Rendez-vous salarial : série de mesures en faveur "du pouvoir d'achat"... à défaut de dégel du point d'indice
Relance de PPCR en 2020, reconduction de la Gipa, rattrapage pour la filière sociale, extension à la territoriale de l'indemnité temporaire de mobilité, déploiement du Rifseep dans la territoriale, doublement du plafond de la prime d’intéressement collectif... Olivier Dussopt a fait valoir toute une série de mesures en faveur des agents publics ce 2 juillet lors du rendez-vous salarial annuel avec, pour les deux derniers points, des projets de décrets qui seront présentés le 10 juillet en CSFPT. Cela n'a pas suffi à satisfaire les organisations syndicales.
Le rendez-vous était attendu. Et pour cause. Il s'agissait du "rendez-vous salarial" annuel entre le ministre en charge de la fonction publique, les organisations syndicales de fonctionnaires et les représentants des employeurs publics.
En l'absence de dégel du point d'indice ou d'autre mesure générale relative aux rémunérations, il s'est principalement agi pour Olivier Dussopt d'annoncer ou rappeler divers "engagements pris par le gouvernement" en faveur du "pouvoir d'achat des agents publics ainsi que de leurs conditions de travail".
Du côté des rappels, il a naturellement été question de PPCR (parcours professionnels, carrières et rémunérations), avec la relance, promise pour 2020, de ce dispositif de revalorisation des grilles. Cela touchera en particulier les "nouveaux agents" et ceux qui "entrent dans une troisième partie de carrière", relève le ministère, rappelant qu'au terme de ce processus de revalorisations, "les agents bénéficieront d'un gain moyen annuel de 1.200 euros en catégorie A, 800 euros en catégorie B et 620 euros en catégorie C".
Le gouvernement met de même en avant la reconduction de la garantie individuelle de pouvoir d'achat (Gipa), qui vise à compenser pour chaque agent public le retard éventuel de la progression du point d’indice sur l’inflation. Avec en 2020, "à titre exceptionnel", une réévaluation de l'indemnité compensatrice de hausse de la CSG (comme cela avait été le cas cette année en fait).
Également évoqués, les engagements liés à l’accord du 30 novembre 2018 sur "l’égalité professionnelle dans la fonction publique". Et Olivier Dussopt d'y inclure la mesure de rattrapage dont bénéficieront en 2020 les agents de la filière sociale de l'État positionnés en catégorie A (assistants sociaux et conseillers techniques de service social) ainsi que, côté territoriale, les assistants socio-éducatifs et conseillers territoriaux socio-éducatifs.
Dans la liste aussi, l'extension à la fonction publique territoriale de l'indemnité temporaire de mobilité pour "renforcer l’attractivité des emplois publics dans les territoires rencontrant des difficultés de recrutement." Le dispositif devrait faire l’objet d’une concertation avec syndicats et employeurs "à la rentrée prochaine, pour une entrée en vigueur en 2020". Ou encore la revalorisation du remboursement des frais de repas pour les agents publics en formation ou en mission…
Enfin, Olivier Dussopt a mis l'accent sur la volonté de mieux reconnaître le "mérite individuel et collectif" des agents, que ceux-ci soient titulaires ou contractuels, renvoyant sur ce point au projet de loi transformation de la fonction publique.
À ce titre, le ministre a mentionné deux projets de décrets qui seront examinés par le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) le 10 juillet.
Le premier vise à assurer le déploiement du Rifseep dans la fonction publique territoriale, "notamment au bénéfice de l’ensemble de la filière technique dès 2020".
- Le rapport accompagnant le projet de décret, que Localtis a pu consulter, précise les choses en ces termes : "Sans remettre en cause le dispositif actuel pour les cadres d’emplois passés au Rifseep, cette évolution repose sur la définition (…) pour les cadres d’emplois non éligibles au Rifseep, d’une nouvelle homologie basée sur des corps de la FPE [fonction publique d'État] d’ores et déjà passés au Rifseep. Les cadres d’emplois concernés conserveront toutefois leur corps équivalent historique pour les autres primes et indemnités afin de garantir le maintien de certains avantages indemnitaires servis comme notamment ceux liés à des cycles de travail particuliers (travail le dimanche, travail de nuit, horaires décalés, astreintes, permanences…). Lorsqu’un de ces cadres d’emplois peut bénéficier du régime indemnitaire servi en deux parts sur le fondement du corps équivalent historique, l’assemblée délibérante pourra adapter les plafonds applicables à chacune des deux parts. Il en résulte que l’assemblée délibérante aura le choix entre le maintien du régime indemnitaire basé sur le nouveau corps homologue ou son adaptation en fonction des plafonds applicables au corps homologue historique."
Deux autres projets de décret devant être soumis au CSFPT entendent simplifier et valoriser les dispositifs d’intéressement collectifs, avec un doublement du plafond de la prime d’intéressement.
- Le rapport de présentation du projet de décret "modifiant le plafond annuel de la prime d’intéressement à la performance collective des services dans les collectivités territoriales et leurs établissements publics" constate qu'à ce jour, "le déploiement de la PIPCS est très limité". Alors, afin de "favoriser l’attractivité de ce dispositif", le texte vient relever le plafond de cette prime à 600 euros (contre 300 euros aujourd'hui). Le second texte porte sur "les modalités et les limites" de cette prime d’intéressement. Il vise ainsi à "permettre le versement de la PIPCS sur la base d’objectifs semestriels et non plus uniquement annuels" et à "supprimer l’obligation de passage en comité technique (CT) permettant de constater que les résultats fixés ont été atteints, préalablement au versement de la prime".
Les syndicats de fonctionnaires ont jugé mardi "manqué" ce rendez-vous salarial. Quatre d'entre eux (CGT, FO, FSU, Solidaires) ont quitté la réunion avant la fin, estimant qu'"aucune véritable revendication salariale" des agents n'avait été prise en compte, à commencer par le dégel du point d'indice.
Une bonne partie des mesures exposées par le ministre n'ont "rien à voir avec des mesures salariales", a estimé Jean-Marc Canon (CGT). La CFDT a évoqué, comme en 2018, un rendez-vous "loin d'être à la hauteur des attentes des agents", qui "enchaînent les mauvaises années" et des annonces "une nouvelle fois limitées". "Pas de... Pas de... Voilà donc la réponse du gouvernement aux légitimes revendications de mesures générales des agents", a déploré Solidaires, tandis que l'Unsa a estimé que "seules des pistes portant sur des mesures techniques illisibles et inéquitables ont été annoncées". Outre le gel du point d'indice, les syndicats dénoncent la "non-compensation" de la hausse de la CSG pour les fonctionnaires au-delà de 2020 et la réinstauration du "jour de carence".