Gouvernement - Remaniement : les entrants, les sortants et les changements de portefeuilles
Ce sera donc un remaniement limité. Promptement annoncé lundi soir (après l'heure de bouclage de notre édition…), au lendemain du deuxième tour des régionales et au terme d'une journée de va-et-vient de personnalités politique entre l'Elysée et Matignon, ce remaniement n'implique que deux sortants et trois entrants. Côté sortants, on a Xavier Darcos, écarté du gouvernement après sa défaite en Aquitaine, qui "sera prochainement appelé à d'autres responsabilités", tel que l'a indiqué l'Elysée. Ainsi que Martin Hirsch qui, comme il l'avait plusieurs fois laissé entendre, quitte volontairement l'équipe gouvernementale et présidera l'Agence du service civique. Côté entrants, c'est Marc-Philippe Daubresse qui vient en tant que ministre de la Jeunesse et des Solidarités actives reprendre le portefeuille laissé par Martin Hirsch, c'est Georges Tron dont l'arrivée permet de recréer un secrétariat d'Etat à la Fonction publique et c'est François Baroin qui atterrit à Bercy comme ministre du Budget. Du coup, son prédécesseur Eric Woerth passe du côté des Affaires sociales, emportant avec lui les dossiers fonction publique.
Nicolas Sarkozy fera sa première déclaration postélectorale ce mercredi 24 mars à l'issue du premier Conseil des ministres remanié. François Fillon s'est pour sa part exprimé dès mardi lors d'une réunion de députés UMP à l'Assemblée. Il a notamment indirectement évoqué à cette occasion un abandon de la taxe carbone, estimant que cette taxe devait être européenne "pour ne pas plomber la compétitivité" des entreprises françaises. Sur les autres sujets en revanche, "il ne faut pas arrêter les réformes", aurait souligné le Premier ministre, notant entre autres qu'il comptait bien "terminer la réforme des collectivités".
Solidarités actives et Jeunesse
"J'entends mettre en oeuvre sur le terrain les chantiers lancés par Martin Hirsch" et "ne rien infléchir du tout", a déclaré Marc-Philippe Daubresse, le nouveau ministre de la Jeunesse et des Solidarités actives, ce mardi lors de la passation de pouvoir avec Martin Hirsch, précédemment haut-commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté et haut-commissaire à la Jeunesse. "Mon objectif n'est pas de faire des lois mais de garantir leur application opérationnelle sur le terrain et l'efficience de la déclinaison territoriale des politiques", a insisté le nouveau ministre, évoquant notamment "le service public de l'orientation, l'emploi des jeunes, le service civique et la continuation du RSA et des actions prévues par la loi". Martin Hirsch a rappelé qu'il avait "travaillé pendant toute la période de création du RSA" avec Marc-Philippe Daubresse, celui-ci ayant en effet été le rapporteur à l'Assemblée nationale du projet de loi sur le RSA. Il a également salué la création d'un "ministère à part entière" grâce auquel la jeunesse n'est plus "un appendice aux Sports ou une sous-question de l'Education nationale".
Le matin même, le nouveau ministre avait cette fois estimé sur France Info que le dispositif du RSA "est très compliqué" et pourrait à ce titre être "simplifié" : "On peut trouver une procédure qui soit beaucoup moins lourde pour que, dans la relation entre les centres communaux d'action sociale, les départements, les caisses d'allocations familiales et Pôle emploi - car vous avez ces quatre acteurs en même temps ce qui complexifie la chose -, on puisse avoir une chose beaucoup plus lisible sur le qui fait quoi", a-t-il expliqué. Sur les mesures en faveur de l'emploi des jeunes, Marc-Philippe Daubresse a estimé qu'il fallait "qu'on déploie beaucoup plus vite sur le terrain pour les personnes les plus touchées l'ensemble du dispositif".
