Sécheresse : le cadre des restrictions d'eau des sites industriels fixé

Pris dans la suite du plan Eau, un arrêté, paru ce 5 juillet, établit le cadre réglementaire national pour la mise en œuvre d’une gestion plus sobre de la ressource en eau au sein des sites industriels en période de sécheresse.

L’arrêté relatif aux mesures de restriction, en période de sécheresse, portant sur le prélèvement d’eau et la consommation d’eau des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) est paru ce 5 juillet. Il s’inscrit dans le plan "pour une gestion résiliente, sobre et concertée de la ressource en eau", présenté par Emmanuel Macron le 30 mars dernier (voir notre article). Malgré les précipitations printanières, deux tiers des niveaux des nappes phréatiques sont toujours au plus bas pour la saison et cela ne pourrait être qu'un début, selon le dernier bulletin de situation du BRGM (voir notre article du 15 juin 2023). Une quinzaine de départements, soit quasiment le double par rapport à juin 2022, sont déjà en certains endroits en situation de "crise" sécheresse, entraînant d'importantes restrictions d’eau.

L’objectif du présent arrêté ministériel est donc de proposer des éléments de réglementation nationale dédiés à une gestion plus sobre de la ressource en eau pour certaines catégories d’ICPE, sur lesquels les arrêtés préfectoraux pourront s’appuyer. Sont concernés les sites industriels relevant du régime de l’autorisation ou de l’enregistrement et dont le prélèvement d’eau total annuel "est supérieur à 10.000 mètres cubes" (à l’exception de ceux nouvellement autorisés ou enregistrés depuis le 1er janvier 2023). Faute d’être "à la hauteur des enjeux", le texte soumis à consultation en mai dernier a laissé perplexe Amaris, l'association de collectivités accueillant sur leurs territoires des activités générant des risques industriels majeurs (voir notre article du 12 juin 2023). Le gouvernement n’a toutefois pas revu sa copie, et seules certaines dispositions ont été modifiées à la marge, s’agissant entre autres des modalités de calcul du volume de référence auquel s’appliquent les réductions ou du volume économisé permettant au contraire de passer entre les mailles du filet. 

Quatre niveaux de restriction en période de sécheresse

Pas de changement sur les quatre niveaux de restriction proportionnés à la gravité de la sécheresse sur leur territoire d’implantation : vigilance (sensibilisation accrue du personnel de l’établissement aux règles de bon usage et d’économie d’eau selon une procédure écrite affichée sur site) ; alerte (réduction du prélèvement d’eau de 5%) ; alerte renforcée (réduction du prélèvement d’eau de 10%) ; et crise (réduction du prélèvement d’eau de 25%). Les réductions appliquées à un volume de référence sont atteintes "au plus tard trois jours après le déclenchement du niveau de gravité correspondant", précise l’arrêté. Au stade d’alerte renforcée ou de crise, l’exploitant "transmet chaque semaine, à l’inspection des installations classées, les volumes d’eau prélevés et consommés sur les sept jours qui précèdent et les volumes prévisionnels pour les besoins de son installation pour les sept jours qui suivent", ajoute-t-il. 

Si le prélèvement et le rejet en eau (direct ou indirect) ont lieu dans la même masse d'eau, les réductions s'appliquent à la consommation d'eau, telle que définie par l’arrêté, c’est-à-dire le volume d'eau prélevé duquel est soustrait le volume en mètres cubes par jour rejeté. Dans le cas où, au sein d'une même masse d'eau, le volume rejeté est supérieur au prélèvement d'eau, la consommation d'eau est donc "considérée comme nulle". Le prélèvement dans le réseau d'adduction (eau potable) n'est en revanche pas considéré comme étant effectué dans la même masse d'eau que le rejet, ajoute le texte. 

Des exemptions pour certains secteurs 

L’arrêté fixe également des modalités d’exemption à ces restrictions "en fonction des secteurs d’activité, des économies d’usage de l’eau déjà réalisées et de la capacité de réutilisation des eaux au sein des installations". Sont notamment exclus les captages d’eau potable, ceux destinés aux établissements de santé, l’abreuvement des animaux, les installations de production d’électricité et d'énergie renouvelable ou encore le secteur des déchets. Idem pour les exploitants des établissements "ayant réduit leur prélèvement d’eau de plus de 20% depuis le 1er janvier 2018" (contre 15% dans le projet d’arrêté) et ceux "utilisant, par rapport à leur prélèvement d’eau, au moins 20% d’eaux réutilisées". 

Les arrêtés "locaux" pourront être plus contraignants

Ce texte s’applique sans préjudice des mesures de restrictions prévues par les arrêtés d’orientations de bassin, les arrêtés-cadres départementaux et inter-départementaux, ainsi que des arrêtés préfectoraux applicables aux ICPE. Ces arrêtés peuvent notamment fixer, lorsque le contexte local le justifie, des dispositions "plus contraignantes" que celles prévues par l’arrêté-cadre, "en fixant des objectifs de réduction différents" (les fameux 5%, 10% et 25%) ou en modifiant la liste des installations exemptées ou des pourcentages mentionnés par le texte s’agissant des économies d’eau déjà réalisées et de la capacité de réutilisation des eaux au sein des installations. Ces arrêtés pourront par ailleurs "être révisés afin de prendre en compte les dispositions du présent arrêté", indique la notice.

Les éléments tenus à jour à la disposition des inspections pourront également être "adaptés en conséquence". Ces justificatifs seront produits par l’exploitant "au plus tard trois jours après le déclenchement d'un niveau de gravité" ou, "s’il est déjà en période de sécheresse, trois jours après l'entrée en vigueur du présent d’arrêté". La liste des volumes d'eau prélevés, rejetés et consommés associés à chaque milieu et celle des améliorations ou investissements ayant permis de réduire les volumes prélevés ou consommés et les volumes économisés correspondants, chaque année, depuis le 1er janvier 2018, seront quant à elles établies  "au plus tard trois mois après l'entrée en vigueur du présent arrêté". 

 
Référence : arrêté du 30 juin 2023 relatif aux mesures de restriction, en période de sécheresse, portant sur le prélèvement d'eau et la consommation d'eau des installations classées pour la protection de l’environnement, JO du 5 juillet 2023, texte n° 22.