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Protection de la biodiversité : des ONG déposent un recours contre l'État

En plein congrès de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à Marseille, deux ONG, Notre affaire à tous et Pollinis, ont lancé ce 9 septembre un recours préalable contre l'État pour "carence fautive" afin de faire reconnaître le "manquement" de la France à ses engagements de protection de la nature, notamment en raison des "défaillances" du processus d'autorisation des pesticides de synthèse qui participent à la destruction de la biodiversité.
"Par son ampleur et sa visée, ce recours constitue une première mondiale, estime Cécilia Rinaudo coordinatrice de Notre affaire à tous, association de juristes à l’origine de l’Affaire du siècle, l’action en justice pour le climat. Les récentes actions pour le climat ayant abouti à de nombreux succès, nous avons décidé cette fois de saisir les tribunaux pour lancer la première action en justice citoyenne dans le monde pour la biodiversité. Il est temps que l’État français soit tenu responsable de l’effondrement du vivant et respecte ses engagements."
"Malgré tous les discours, et au mépris des lois et des conventions nationales, européennes et internationales, l'État français a failli à mettre en place un système d'homologation des pesticides réellement protecteur des pollinisateurs et de la faune en général, a souligné Nicolas Laarman, délégué général de Pollinis, association qui milite pour la protection des abeilles. Les chiffres de l’effondrement en cours sont effroyables. Ce déclin généralisé de la biodiversité aura des conséquences dramatiques sur les équilibres du vivant et menace l’avenir des prochaines générations."
En cas de réponse non satisfaisante de l'État dans les deux mois, les requérants prévoient de se tourner vers la justice administrative. Une procédure identique à celle lancée fin 2018 sur le climat par Notre affaire à tous et trois autres ONG (Greenpeace, Oxfam, fondation Nicolas-Hulot) dans "l'Affaire du siècle", qui a reçu le soutien de plus de 2,3 millions de citoyens. Dans cette affaire, le tribunal de Paris a jugé en février dernier que l'État était "responsable" de manquements dans la lutte contre le réchauffement. Il avait cependant ordonné un délai pour étudier l'opportunité de réclamer des mesures supplémentaires à l'État. Une nouvelle audience sur ce point est prévue le 30 septembre, après la décision en juillet du Conseil d'État de donner neuf mois au gouvernement pour en faire plus pour le climat.
Sur le fond, la nouvelle affaire "Justice pour le vivant" a des bases juridiques différentes. La biodiversité ne fait en effet pas l'objet d'un objectif global chiffré, contrairement à la lutte contre le réchauffement basé sur un engagement de la France à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% d'ici 2030. Les ONG ont donc décidé de s'appuyer sur les pesticides de synthèse.
Depuis le Grenelle de l'environnement fin 2007, qui avait fixé un objectif de réduction de 50% de leur usage en dix ans, les plans successifs ont échoué. La "sortie du glyphosate" promise par Emmanuel Macron ne s'est pas non plus concrétisée et le gouvernement a permis la réintroduction temporaire des insecticides néonicotinoïdes, qualifiés de "tueurs d'abeilles", pour la culture de la betterave. Le président s'est toutefois engagé, à l'ouverture du congrès de l'UICN ce 3 septembre, à porter une "initiative forte" de sortie "accélérée" des pesticides lors de la présidence française de l'UE en 2022.

 

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