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Prévention des risques naturels majeurs : comment utiliser les crédits du fonds Barnier

Accompagnée d'un guide, une note technique des ministères de la Transition écologique, de l'Economie et de l'Intérieur mise en ligne ce 2 avril récapitule les mesures finançables par le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) dit fonds Barnier, ainsi que leurs conditions d'éligibilité.

Les ministères de la Transition écologique, de l'Economie et de l'Intérieur ont mis en ligne ce 2 avril une note technique accompagnée d'un guide sur les règles d'utilisation du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) dit Fonds Barnier, créé par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement. A l'origine destiné à financer les indemnités d’expropriation de biens exposés à un risque naturel majeur, cet outil a été progressivement élargi, au titre de la prévention des risques, à d’autres catégories de dépenses pour constituer aujourd'hui la principale source de financement de la politique nationale de prévention des risques naturels, rappelle la note. Le guide qui lui est joint détaille les mesures finançables par le fonds et leurs conditions d'éligibilité ainsi que les modalités d'instruction et de gestion des crédits par les services déconcentrés.

Expropriation : une solution à utiliser "en dernier recours"

Les bénéficiaires potentiels du fonds sont de plusieurs types - Etat, collectivités territoriales, particuliers, entreprises, etc. Tous les cas de mobilisation du fonds sont décrits dans le guide, à commencer par l'expropriation de biens exposés à un risque naturel majeur. Il s'agit de permettre à des populations résidant dans des zones particulièrement exposées de se réinstaller en dehors de ces zones à risques et ainsi d'"assurer la mise en sécurité des sites libérés d'une occupation humaine incompatible avec l'existence d'un risque naturel", rappelle le guide. Les biens éligibles sont ceux exposés à des mouvements ou affaissements de terrain des avalanches, des crues torrentielles ou à montée rapide et des submersions marines. En sont exclus en revanche les risques résultant de l'exploitation d'une mine.
Si l'Etat, la commune ou le groupement de communes sont les trois autorités pouvant procéder à une expropriation, l'expropriation de biens par une commune ou un groupement est la "procédure à privilégier", celle par l'Etat devant rester "exceptionnelle", souligne le guide. Le taux de financement maximum par le fonds est de 100% des dépenses. L’indemnité d'expropriation est calculée en fonction de la valeur vénale du bien estimé par le service chargé des domaines "sans tenir compte de l’existence du risque" et éventuellement d’une indemnité forfaitaire correspondant aux droits de mutation, frais de notaire, etc. que devrait supporter le vendeur pour reconstituer en nature son patrimoine. Le guide rappelle aussi que la délivrance d’autorisations d’urbanisme "susceptibles d’augmenter la valeur du bien à compter de la publication de l’arrêté d’ouverture de l’enquête publique préalable à l’expropriation" est interdite.
L'expropriation étant un mode d'acquisition forcée, "il est conseillé d'utiliser cette solution en dernier recours dans des situations de blocage ou de refus, en l'absence d'accord sur l'estimation de la valeur des biens ou pour des biens non assurés", précise le guide qui souligne que "l'acquisition amiable constitue la solution à privilégier puisqu'elle permet une plus grande réactivité". C'est la loi du 30 juillet 2003 qui a introduit la possibilité de recourir au fonds Barnier pour financer l'acquisition amiable de biens éligibles, du fait de leur situation et des risques encourus, à la procédure d'expropriation. Cette même loi du 30 juillet 2003 a aussi mis en place un dispositif de financement d'acquisitions amiables de biens situés dans des zones de risques importants déjà endommagés à plus de 50% par une catastrophe naturelle et qui pourraient subir à nouveau des dégâts s'ils étaient reconstruits sur place, rappelle le guide. Le préalable est l'existence d'un arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. "Ce financement est destiné à venir en complément des indemnités perçues au titre de la garantie d'assurance contre les catastrophes naturelles pour couvrir le surcoût que peut représenter un déménagement ou un transfert total d'activités en dehors de la zone sinistrée", explique le guide qui précise que les terrains acquis par cette procédure doivent être rendus inconstructibles.

