650 inscriptions de bénévoles pour les élections législatives des 11 et 18 juin prochains. Soit plus que le minimum indispensable à l'organisation du scrutin. De ce fait, la mairie pourra réduire la durée des permanences : les assesseurs qui le veulent ne passeront pas une journée entière, et donc éprouvante, dans le bureau de vote.

Difficile d'attirer les plus jeunes

Vérifier les pièces d'identité des électeurs, ouvrir l'urne pour que ceux-ci y glissent leur enveloppe, enfin demander d'apposer une signature sur la liste d'émargement… de telles missions ne s'improvisent pas. Avant le scrutin, les citoyens tirés au sort suivent donc une courte formation. Elle ne leur permettra pas, toutefois, d'exercer dimanche prochain les fonctions de président et de secrétaire, qui seront réservées aux 342 agents et 22 élus municipaux engagés dans l'organisation du scrutin.
Globalement réussie, la recette strasbourgeoise devrait évoluer un peu ces prochaines années. "Nous allons probablement proposer de manière plus volontaire aux jeunes de 18 ans de devenir assesseurs", annonce Eric Schultz. "Nous voulons que leur entrée en citoyenneté soit marquée par un événement symbolique", précise-t-il. La mairie a jusqu'ici proposé systématiquement à tous ces nouveaux électeurs de participer à la tenue d'un bureau de vote. Mais sans avoir déclenché "un enthousiasme fou" de leur part.
 

Ailleurs aussi, le défi des maires pour recruter des assesseurs
Le sujet fait beaucoup parler de lui depuis le premier tour de l'élection présidentielle : le duel inédit entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron pour le second tour n'est pas sans causer quelques soucis pour les mairies qui craignent une pénurie d'assesseurs dans les bureaux de vote et s'organisent en conséquence. Des maires seraient même contraints de mobiliser des agents municipaux rémunérés. Selon André Laignel, vice-président PS de l'Association des maires de France, En Marche et le FN sont "incapables de fournir le nombre d'assesseurs nécessaires", alors que le code électoral exige que les bureaux de vote soient constitués, "au minimum, d'un président, d'un secrétaire et de deux assesseurs". Si leur nombre est inférieur à deux, les assesseurs manquants sont mobilisés parmi les conseillers municipaux ou parmi les électeurs présents à l'ouverture des bureaux de vote à 8h00. "Les militants FN avancent masqués et sont peu mobilisés tandis que ceux d'En Marche! n'existent pas sur le terrain", relève André Laignel. Pour y remédier, plusieurs villes ont lancé des appels à candidature ces derniers jours.
A Lille, "peu de partis s'étaient mobilisés au premier tour, et c'est encore plus difficile pour le second tour", confie Marie-Christine Staniec-Wavrant, adjointe à la maire de Lille. L'élue confirme devoir mobiliser "300 agents municipaux pour compléter le nombre d'assesseurs dans les 96 bureaux" de la ville. A Marseille, la mairie a lancé un appel à désignation de "100 présidents et 300 assesseurs pour les 480 bureaux de vote marseillais", a indiqué l'attachée de presse de la municipalité, Aurore Vincent. Une formation des présidents des bureaux de vote a été organisée cette semaine. La ville a par ailleurs mis en place le versement d'une indemnité pour les agents municipaux mobilisés, de 200 euros pour les présidents et de 160 euros pour les assesseurs.
A Auxerre, la ville a "l'ensemble des postes d'assesseurs pourvus pour le second tour", selon un responsable de la communication de la mairie. "On s'y est pris très en amont car on a vu arriver le problème". La ville a notamment "envoyé un courrier à tous les nouveaux inscrits" pour leur proposer d'être assesseur. Pas de problème non plus à Chalon-sur-Saône(Saône-et-Loire), où les assesseurs "se sont engagés pour les deux tours", selon une porte-parole de la mairie, ni à Grenoble, qui a sollicité ses résidents inscrits sur les listes électorales.
Envois de mails, appels téléphoniques, le PS des Bouches-du-Rhône "participe, et pas à la légère" à la recherche d'assesseurs et de présidents de bureaux de vote pour le second tour, rapporte l'un de ses responsables, Michaël Bruel. Celui-ci estime que le PS bouchera les trous dans environ un quart des bureaux de vote du département. "On est encore en train de travailler et il y a des communes entières" où le Parti socialiste fournit les assesseurs, ajoute-t-il, notamment dans de petites communes rurales.
Selon le porte-parole du FN en région Paca, Franck Allisio, son parti compte envoyer des assesseurs dans "environ 90% des bureaux de vote, comme au premier tour". "Ce sont nos adhérents, nos militants", et "nous avons également reçu des appels" de sympathisants de Debout la France, le parti de Nicolas Dupont-Aignan, explique-t-il.
Côté En Marche!, la référente départementale du mouvement, Corinne Versini, tente "de mettre deux adhérents partout" mais doit composer avec des troupes parfois "jeunes et inexpérimentées". Selon elle, parmi les responsables politiques locaux, "tout le monde ne joue pas le jeu" dans les Bouches-du-Rhône.
Avec AFP

 

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