Réforme de la fiscalité locale : l'exécutif annonce "un geste" pour les communes rurales
Dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale, le gouvernement devrait choyer les communes rurales. 10.000 d'entre elles pourraient bénéficier d'un surplus de recettes de taxe foncière. C'est ce qu'ont détaillé aux Échos les ministres Gérald Darmanin et Jacqueline Gourault. Le gouvernement continue de recevoir les associations d'élus locaux. Ce mercredi matin, c'était au tour de Régions de France, sachant que les régions sont concernées par la réforme sous l'angle des frais de gestion de la taxe d'habitation.
Le projet, encore provisoire, de réforme de la fiscalité locale que le gouvernement a présenté mardi 18 juin aux élus locaux (voir ci-dessous notre article du 18 juin) ne malmène pas les communes rurales. Bien au contraire. Dans un entretien au quotidien Les Échos publié mardi soir, le ministre de l'Action et des Comptes publics et sa collègue en charge de la cohésion des territoires annoncent "un geste" pour 10.000 communes rurales.
On le sait, la taxe départementale de foncier bâti doit être transférée aux communes et ainsi compenser la suppression de la taxe d'habitation, laquelle sera totalement supprimée en 2023. Mais le montant des recettes de la nouvelle ressource correspondra exactement à celui de la taxe d'habitation pour seulement "quelques centaines de communes", sur un total de 35.000 communes. Globalement, environ 10.000 communes seront "sous-compensées", quand 24.000 le seront à l'excès. Parmi les communes "légèrement surcompensées", 10.000 seront des communes rurales. Pour elles, le gouvernement "propose de leur laisser ce surplus de taxe foncière, dès lors qu'il n'excède pas 15.000 euros, sous forme de recettes fiscales supplémentaires."
Réévaluation des valeurs locatives
Les simulations réalisées pour le rapport Richard-Bur remis en mai 2018 ont révélé que, dans le cas d'un transfert de la taxe foncière des départements et des intercommunalités vers les communes (soit l'hypothèse de travail de la mission), les communes "surcompensées" - autrement dit gagnantes sur le long terme - seraient "dans leur très grande majorité des communes rurales faiblement peuplées".
Toutes les communes "surcompensées" ne seront pas exemptées de mettre au pot pour que les communes "sous-compensées" s'y retrouvent. Loin de là. Selon Les Échos, 14.000 communes verseront leurs "excédents" à un "fonds de péréquation". Le dispositif ne s'apparentera pas à un fonds de garantie, promet Bercy. Le mécanisme "intégrera en amont les corrections".
Par ailleurs, l'État injectera un milliard d'euros au profit des communes. Il s'agit de la somme nécessaire pour annuler l'écart entre les recettes départementales de taxe foncière et le produit de la taxe d'habitation des communes et financer le coup de pouce en faveur des communes rurales.
Dans l'entretien accordé au quotidien économique, les ministres apportent par ailleurs de petites précisions sur le scénario de réforme. On notera par exemple que les communes concernées continueront à fixer le taux de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et que les intercommunalités conserveront les recettes de taxe foncière dont elles bénéficient aujourd'hui. En outre, ils confirment la volonté de l'exécutif de réviser les valeurs locatives des locaux d'habitation - Gérald Darmanin évoque "la réévaluation des valeurs locatives de la taxe foncière". "Nous pourrions imaginer, indique le ministre, que le prochain projet de loi de finances autorise Bercy à travailler sur ce point en 2021 en collectant les données locatives des habitants et qu'à partir de 2022, la réforme puisse être mise en place, sur une durée de 5 à 10 ans."
Frais de gestion de la taxe d'habitation
Ce mercredi, le gouvernement a poursuivi la concertation sur la réforme de la fiscalité locale en recevant une délégation de Régions de France. Un rendez-vous qui était l'occasion pour les ministres de préciser de quelle manière ils entendent compenser les frais de gestion de la taxe d'habitation, qui sont affectés aux régions depuis 2014 pour le financement de la formation professionnelle. Aujourd'hui, ils prônent le remplacement de cette ressource dynamique (de 272 millions d'euros en 2017) par une dotation. Un scénario qui ne convient pas à Régions de France, puisqu'on le sait, les dotations sont rigoureusement gelées. L'association, que Localtis a contactée, estime que rien n'est arrêté. "C'est une première proposition du gouvernement. Ce dernier semble assez ouvert et attentif", réagit-elle. En ne perdant pas l'espoir d'être entendue quant à sa demande de compensation sous la forme d'une fraction supplémentaire de TVA, une piste qui figurait dans le rapport Richard-Bur.
On notera que les élus régionaux ont profité du rendez-vous à Bercy pour pousser l'une de leurs propositions phares en matière fiscale : l'octroi aux régions d'une part de contribution climat-énergie pour le financement des politiques de mobilité et la transition énergétique. "C'est un sujet de moyen-long terme qui est lié à l'acte 3 de la décentralisation à venir", estime un proche du président Hervé Morin.
Ce jeudi, ce sera au tour des responsables de l'Association des maires de France d'être reçus à Bercy.