Secrétaires généraux de mairie : la "promotion interne réservée" va-t-elle être remise en cause ?

Les secrétaires généraux de mairie pourraient finalement ne pas être favorisés en matière de promotion interne, contrairement à l'intention affichée par le Parlement lors du vote, à la fin de l'année dernière, de la loi visant à revaloriser ce métier. Le projet de décret devant mettre en musique le principe pourrait en effet ne pas voir le jour, selon plusieurs sources concordantes contactées par Localtis.

Devant les membres du conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), qui examinaient en séance plénière, le 13 novembre, le projet de texte réglementaire, la directrice générale des collectivités locales, Cécile Raquin, aurait annoncé vouloir proposer aux ministres concernés de renoncer à sa publication, alors que l'objectif était encore, il y a un mois - au moment de la publication de la circulaire ministérielle relative à la réforme du cadre statutaire applicable aux secrétaires généraux de mairie -, de le publier "d’ici la fin de l’année 2024", afin de le rendre applicable aux "promotions de l’année 2025".

"Promotion au choix"

L'article 7 de la loi, qui est en cause, dispose qu'en matière de promotion interne, le président du centre de gestion (CDG) de la fonction publique territoriale "veille à ce que les listes d'aptitude comprennent une part, fixée par décret, de fonctionnaires exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie". Il s'agissait pour le législateur de faire en sorte que les listes d'aptitude à la promotion interne réservent une part des nominations possibles à des fonctionnaires exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie (quel que soit leur cadre d'emplois d'appartenance et quelle que soit leur catégorie hiérarchique), explique le gouvernement dans le rapport de présentation du projet de décret.

Ce dernier fixe la part réservée à "au moins un fonctionnaire exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie", comme le demandait la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG) au moment des travaux préparatoires. En clair, dans le cadre de la promotion dite "au choix" - qui permet aux bénéficiaires d'accéder à la catégorie supérieure (B ou A) -, chaque liste d'aptitude établie par le président du CDG sur proposition de l'autorité territoriale devrait comprendre au moins un fonctionnaire exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie. Selon le projet de décret, l'obligation n'aurait pas lieu de s'appliquer lorsqu'aucun fonctionnaire exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie ne réunit les conditions de promotion requises par les statuts particuliers.

"Discrimination positive"

De telles dispositions ont été très mal accueillies par les représentants syndicaux membres du CSFPT. Ceux-ci leur reprochent de mettre sur la touche les quelque 15% de secrétaires généraux qui ne sont pas affiliés à un CDG. De plus, la mesure établirait "une priorité" en faveur des secrétaires généraux de mairie, mais "au détriment des autres agents", comme le déplore Laurent Mateu (Force ouvrière). En effet, elle s'appliquerait sans création de droits supplémentaires à la promotion interne, laquelle est encadrée par des quotas. La nouvelle règle instaurerait "une forme de discrimination", s'insurge de même Pascal Kessler (FAFP). Pour qui la publication du texte "ouvrirait la boîte de Pandore", avec d'inévitables contentieux. 

Lors des débats en première lecture sur la proposition de loi à l'Assemblée nationale, le gouvernement lui-même avait parlé d'une mesure faisant la part belle à la "discrimination positive". La promotion interne "s’apprécie en principe au regard des qualités et des aptitudes d’un agent, non en fonction des caractéristiques de la filière à laquelle il appartient", critiquait-il encore. Ces arguments avaient convaincu les députés, qui avaient supprimé la disposition litigieuse. Mais, en commission mixte paritaire, députés et sénateurs avaient décidé de la repêcher. 

"Position de sagesse"

Tout en se défendant de vouloir "s'opposer" à l'application d'une disposition prévue par la loi, la FNCDG assure qu'elle a "toujours exprimé de fortes réserves quant à ses effets". Si elle devait être mise en oeuvre, la mesure créerait selon elle des "difficultés et incompréhensions". "Nous ne pouvons que comprendre la position de sagesse exprimée par la DGCL sur le projet de décret", assure donc la fédération.

Le vote unanime des représentants syndicaux membres du CSFPT contre le projet de décret oblige en pratique le gouvernement à présenter ce dernier à nouveau lors de la prochaine séance de l'instance. Mais cela pourrait ne pas se produire, si les ministres concernés - à commencer par celui de la Fonction publique - décident d'arrêter net la préparation du projet de texte.