Qualité de l’air intérieur des établissements publics : une série de textes réglementaires redonne du souffle au dispositif

Sous l’effet de la crise sanitaire et de divers retours d’expérience, la surveillance de la qualité de l’air dans les établissements publics accueillant des populations sensibles, comme les crèches et les écoles, a engagé sa mue. A compter de 2023, un nouveau dispositif prévoit d’en accroître la périodicité, notamment en l’adaptant aux étapes clés du cycle de vie des bâtiments. Un guide du Cerema est annoncé de façon à accompagner les collectivités territoriales dans l’appropriation de ce corpus révisé.

Le quatrième plan national Santé Environnement, élaboré à la suite de la crise sanitaire, augurait une évolution de la surveillance de la qualité de l'air intérieur (QAI) dans certains établissements recevant du public (ERP), comme les écoles et les crèches. Le corpus réglementaire fixant un nouveau dispositif, à compter de 2023, constitué de deux décrets (n° 2022-1689 et n° 2022-1690) accompagnés de trois arrêtés, est paru le 29 décembre. Divers retours d’expérience sur cette surveillance ont notamment fait émerger l’inadaptation de la périodicité de sept ans des mesures des polluants réglementaires ou encore le défaut de prise en compte des étapes clé de la vie du bâtiment pouvant impacter la QAI, telles que les constructions et aménagements ou rénovations majeurs (revêtements de sols ou fenêtres, par exemple). 

Évaluation annuelle, autodiagnostics et plan d'actions

Le nouveau dispositif repose en particulier sur l'évaluation annuelle des moyens d'aération des bâtiments, incluant notamment la mesure à lecture directe de la concentration du dioxyde de carbone comme traceur du renouvellement de l’air intérieur (au plus tard en 2024 pour la première), et dont les modalités sont détaillées par arrêté. On peut d’ailleurs y voir une conséquence directe de la crise sanitaire. Elle sera effectuée par les services techniques de la collectivité, des gestionnaires du bâtiment ou tout autre prestataire technique. Autre apport du texte, la réalisation d’un autodiagnostic régulier de la QAI - a minima tous les quatre ans - permet un focus sur les sources d'émissions de substances polluantes au regard notamment "des matériaux et de l'équipement du site ainsi que des activités qui y sont exercées", de "l'entretien des systèmes de ventilation et des moyens d'aération" ou encore "des travaux et des activités de nettoyage".
Une campagne de mesures des polluants réglementaires (formaldéhyde, benzène, CO2,) sera par ailleurs réalisée par un organisme accrédité à "chaque étape clé de la vie du bâtiment" pouvant impacter la QAI, et ce dans un délai de sept mois. Des ajustements ont toutefois été apportés sur ce point depuis la consultation publique sur ces textes. Ainsi, afin d’éviter que les petits établissements se retrouvent à faire des mesures réglementaires chaque année, les campagnes de mesures ne seront rendues obligatoires qu’à partir du moment où la surface du bâtiment concernée par les petits et moyens travaux qualifiés d’étapes clés dépasse un certain seuil. Conformément à la demande des représentants des collectivités territoriales, ce seuil tient compte de la taille de l’établissement et pourra aller de 25% à 75% pour les plus petits ERP. Lorsque le résultat des mesures effectuées dépasse les valeurs fixées par décret (n° 2022-1690), le préfet du département du lieu d'implantation de l'établissement en sera informé. 

Enfin, un plan d’actions, prenant en compte l’évaluation annuelle des moyens d’aération, l’autodiagnostic et/ou la campagne de mesures est par ailleurs prévu. Il est réalisé au plus tard "dans les quatre ans suivant l’entrée en vigueur du décret" (n° 2022-1689), puis  régulièrement actualisé pour proposer des  "actions correctives" à mettre en œuvre pour améliorer la QAI. L’objectif est "de laisser assez de temps aux collectivités pour qu’elles puissent s’organiser au mieux", relève le ministère de la Transition écologique dans le document de synthèse de la consultation. 

Pas d’élargissement avant 2025

Notons que sont désormais exclus du dispositif les locaux à pollution spécifique, à savoir les établissements d'activités physiques et sportives couverts dans lesquels sont pratiquées des activités aquatiques, de baignade ou de natation, puisque compris par le code du travail.
Le nouveau dispositif a vocation à s’appliquer dès 2023 aux établissements déjà concernés, à savoir crèches et écoles, collèges, lycées et accueils de loisirs. Il est en revanche prévu un report d’application à 2025 à d’autres ERP (structures sociales et médico-sociales, établissements pénitentiaires pour mineurs, etc.), "pour permettre un temps d’adaptation aux collectivités et leur proposer des outils adéquats", à commencer par un guide d’accompagnement réalisé par le Cerema. Des recommandations de mesures supplémentaires pourraient y être proposées portant sur d’autres polluants. 

En dernier lieu, le corpus intègre la révision par l’Anses de la valeur-guide pour l’air intérieur du formaldéhyde ainsi que les recommandations du Haut Conseil pour la santé publique (HSCP) associées. Les valeurs repères d’aide à la gestion de concentration du dioxyde de carbone ont également été mises à jour par arrêté afin de prendre en compte le récent avis du HCSP. L'arrêté modifiant l’arrêté du 1er juin 2016 relatif aux modalités de présentation du rapport d’évaluation des moyens d’aération introduit aussi plus de souplesse dans la forme du rapport, et ce à la demande des collectivités, notamment en permettant de faire l’usage de tableaux synthétiques pour la présentation de l’évaluation. 

 
Références : décret n° 2022-1689 du 27 décembre 2022 modifiant le code de l'environnement en matière de surveillance de la qualité de l'air intérieur ; décret n° 2022-1690 du 27 décembre 2022 modifiant le décret n° 2012-14 du 5 janvier 2012 relatif à l'évaluation des moyens d'aération et à la mesure des polluants effectuées au titre de la surveillance de la qualité de l'air intérieur de certains établissements recevant du public ; arrêté du 27 décembre 2022 modifiant l'arrêté du 1er juin 2016 relatif aux modalités de surveillance de la qualité de l'air intérieur dans certains établissements recevant du public ; arrêté du 27 décembre 2022 modifiant l'arrêté du 1er juin 2016 relatif aux modalités de présentation du rapport d'évaluation des moyens d’aération ; arrêté du 27 décembre 2022 fixant les conditions de réalisation de la mesure à lecture directe de la concentration en dioxyde de carbone dans l'air intérieur au titre de l'évaluation annuelle des moyens d’aération, JO du 29 décembre 2022, textes n° 34, 35, 46, 59 et 60.