Réserve parlementaire : le Sénat adopte la proposition de loi Maurey

Le Sénat a voté jeudi 14 décembre pour le rétablissement de la réserve parlementaire. Une première étape avant celle de l'Assemblée nationale, beaucoup moins probable. L'initiative, partagée par près de 300 parlementaires des deux chambres, est donc encore loin d'aboutir à une loi, mais cette large adoption par les sénateurs de la proposition de loi organique "visant à rétablir la réserve parlementaire en faveur des communes et des associations" pose quelques jalons. Le texte porté par le sénateur de l'Eure Hervé Maurey (Union centriste) a recueilli 226 voix pour (issues de toutes les sensibilités, sauf du groupe écologiste) et seulement 42 contre.

"On a beaucoup fantasmé sur cette réserve parlementaire et elle fut supprimée sur la base de ces fantasmes. Or, elle a un intérêt réel, celui d'apporter un complément utile, surtout vers des petits projets non éligibles aux subventions en raison de leurs montants trop bas", a milité auprès de l'AFP le sénateur. Son texte propose le rétablissement de cette enveloppe, mais dans une version plus encadrée que l'ancien dispositif supprimé en 2017.

Les projets soutenus ne peuvent pas par exemple "présenter de caractère permanent, devraient permettre la mise en oeuvre d'une politique d'intérêt général, et être réalisés dans un délai de sept ans maximum". La lecture au Sénat est en outre venue préciser que le montant de la subvention ne pourra pas excéder la moitié du coût du projet, ni la somme de 20.000 euros. Le mécanisme sera ainsi "beaucoup plus encadré et codifié", assure le rapporteur centriste Vincent Capo-Canellas, qui s'est attaché à sécuriser la proposition de loi juridiquement. En revanche, alors que le texte initial prévoyait que la réserve parlementaire ne pourrait soutenir que des projets de communes de moins de 3.500 habitants, les sénateurs ont choisi d'élargir à l’ensemble des communes.

"Je ne vais pas vous donner de faux espoirs : le gouvernement n'a pas encore bougé suffisamment pour comprendre qu'on doive la recréer d'une façon ou d'une autre", a fait savoir le ministre des Outre-mer Philippe Vigier, mandaté pour représenter l'exécutif face aux sénateurs. Lui-même a reconnu avoir été opposé à la suppression de la réserve en 2017, alors qu'il était député, évoquant néanmoins les "quelques dérives" que le dispositif a pu entraîner dans le passé. "Cette réserve parlementaire, c'est l'emblème du clientélisme, c'est le bouc émissaire idéal", lui a rétorqué Olivier Paccaud, qui siège au groupe Les Républicains. "Mais cette réserve, elle était souple, efficace, devenue transparente et donc particulièrement utile", a-t-il lancé.

Après ce vote du Sénat, les défenseurs de cette "renaissance" entendent se battre pour voir leur texte inscrit début 2024 à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Mais l'issue des débats au Palais Bourbon paraît beaucoup moins certaine. La présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet, et une grande partie du camp présidentiel, sont en effet très hostiles à ce financement de proximité à la main des élus, qui a longtemps pu nourrir un soupçon de clientélisme dans l'opinion. "Je pense que c'est très sain de ne pas permettre aux parlementaires de donner des subventions de façon totalement discrétionnaire sur un territoire quel qu'il soit", a-t-elle encore rappelé cet automne.

 

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