Services publics : un collectif plaide pour "renouer le lien avec les besoins de la société"
Santé, éducation, transports, justice : "les moyens des services publics augmentent depuis vingt ans moins rapidement que les besoins sociaux", s'alarme le collectif Nos services publics dans son premier "Rapport sur l'état des services publics".
Certes réelle, l'augmentation des effectifs et des dépenses en faveur des services publics n'est pas suffisante face à l'explosion des besoins des usagers, s'inquiète le collectif de fonctionnaires Nos services publics, dans un rapport rendu public ce 14 septembre. Connu pour ses prises de position souvent critiques à l'égard du gouvernement, ce collectif réunit des agents publics de l'Etat, des hôpitaux et des collectivités soucieux de faire émerger une vision alternative et moins "gestionnaire" des services publics. Selon le rapport, qui a été nourri par les témoignages d'une centaine d'agents publics, chercheurs et citoyens, les services publics connaissent une "attrition".
Le "décrochage" conduit au développement de l'offre privée, notamment pour les écoles et les cliniques. Or, ces services concurrents du public "se caractérisent par un coût supérieur (...) et une absence d'accueil inconditionnel", contrairement à la vocation universelle des services publics, fait valoir le collectif.
"Partir des besoins des gens"
En plus d'accroître les inégalités, "ce développement d'un secteur privé de niche entraîne progressivement la transformation du service public en un service minimum et dégradé", caractérisé par exemple par l'explosion des délais de jugement, poursuit-il.
La réponse aux besoins sociaux (accélération du changement climatique, vieillissement de la population, accès en masse à l'enseignement supérieur...) "pourrait constituer un objectif prioritaire des services publics, estime le collectif, qui ne formule pas de propositions précises. "Redire que les services publics doivent partir des besoins des gens, c'est déjà suggérer une boussole pour les services publics qui serait assez distincte de la boussole dominante en ce moment", souligne le porte-parole du collectif, Arnaud Bontemps.
Le rapport aborde la question des moyens du service public dans un chapitre consacré "au fonctionnement et au financement des services publics". Un chapitre qui dépeint de manière sombre l'état de la fonction publique. "L’attractivité des emplois publics est en baisse", s'inquiète le collectif. Les chiffres sont sans appel : le nombre de candidats aux concours externes d'accès à la fonction publique d'Etat est ainsi passé de 640.000 en 1997 à 270.000 en 2017. En cause, les politiques de prévention "limitées", face à l'augmentation des "troubles musculosquelettiques" et de la "souffrance psychique" des agents. La politique de maîtrise salariale des gouvernements successifs est aussi pointée du doigt. Entre 2009 et 2019, le salaire net moyen des salariés de la fonction publique "est resté relativement stable, alors que celui des salariés du secteur privé a augmenté de 13,1%".
Augmentation des impôts : non au "tabou"
Le rapport rend aussi compte de la percée de l'emploi des agents contractuels, au détriment de celui des fonctionnaires : la part de ces derniers dans l'ensemble des actifs ayant un emploi ne serait plus que de 13,8% en 2030, contre 16,3% en 2006.
Face à ces constats, "un redimensionnement financier et RH de la fonction publique apparaît indispensable", estime Nos services publics. Qui fustige "le paradigme de la réduction des dépenses publiques". Le collectif considère que "l’augmentation des impôts et des cotisations n’apparaît (…) pas comme un levier impossible pour le financement des services publics". Il observe cependant que la progressivité du système fiscal, facteur important du contentement à l'impôt, "s’est progressivement érodée".
Le rapport va être envoyé au gouvernement et un débat avec des élus, des représentants syndicaux et des chercheurs est également prévu le 26 septembre, à l'Assemblée nationale. Ce débat se tiendra la veille de la présentation du projet de loi de finances pour 2024, qui prévoit plusieurs milliards d'euros d'économies, dans les domaines notamment de la santé, du logement et du travail.