Etudes, travaux ou équipements de prévention ou de protection des collectivités territoriales

Les crédits du fonds Barnier peuvent également servir à financer les dépenses d'évacuation temporaire et de relogement ("Évac") des personnes exposées à un risque naturel grave menaçant leur vie. "Il s'agit d'une mesure temporaire qui peut être mobilisée dans l'attente de la mise en œuvre d'une solution durable pour remédier au risque (acquisition du bien, travaux…)", relève le guide qui précise que seuls les loyers des logements où sont relogées les personnes évacuées peuvent être remboursés via le fonds.
Les études, travaux ou équipements de prévention ou de protection des collectivités territoriales (ETECT) sont aussi éligibles au fonds Barnier. "Cette mesure qui bénéficie aux collectivités territoriales a pour vocation première d'améliorer la sécurité des personnes face aux risques naturels et de réduire les dommages aux biens assurés", rappelle le guide. Elle cible les communes couvertes par un plan de protection des risques naturels (PPRN). Lorsque ce dernier est approuvé, le fonds peut financer 50% des études, 50% des travaux ou équipements de prévention et 40% des travaux ou équipements de protection. Lorsque le PPRN est prescrit, sont éligibles au fonds 50% des études, 40% des travaux ou équipements de prévention et 25% des travaux ou équipements de protection. Le guide donne des exemples de projets pouvant bénéficier des crédits du fonds : ouvrages de gestion des écoulements ou de correction torrentiels, mise à disposition de batardeaux pour équiper des bâtiments en cas de crue, création d'espaces refuges, systèmes d'endiguement… Par contre, les travaux de prévention et de protection pour les infrastructures et les réseaux ne sont pas éligibles à des subventions du fonds.
Le fonds Barnier peut également être mobilisé pour les opérations de reconnaissance et les travaux de comblement ou de traitement des cavités souterraines et des marnières, à l’exception des cavités liées à l'exploitation d’une mine. Pour les travaux de traitement ou de comblement, deux conditions d'éligibilité sont requises : une menace grave pour les vies humaines et un traitement moins coûteux que l'acquisition du bien. Le taux de financement de ces opérations peut aller jusqu'à 30%.

Mesures pour l'outre-mer

Le fonds peut aussi intervenir pour les études et travaux de réduction de la vulnérabilité imposés par un plan de prévention des risques naturels approuvé et ceux entrant dans le cadre d'un programme d'action de prévention des inondations (Papi). Aux Antilles, il peut également financer les études et travaux  de prévention du risque sismique pour les bâtiments, équipements et installations nécessaires au fonctionnement des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), les travaux de confortement parasismiques des HLM, les études  et travaux de prévention du risque sismique pour les immeubles domaniaux utiles à la gestion de crise. Dans les départements et régions d'outre-mer ainsi qu'à Saint-Martin, il est également mobilisable pour la démolition des locaux à usage d'habitation édifiés sans droit ni titre dans une zone exposée à un risque naturel prévisible et pour l'attribution d'une aide aux occupants. Le fonds Barnier peut aussi financer les études et travaux de mise en conformité des digues domaniales de protection contre les crues et submersions marines. "Cette mesure vise à financer uniquement la mise en conformité des systèmes d'endiguement domaniaux existants", précise le guide, qui ajoute que les opérations inscrites dans une démarche globale de prévention (PAPI, plan submersion rapide, plan grand fleuve) seront "financées en priorité". Les dépenses afférentes à la préparation et à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPR) qui incombent à l'Etat sont également éligibles au fonds Barnier. Celles afférentes aux actions d'information préventive sur les risques majeurs le sont aussi, de même que l'élaboration et la mise à jour des cartes des surfaces inondables et des cartes des risques d'inondation et la campagne d'information sur la garantie catastrophes naturelles.
Enfin, pour définir et préciser les modalités d'utilisation des biens acquis via le fonds Barnier, le guide détaille leur "qualification juridique, de laquelle découleront leurs règles d'application".