Election présidentielle - Irrégularités du scrutin : on ne badine pas avec le code électoral
4.691 bulletins de vote déposés dimanche dans les urnes ont été invalidés. Le Conseil constitutionnel vient d'en fournir les raisons : l'absence d'au moins deux assesseurs dans le bureau de vote, l'oubli de la part de la commune de requérir la présentation d'un titre d'identité, ou encore le non-respect de l'ordre dans lequel se déroulent les opérations électorales.
Le Conseil constitutionnel a annulé 4.691 bulletins de vote déposés dans les urnes dimanche dernier lors du premier tour de l'élection présidentielle, a annoncé le 26 avril le président de l'institution, Laurent Fabius. "Des irrégularités substantielles" se sont produites dans les bureaux de vote où les électeurs ont déposés ces bulletins, a-t-il expliqué dans une allocution.
La juridiction en charge de veiller à la régularité de l’élection présidentielle détaille dans une déclaration publiée au Journal officiel du 27 avril les motifs qui l'ont conduite à annuler ces suffrages. Les exemples fournis révèlent une nouvelle fois que l'organisation du scrutin, le dépouillement et la transmission des résultats requièrent de la part des communes la plus grande rigueur.
Des électeurs n'avaient pas à présenter leur titre d'identité
Dimanche soir, après le dépouillement, le maire de Louan-Villegruis-Fontaine (Seine-et-Marne) n'a pas transmis à la préfecture le procès-verbal des opérations électorales, rapportent les Sages. Cet oubli a conduit à l'annulation des 302 suffrages exprimés par les électeurs ayant voté dans la commune. Les bulletins de vote recueillis à Leychert (Ariège) et dans le bureau de vote n° 25 de la commune d'Acoua (Mayotte) ont été annulés pour la même raison. Quant à la commune de Nantillé (Charente-Maritime), elle a bien transmis le procès-verbal dès la fin du dépouillement, mais ce dernier était incomplet. Considérant que "ce manquement rend impossible le contrôle de la régularité et de la sincérité du scrutin", le Conseil constitutionnel a invalidé les 201 bulletins de vote de cette commune. Il a pris une décision similaire pour le bureau de vote n°3 de la commune d'Ecouen (Val-d'Oise), où le millier de votants a été invité à signer la liste d'émargement avant le dépôt du bulletin dans l'urne, et non après.
A Lamastre, cité de 2.382 habitants en Ardèche, le président du bureau de vote et les assesseurs n'ont pas exigé des électeurs la présentation d'un titre d'identité, en dépit d'une obligation qui concerne toutes les communes de plus de 1.000 habitants. De passage, dimanche, dans la commune pour effectuer un contrôle, le délégué du Conseil constitutionnel a recommandé aux autorités de se mettre en conformité avec le code électoral. Mais ces consignes n'ont pas été appliquées. "[La] méconnaissance délibérée et persistante de dispositions destinées à assurer la régularité et la sincérité du scrutin" entraîne l'annulation des 1.566 suffrages émis. Les 532 bulletins recueillis dans le bureau n° 2 de la commune de Saint-Sauveur-Lendelin (Manche) ont été invalidés pour les mêmes raisons.
Deux assesseurs au moins par bureau
L'absence de deux assesseurs aux côtés du président du bureau de vote est un autre motif d'annulation. Le Conseil constitutionnel recense deux infractions à cette obligation, la première dans un des bureaux de vote de la commune Les Abymes (Guadeloupe), la seconde dans un bureau de vote de L'Ajoupa-Bouillon (Martinique). Dans cette commune, les deux assesseurs n'ont été absents qu'une partie de la journée. Mais le Conseil constitutionnel a jugé tout de même que cette entorse au code électoral a pu favoriser la fraude. Il a donc annulé les 218 bulletins de ce bureau.
On ne badine pas avec le code électoral. Mais les exigences qu'il pose pourraient entraîner des difficultés pour l'organisation du deuxième tour, le 7 mai. C'est l'inquiétude qu'a exprimée par exemple Stéphane Baudet dans une interview au Parisien. Le président de l'Association des maires d'Ile-de-France craint qu'avec l'élimination des candidats socialiste et Les Républicains, les communes peinent à trouver des assesseurs. Les maires ne pourront pas transiger avec la règle, a prévenu le président du Conseil constitutionnel. "Il s’agit d’une garantie du bon déroulement des opérations électorales", a-t-il insisté.
Pour l'heure, dressant le bilan du premier tour, Laurent Fabius a jugé que les irrégularités ont été "assez peu nombreuses". Elles ont entraîné l'annulation de 4.691 suffrages. Un chiffre toutefois plus élevé qu'après le premier tour de l'élection présidentielle de 2012. Le Conseil constitutioinnel avait alors annulé 2.541 suffrages.