"Prévenir la participation des jeunes aux trafics de stupéfiants" : la Mildeca sélectionne quinze collectivités et publie un référentiel
Quinze collectivités, de tailles variées, expérimenteront à partir de l’automne le projet Limit’s ("Limiter l’implication des mineurs dans les trafics de stupéfiants") visant à animer une dynamique partenariale de prévention avec les services de l’État et les associations. La Mildeca vient de publier un référentiel pour aider les collectivités à structurer ces mobilisations.
Les jeunes sont les "premières victimes de la professionnalisation des trafics". Pour la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), les trafiquants utilisent désormais des "techniques marketing qui enjolivent l'aspect illégal et délétère du commerce des drogues" et s’appuient sur "de nouveaux outils en ligne" pour attirer la clientèle et recruter leur main-d’œuvre. Ce phénomène touche "nombre de territoires en proie à la désaffiliation sociale, notamment les quartiers prioritaires de la ville (QPV), mais aussi des territoires périurbains ou des petites villes".
Lancé en janvier 2024 (voir notre article), l’appel à projets de la Mildeca vise donc à créer des dynamiques partenariales de prévention, impliquant en particulier les collectivités territoriales, les services de l’État et les associations, pour "limiter l’enrôlement des jeunes par les réseaux criminels". Issue du fonds de concours Drogues (sommes confisquées par la Justice, dont 10% reviennent à la Mildeca pour des actions de prévention), la dotation dédiée aux projets est de 2 millions d’euros. Début août 2024, la Mildeca a annoncé avoir sélectionné quinze collectivités : les villes de Villeurbanne (69), Albertville (73), Dijon et Chenôve (21), Saint-Brieuc (22), Rennes (35), Saint-Jean-de-Braye (45), Metz (57), Le Bouscat (33), Nantes (44), les communautés d’agglomération Creil Sud Oise (60) et du Centre littoral de Guyane (973) et les communautés de communes du Haut Val de Sèvre (79) et Luberon, Monts du Vaucluse et Ventoux comtat Venaissin (84). La diversité de ces territoires "met en lumière l'ampleur d'un phénomène qui touche tout le territoire national et qui s'adapte aux particularités locales", comme en avaient témoigné des maires ruraux en février dernier dans le cadre de la commission d’enquête sénatoriale sur le narcotrafic (voir notre article).
Des stratégies en direction des jeunes, des familles et des habitants
"Les projets sélectionnés seront mis en œuvre dès l’automne autour de la protection des plus jeunes (en soutenant la parentalité et en renforçant les compétences psycho-sociales) et de la lutte contre l’attractivité des réseaux criminels (en proposant des alternatives au trafic et à l’occupation de l’espace public en lien avec les habitants, les bailleurs sociaux et les partenaires du projet)", précise la Mildeca. Ces démarches locales s’inscriront dans l’approche Limit’s ("Limiter l’implication des mineurs dans les trafics de stupéfiants"), déjà expérimentée à Sarcelles, Loos et Lille depuis 2020. La Mildeca a publié début septembre un référentiel pour "partager des repères, des bonnes pratiques mais aussi alerter sur les risques et les difficultés d’un tel projet".
Ce guide a quatre parties : l’organisation du projet, les stratégies d’action à privilégier en direction des jeunes eux-mêmes, les stratégies d’action en direction des familles et la mobilisation – sécurisante - des habitants du territoire contre les trafics. Des exemples d’actions déjà expérimentées sont décrites. Ainsi, pour "lutter contre l’attractivité des réseaux criminels et le sentiment d’impunité", Limit's Sarcelle a réalisé des capsules vidéo pour déconstruire les mythes associés aux trafics. Vis-à-vis des jeunes, le projet consiste également à valoriser d’autres "possibles" et modèles de réussite, à "répondre à l’enjeu financier" en facilitant l’accès à des dispositifs comme le Travail alternatif payé à la journée (Tapaj) ou encore à organiser des "séjours de rupture". Le but est alors de remobiliser un jeune considéré comme à risque ou "participant déjà ponctuellement aux trafics" mais ne faisant "pas encore l’objet de poursuites ou d’une prise en charge" par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ).
"Injonction verbale du maire reposant sur ses compétences de police administrative", le rappel à l’ordre (RAO) constitue "une réponse symbolique et rapide à mobiliser dans le cadre de la participation indirecte des mineurs aux trafics", indique la Mildeca. Cette dernière précise que l’application du RAO peut faire l’objet d’un dialogue entre le maire et le procureur de la République, dans le cadre du projet Limit’s.