Réforme de l'autorisation environnementale : les modalités de la procédure accélérée se précisent

Pour faciliter les implantations industrielles et le déploiement des énergies renouvelables, la loi Industrie verte vise entre autres l’accélération de l’instruction des autorisations environnementales à travers la parallélisation de la phase d'examen et de consultation du public. La nouvelle procédure, sur laquelle une instruction - rendue publique ce 8 novembre - revient en détail, concerne toutes les demandes d’autorisation environnementale déposées à compter du 22 octobre 2024.

La refonte de la procédure d’autorisation environnementale nécessaire à l’application de la loi Industrie verte du 23 octobre 2023 pour accélérer l'implantation de nouvelles usines et le déploiement des énergies renouvelables est entrée en vigueur le 22 octobre. Le décret d’application (n°2024-742) est paru en amont début juillet (voir notre article du 8 juillet 2024). Les services du ministère de la Transition écologique sont donc à pied d’oeuvre pour accompagner la mise en œuvre de cette réforme. Des actions de sensibilisation ont été engagées auprès des porteurs de projets (industriels, agriculteurs, collectivités, gestionnaires d’infrastructure de transport, etc.) et de leurs bureaux d’études ainsi que des commissaires enquêteurs. Une plaquette d’information est d’ores et déjà disponible et Agnès Pannier-Runacher vient de co-signer avec le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, une instruction - rendue publique ce 8 novembre - pour fournir le cadre d’application et les modalités de mise en œuvre de la procédure d’autorisation environnementale révisée.

Un mot d’ordre : accélérer

Premier objectif affiché : réduire les délais d’implantation des installations à travers la parallélisation de la phase d'examen et de consultation du public. La nouvelle procédure dite de "consultation parallélisée" est désormais de droit commun pour tous les projets relevant du champ de l’autorisation environnementale : installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l’eau (Iota), installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), travaux miniers, autorisation supplétive. L’instruction du dossier par les services de l’État, les consultations obligatoires des différents organismes et instances compétents, les consultations des conseils municipaux et autres collectivités intéressées et la participation du public seront désormais "menées de concert", dès lors que le dossier est complet et régulier. À la clef, un gain de trois mois sur la procédure.

Présentée comme un "cadre favorable à une réindustrialisation respectueuse de l’environnement", la réforme est dans le viseur des associations Notre affaire à tous et Zero Waste France. Les deux ONG ont déposé un recours gracieux demandant l’annulation des trois décrets d’application de la loi Industrie verte, qui représentent selon elles un "détricotage massif et systématique du droit de l'environnement industriel" et par conséquent une augmentation des risques de catastrophes industrielles (voir notre article du 10 septembre 2024). 

Une procédure hybride principalement dématérialisée

L’autre axe sans doute plus consensuel de la réforme est de "consolider" la participation du public. La nouvelle procédure - qui reprend pour partie les conditions de la participation du public par voie électronique (PPVE) mais également de l’enquête publique - permet au public de participer pendant trois mois, sous l’égide d’un commissaire enquêteur (ou si nécessaire une commission d’enquête), dès le début de la procédure, "alors qu’il n’était auparavant consulté que pendant trente jours, en fin de procédure, après les retours des services de l’État ou des collectivités", fait notamment valoir le ministère de la Transition écologique. 

Cette participation sera majoritairement dématérialisée, mais deux réunions publiques - une d’ouverture et une de clôture - d’échanges avec le porteur de projet doivent obligatoirement être organisées en "présentiel". Une étroite collaboration du pétitionnaire est ainsi recommandée avec le commissaire enquêteur en appui à l’organisation de cette consultation. 

Soigner la qualité des dossiers… 

"La réforme de procédure ne doit pas être le seul axe d’action", souligne par ailleurs l’instruction. Le ministère est en effet attaché à l’amélioration de la qualité des dossiers déposés, qui est une source de gain de temps pour l’autorisation des projets. "Des dossiers de bonne qualité permettent une rapidité d’instruction et évitent de solliciter plusieurs fois les services de l’État au fil de compléments qui seraient nécessaires", explique l'instruction. 

Une expérimentation sera prochainement lancée en ce sens afin de permettre l’évaluation des dossiers de demande sur le fondement de critères qualitatifs (existence d’échanges préparatoires, complétude et régularité du dossier…). Seront pour l'heure ciblés certains types d’installations (éoliennes, installations de méthanisation, carrières, entrepôts couverts, installations de tri, de transfert et de regroupement de déchets dangereux).

… en approfondissant la phase amont

Le ministère table aussi sur un effort d’anticipation, par les bureaux d’études et les porteurs de projet, des demandes d’autorisation avec une forte incitation à organiser des échanges préparatoires avec l’administration. Cette phase amont est donc "vivement recommandée" pour apprécier les contours et enjeux du projet, identifier les différentes autorisations nécessaires et les modalités de participation du public. Le porteur de projet peut d'ailleurs demander aux services de l’État un cadrage préalable pour les projets soumis à évaluation environnementale.

"Il importe que les dossiers soient proportionnés aux enjeux", guide également l’instruction. "On ne peut se satisfaire que des dossiers pour des installations, ouvrages, travaux ou aménagements relativement simples contiennent plusieurs centaines, et parfois des milliers de pages." Pour éviter "l’embolie des services", l'instruction appelle ainsi à "renforcer le caractère synthétique des pièces déposées, notamment pour les sujets simples". 

Autre piste d’efficacité : dès le dépôt du dossier, la vérification de la complétude et de la régularité de la demande d’autorisation environnementale "doit être menée dans un délai raisonnable". Avec deux issues possibles : accélérer l’instruction des dossiers complets et réguliers et faire retravailler les autres. "Dès lors qu’ils sont complets et réguliers, les dossiers bénéficient d’un raccourcissement des délais permis par la parallélisation des phases et par l’absence de suspension de délais". En conséquence, un pétitionnaire porteur d’un dossier demeurant incomplet ou irrégulier, malgré la demande de compléments formulée par le service 'coordonnateur' pilotant l’instruction, sera invité à retirer sa demande et à déposer une nouvelle demande lorsque les conditions de complétude et de régularité seront remplies. La phase d’examen et de consultation ne débute qu’une fois que le dossier est déclaré complet et régulier par le préfet. 

Si le projet ne permet pas de garantir le respect des personnes ou de l’environnement, la demande d’autorisation sera rejetée, durant la phase d’examen ou de consultation, ou refusée, durant la phase de décision, qui demeure quant à elle inchangée. 

Référence : instruction du 28 octobre 2024 relative à la procédure d’autorisation environnementale, ministère de l’Intérieur, ministère de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques, BO du 8 novembre 2024. 
 

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