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Sécurité - Prévention de la radicalisation : une lutte complexe

Un jour avant les attentats du 13 novembre, une rencontre s'est tenue au ministère de l'Intérieur sur le thème de la radicalisation. Elle a fait apparaître la complexité du phénomène et la variété des profils des personnes impliquées. L'Etat a déjà mis en place plusieurs outils de prévention depuis 2014 et insiste sur le rôle des familles.

"La menace à laquelle nous sommes confrontés a changé de nature." C'est par ces mots que Bernard Cazeneuve a ouvert une journée de réflexion sur la prévention de la radicalisation organisée au ministère de l'Intérieur, jeudi 12 novembre 2015, un jour avant les attentats de Paris. Pour la première fois, les acteurs en charge de la prévention  étaient réunis autour des ministres de l'Intérieur, de l'Education, du Travail, de la Justice, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports et de la secrétaire d'Etat à la Famille, afin de "dresser le bilan et dégager des marges de progression".
Vingt-quatre heures après l'arrestation d'un jeune homme en contact avec un djihadiste français en Syrie qui projetait d'attaquer des militaires à Toulon, le ministre de l'Intérieur a rappelé à cette occasion que désormais "le risque provient de personnes qui sont nées ou qui ont grandi parmi nous et qui, au terme d'un processus de radicalisation, tombent dans le fanatisme et la violence armée". De ce fait, "il est nécessaire que nous intervenions en amont pour prévenir les phénomènes d'endoctrinement et de radicalisation qui peuvent conduire à un passage à l'acte violent".
"Face à la menace que représentent les filières djihadistes, la prévention de la radicalisation constitue cependant un domaine d'intervention relativement récent, du moins en France", a constaté le ministre. Evoquant "une population d'environ 2.000 individus" radicalisés en France, "dont le nombre va croissant", et qui représente "un risque sécuritaire majeur", il a bien précisé que "cette population ne constitue pas à proprement parler un phénomène 'de société' et encore moins un courant, même marginal, de l'islam de France".

Des personnes radicalisées aux profils multiples

D'après le ministre, trois profils se distinguent : "les délinquants de droit commun qui ont notamment pu se radicaliser au cours d'un séjour en prison", les jeunes "issus des milieux populaires qui se trouvent en situation d'échec social et de fragilité psychologique", et les personnes qui "sont souvent issues des classes dites moyennes ou supérieures", "qui se disent 'en quête de sens' et pensent trouver une réponse et une issue à leur malaise identitaire dans un islam dévoyé". D'un point de vue statistique, 16% des djihadistes français auraient moins de 18 ans, et on compterait parmi eux un quart de femmes environ.
Bernard Cazeneuve a rappelé que depuis le mois d'avril 2014, le gouvernement avait mis en place plusieurs outils pour "gagner en efficacité dans le travail de repérage des personnes concernées". Il  a ainsi cité l'élaboration d'une "grille d'indicateurs du basculement dans le fanatisme et la radicalisation violente", la mise en place du centre national d'assistance et de prévention de la radicalisation et de la plateforme téléphonique nationale,  mais également la création de l'état-major opérationnel de prévention du terrorisme.
Par-delà la question du repérage, cette journée a finalement abordé la problèmatique de la "déradicalisation". A cet égard, les familles des jeunes radicalisés ont un rôle de premier plan à jouer. "Rien ne peut se faire sans la famille, qui est le nœud de la détection, de la prévention et de la déradicalisation", a  ainsi insisté Serge Blisko, président de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). A charge pour l'Etat et les associations de les accompagner.
 

Laurent Terrade, avec agences

La radicalisation en chiffres :

• Parmi les quelque 20.000 combattants étrangers présents aujourd'hui en Irak et en Syrie, on dénombre environ 5.000 Européens ;
• 571 Français ont rejoint les organisations terroristes présentes en Syrie et en Irak dont 85 mineurs et 199 femmes ;
• 141 personnes ont perdu la vie après avoir rejoint les organisations terroristes sur le front irako-syrien ;
• 103 personnes identifiées comme radicalisées ou étant sur la voie de la radicalisation font l'objet d'un suivi médical, 62 ont même dû être hospitalisées ;
• Près de 200 interdictions de sorties du territoire ont été prononcées.

AEF

 

 

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