Social - Prime d'activité : la prévision de 60.000 agriculteurs déjà dépassée
Faut-il y voir un succès, comme les ministres Stéphane Le Foll (Agriculture) et Marisol Touraine (Affaires sociales) ? Ou le signe de la crise que traversent bon nombre d'agriculteurs ? Toujours est-il que 60.000 agriculteurs perçoivent la toute nouvelle prime d'activité, trois mois seulement après son lancement. Les prévisions initiales sont donc déjà dépassées. A titre de comparaison, 21.000 bénéficiaires du RSA activité (que la prime remplace) étaient enregistrés fin 2015 par la Mutualité sociale agricole (MSA), chargée d'enregistrer les demandes et de verser les primes aux agriculteurs. "Cette situation exceptionnelle ne nous permet pas de gérer tous les dossiers dans les délais habituels", indique d'ailleurs la MSA, qui dit devoir faire face à 118.000 demandes !
La prime d'activité a été créée par la loi relative au dialogue social et à l'emploi du 17 août 2015. Depuis le 1er janvier 2016, elle est venue remplacer le RSA activité et la prime pour l'emploi, dans le but d'offrir un complément de revenu aux personnes qui travaillent mais qui ont des ressources modestes. Tous secteurs confondus, depuis le début de l'année, plus de 2,3 millions de foyers, représentant plus de 3,8 millions de personnes (dont près de 400.000 jeunes), en ont bénéficié, selon les chiffres communiqués par Marisol Touraine en conseil des ministres, le 20 avril. Une progression beaucoup plus rapide que prévu au point que les budgets programmés ne pourront pas répondre à la demande (seuls 2 millions de bénéficiaires ont été budgétés cette année, pour un montant de 4 milliards d'euros).
186 euros par mois en moyenne
Dans le secteur agricole, la prime concerne aussi bien les salariés que les exploitants sous certaines conditions (leur bénéfice ne doit pas excéder 16.439 euros). Le coup de pouce s'elève en moyenne à 186 euros par mois : 213 pour les non-salariés et 174 pour les salariés. Pour les deux ministres, il s'agit d'un "franc succès". "Face à la crise agricole, c'est un atout supplémentaire pour aider les exploitants et salariés agricoles en difficulté", se félicitent-ils, dans un communiqué du 21 avril. Cette satisfaction affichée est cependant en décalage avec la revendication première des agriculteurs : ils demandent avant tout de pouvoir vivre du produit de leur travail et non de remplir des formulaires. Or, passée l'attention autour du Salon de l'agriculture, le malaise est toujours aussi profond. 14% des agriculteurs envisageraient de cesser leur activité dans les douze mois, selon un sondage Ifop réalisé début mars par la FNSEA, dévoilé le 20 avril par La France agricole. Pour 53% d'entre eux, la situation financière s'est dégradée. Seuls 3% ont ressenti une amélioration. Déjà, l'emploi agricole (y compris l'agroalimentaire) a chuté de 20% entre 2000 et 2013, d'après les chiffres du ministère de l'Agriculture. En 2014, la dette des exploitations s'élevait en moyenne à 186.600 euros. Leurs revenus eux ont chuté de 21% en un an.