De son côté, Martin Hirsch a adressé un texte à la presse principalement destiné à réexpliquer le sens de son action au gouvernement (voir document ci-contre). Il va maintenant présider l'Agence du service civique dont il rappelle qu'elle devrait être créée "dans le courant du mois de mai" et dont il va assurer "dès maintenant la préfiguration".
Marc-Philippe Daubresse, 56 ans, a été membre du gouvernement Raffarin, en tant que secrétaire d'Etat au Logement (2004) puis ministre délégué au Logement et à la Ville (2004-2005) auprès de Jean-Louis Borloo. Une période pendant laquelle il s'était attiré la reconnaissance des professionnels du secteur. Sa nomination au gouvernement est une surprise car un arrêté paru dimanche au JO venait de le reconduire à la présidence du conseil d'administration de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) qu'il occupait depuis janvier 2009 (voir ci-contre notre article "Anah : un nouveau conseil d'administration, au programme de travail chargé"). Député-maire de Lambersart dans le Nord, il est également vice-président de Lille Métropole.
De Bercy à la rue de Grenelle...
François Baroin a fait mardi son arrivée à Bercy en tant que ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l'Etat. Il a d'emblée indiqué, lors du passage de témoin, que "tout ce qui a été entrepris" par son prédécesseur Eric Woerth serait "poursuivi", insistant sur la nécessité d'"une stricte maîtrise des dépenses publiques". Député-maire UMP de Troyes, François Baroin, 44 ans, a été ministre de l'Outre-Mer (2005-2007) puis brièvement de l'Intérieur (2007) de Jacques Chirac. A la veille du deuxième tour des régionales, l'élu de l'Aube avait estimé que l'exécutif devait se donner une feuille de route très sociale en ces temps de crise : "retraites, emploi, et logement".
Eric Woerth, lui, prend ses quartiers rue de Grenelle. Son nom reste pour l'heure surtout attaché à la RGPP, à la volonté de mieux encadrer les dépenses publiques, à la fusion entre d'énormes administrations telles que la direction des impôts et le Trésor public… et au principe de non-renouvellement d'un fonctionnaire sur deux. "Le ministre du Budget a étouffé le ministre de la Fonction publique", commente un syndicaliste, reconnaissant toutefois qu'Eric Woerth a fait signer à une majorité de syndicats deux accords positifs, sur le dialogue social et la santé au travail.
Son nouveau portefeuille du Travail, de la Solidarité et de la Fonction publique devrait l'amener à s'attaquer principalement à la réforme des retraites et lui permettre, sur ce dossier, d'englober à la fois les retraites du privé et celles du secteur public. Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, a dit espérer que les syndicats auront bien en face d'eux "un ministre et non des ordinateurs de Bercy comme interlocuteur".
Eric Woerth sera en tout cas secondé par l'un des trois nouveaux venus, Georges Tron, nommé lundi secrétaire d'Etat à la Fonction publique. Depuis le départ d'André Santini du gouvernement en juin dernier, aucun membre du gouvernement ne s'occupait à plein temps de la fonction publique, une première depuis 1958. Plusieurs syndicats de fonctionnaires se sont d'ailleurs déclarés mardi satisfaits de voir réapparaître un secrétariat d'Etat.
Député-maire de Draveil dans l'Essonne, on avait entendu parler de Georges Tron en tant que parlementaire lorsque celui-ci suggérait dans un rapport, dès 2005, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux… En tant qu'élu local dans l'Essonne, il s'était cette fois fait entendre, toujours en 2005, lors des émeutes de novembre, pour la suspension "immédiate" dans sa commune des aides sociales municipales aux familles des fauteurs de troubles condamnés par la justice.
On notera enfin qu'Eric Woerth garde trois autres secrétaires d'Etat déjà en place : Nadine Morano, toujours chargée de la famille et de la solidarité, Nora Berra chargée des aînés et Fadela Amara, qui connaîtra son quatrième tandem ministériel en tant que secrétaire d'Etat chargée de la politique de la ville.
Claire Mallet