Révision sexennale des valeurs locatives des locaux professionnels : ses effets repoussés à 2026

Prévue d'abord pour 2023, puis pour 2025, la prise en compte des valeurs locatives mises à jour des 3,5 millions de locaux professionnels se fera finalement en 2026. Un amendement actant ce nouveau report devrait être adopté par le Sénat, lors de la discussion en cours du projet de loi de finances pour 2024. Il traduit le résultat d'un accord entre le gouvernement et les associations d'élus locaux. L'idée est notamment de se laisser le temps de définir des mesures de lissage des conséquences de la révision.

La mise à jour des paramètres servant à l'évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels, lesquelles sont au cœur du calcul de la taxe foncière et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) dues par le monde économique, sera prise en compte dans les rôles d'imposition de l'année 2026, annoncent le gouvernement et les associations de maires et de présidents d'intercommunalité (Association des petites villes de France, Association des maires de France, Association des maires ruraux de France, France urbaine, Intercommunalités de France, Villes de France).

"Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics, et les principales associations d’élus (…) se sont réunis à deux reprises au cours de ces dernières semaines pour échanger sur la mise à jour des valeurs locatives des 3,5 millions de locaux professionnels et commerciaux", indique le communiqué commun, rendu public ce 27 novembre. Résultat de cette concertation : la décision d'intégrer la mise à jour des valeurs locatives des locaux professionnels finalement un an après l'échéance de 2025, inscrite dans la loi de finances pour 2023. Cette dernière avait prévu un premier report de deux ans (de 2023 à 2025) de la prise en compte de l'actualisation des paramètres (périmètres des secteurs d’évaluation, grilles tarifaires, coefficients de localisation) servant à évaluer les valeurs locatives.

"Le bon calendrier, on l'a défini ensemble"

Lancée en 2010, la révision des valeurs locatives des locaux professionnels a été appliquée aux bases d’imposition de 2017. C'était le début d'une mise à jour annoncée comme permanente, pour éviter, ensuite, que ne se forment de nouveau des écarts entre les valeurs locatives et la réalité des loyers du marché. Dans ce but, les grilles tarifaires appliquées aux bases imposables sont mises à jour annuellement, et, tous les six ans, doit être mise en œuvre une révision portant sur les différents paramètres de calcul des valeurs locatives des locaux professionnels et commerciaux. Préparée en 2022, cette révision sexennale devait s’appliquer aux bases de l'année 2023. Toutefois, les commissions départementales des valeurs locatives (CDVL) chargées de se prononcer sur les projets de révision, ont été à la peine, compte tenu dans certains cas de la faiblesse du volume de données réunies par l'administration fiscale (voir notre article du 20 septembre 2022). En outre, de fortes évolutions des cotisations dues par les contribuables se sont fait jour. Avec, selon les élus locaux, le risque d'une augmentation des cotisations mises à la charge des commerces de centre-ville, et à l'inverse celui d'une diminution des cotisations perçues sur les commerces situés en périphérie.

"Le bon calendrier, on l'a défini ensemble", parce que "c'est votre impôt", déclarait Thomas Cazenave, le 23 novembre, lors de la table ronde du Congrès des maires de France consacrée aux finances. "Ma responsabilité, c'était de reprendre strictement la position sortant du débat avec les associations d'élus", disait-il. En sachant, donc, que les intéressées ont opté pour une application de la révision en 2026. L'objectif est de "prendre le temps d'étudier les différents paramètres, de mesurer les effets au niveau des différentes intercommunalités et de laisser à l'État le temps d'avoir des échanges avec les syndicats professionnels", explique-t-on à l'Association des petites villes de France (APVF). Où l'on se dit satisfait de la concertation engagée par le gouvernement. Mais Bercy a particulièrement tardé à engager les discussions, observe une source bien informée. Selon qui le report est mécanique. En outre, les élus locaux auraient fait savoir qu'ils préféraient ne pas voir d'interférences entre les élections municipales du printemps 2026 et l'actualisation des bases de la taxe foncière. Le décalage d'une année supplémentaire qui vient d'être décidé, règle le problème, puisque les contribuables seront destinataires à partir de septembre 2026 de leurs avis d'imposition prenant en compte les effets de la révision sexennale.

Lissage des effets de la révision

Le nouveau calendrier sera acté en principe via un amendement du groupe Union centriste déposé dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, et auquel le gouvernement apportera son soutien. Par cet amendement, c'est aussi la nécessité d'une révision des paramètres d'évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels qui est reconnue, se félicite-t-on à l'APVF. En soulignant que le processus ne doit pas s'appliquer "brutalement". Les associations d'élus locaux prônent en effet une prise en compte progressive des valeurs locatives liées aux marchés. Une demande entendue par Bercy, qui a déjà présenté des propositions de mesures de lissage appliquées aux valeurs locatives des locaux professionnels. La discussion sur ce point crucial se poursuivra "début 2024" au cours d'"un nouveau cycle de travail", indique le communiqué du gouvernement et des associations d'élus.

Au cours de ces réunions, Bercy "partagera les résultats de simulations". De leur côté, les associations d'élus locaux ne manqueront pas de poser leurs questions. France urbaine compte ainsi interpeller l'administration fiscale sur le décalage de cinq ans entre le recueil des déclarations de loyer (en 2021) et sa prise en compte (en 2026) dans les bases d'imposition. "Ne pourrait-on pas compléter les travaux d'actualisation effectués en 2022, notamment avec l'aide de "GMBI" [outil "Gérer mes biens immobiliers" mis en place, fin 2022, par la direction générale des finances publiques]", interroge l'association qui réunit les grandes villes et leurs intercommunalités. Elle estime aussi que les modalités de mise à jour annuelle des grilles tarifaires s'appliquant aux valeurs locatives des locaux professionnels sont perfectibles, et devraient donc être revues.

L'enjeu des prochaines discussions n'est pas mince. Car, au-delà de la réussite de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, il s'agit de prévoir et roder les mécanismes qui s'appliqueront à la révision des bases locatives résidentielles, qui doit entrer en application en 2028.

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis