Team France Export : la Cour des comptes appuie l'idée des comités stratégiques régionaux

Face à un impact limité et à une réforme de la gouvernance non aboutie, la Cour des comptes propose des pistes pour améliorer l'efficacité de la Team France Export mise en place en 2018. Elle insiste sur la mise en place des comités stratégiques régionaux (en cours d'installation), une meilleure cohérence entre les prestations du guichet unique et les SRDEII des régions et la reconfiguration de l'offre d'accompagnement.

Une stratégie aux priorités insuffisamment définies ou contestables, une réforme de la gouvernance qui s'est arrêtée au milieu du gué, un impact limité… dans un rapport publié le 5 octobre, la Cour des comptes se montre critique à l'égard des dispositifs de soutien à l'export. Il faut dire que le dispositif mis en place en 2018 n'a rien fait pour enrayer le déficit commercial de la France qui atteint des niveaux abyssaux : 139 milliards d'euros sur un an (contre 84,7 milliards d'euros en 2021) après avoir plongé de 15,3 milliards d'euros au mois d'août. Si la crise énergétique plombe le solde extérieur, cela fait quinze ans que la balance commerciale est en souffrance. Au-delà de la dépendance énergétique, ce sont le faible dynamisme des exportations, les faiblesses structurelles et une insuffisante compétitivité qui expliquent ces mauvais résultats. À cet égard, le dispositif de guichet unique, la Team France Export (TFE), mis en place en 2018 dans le cadre de la stratégie de soutien au commerce extérieur (stratégie de Roubaix), devait permettre de regrouper l'offre de l'ensemble des acteurs publics de l'export (Business France, Bpifrance, CCI notamment) pour la rendre plus complémentaire, plus lisible et plus accessible. Mais d'après la Cour des comptes, l'objectif est encore loin d'être atteint.

Des régions diversement intégrées au sein de la Team France Export

Première critique : la gouvernance. Si la Cour des comptes reconnaît des progrès en matière de coordination des acteurs, elle estime que les régions se sont diversement intégrées au sein de la TFE. "Certaines régions ont choisi de conserver une agence régionale de développement très active, dont les actions recouvrent largement celles de la TFE", assure le rapport prenant exemple sur l'offre d'Ad'Occ, l'agence de la région Occitanie. Même chose pour la région Bretagne, qui a fait le choix d'une structure forte, Bretagne Commerce International, dont l'action est largement concurrente de celle de la TFE en matière d'accompagnement collectif et d'organisation de participation à des salons.
D'autres régions, au contraire, se sont bien intégrées au guichet unique et considèrent Business France, Bpifrance et les CCI comme des opérateurs efficaces pour atteindre leurs propres objectifs. La région Auvergne-Rhône-Alpes s'est ainsi coordonnée avec Business France pour proposer un chèque relance export régional complémentaire de celui proposé par le plan de relance national.

Installer des comités stratégiques régionaux

Autre question posée par la cour : la coordination entre les prestations de la TFE et les schémas de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) établis par les régions. Sur ce point, elle rappelle le vœu exprimé par certains interlocuteurs de créer une instance de pilotage stratégique régionale - des comités stratégiques régionaux - pour mutualiser l'information entre les différents acteurs locaux de la TFE et s'assurer que les prestations proposées sont bien adaptées aux priorités stratégiques régionales. C'était notamment un souhait de Régions de France, et leur installation avait été actée par un courrier du 2 février 2022 de Carole Delga, présidente de l'association, et Franck Riester, alors ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l'attractivité (voir notre article du 10 février 2022). Les premiers comités stratégiques régionaux se tiennent actuellement.

Un taux d'impact inférieur à 50%

Au-delà de la gouvernance, la Cour des comptes pointe le manque d'impact de l'offre financière pourtant conséquente et de l'offre d'accompagnement. Les acteurs publics du soutien à l'export bénéficient ainsi d'un total de 1,1 milliard d'euros de la part de l'État. Les engagements pris par ce dernier pour soutenir certaines entreprises ou opérations d'export s'élèvent à 61 milliards d'euros. L'impact de la mobilisation de ces sommes reste limité : 27% seulement des entreprises bénéficiaires ont constaté une facilitation dans leur développement à l'international. En 2021, 11.500 entreprises ont bénéficié d'une des offres d'accompagnement proposées (diagnostic export, analyse de potentiels de marché, participation à des salons à l'étranger…), soit un peu plus de 8% du total des entreprises exportatrices (136.400) et près de 12.000 ont accueilli un contrat de volontariat international en entreprise (VIE). Mais "les dispositifs ont le plus souvent un taux d'impact inférieur à 50%, ce qui signifie que moins d'une entreprise sur deux a connu, à la suite de ces prestations, de nouveaux courants d'affaires", insiste le rapport, qui critique le choix de cibler les PME et entreprises de taille intermédiaire primo-exportatrices qui ne sont pas celles qui ont le plus fort potentiel d'internationalisation.

Deux niveaux d'offres d'accompagnement

Pour améliorer l'impact, la Cour des comptes propose de reconfigurer l'offre d'accompagnement, avec un premier niveau, gratuit, accessible à toutes les entreprises, et en particulier aux PME et ETI, et un second niveau, avec un accompagnement plus personnalisé, gratuit ou à coût modique, pour les entreprises jugées prioritaires. Ces dernières seraient sélectionnées en lien avec les filières économiques, parmi les 8.000 PME et ETI de croissance et au sein des secteurs stratégiques déjà identifiés par des initiatives récentes comme France 2030 ou les stratégies d'accélération de l'innovation. La cour table ainsi sur l'accompagnement de 1.000 entreprises prioritaires par an. Pour les entreprises non prioritaires, une offre payante de la TFE pourrait être proposé. Elles pourraient aussi être orientées vers des acteurs privés proposant la même offre.

Pour transformer l'offre, la Cour estime qu'il faudrait revoir le modèle économique de Business France avec moins de recettes commerciales et plus de ressources publiques, mais avec des nouveaux objectifs comme le montant du chiffre d'affaires à l'export que son accompagnement permettrait de générer.