Archives

Agriculture / Alimentation - Pour marquer son désaccord sur le "fond" et la "méthode", le Sénat rejette le projet de loi EGalim

Les sénateurs ont refusé d'examiner le projet de loi dit EGalim sur l'agriculture et l'alimentation en nouvelle lecture, en adoptant le 25 septembre, par 276 voix pour et 49 voix contre, une motion opposant la question préalable sur le texte. Ce dernier est donc de facto rejeté. Dans un communiqué du 19 septembre, la commission des affaires économiques avait justifié cette motion par "des désaccords profonds sur le fond et sur la méthode". Dénonçant "l'intransigeance" du gouvernement et de la majorité, la commission considère que "les avancées votées par le Sénat" ont été "[balayées] d'un revers de main", aussi bien lors de la commission mixte paritaire (voir notre article du 11 juillet 2018) qu'en nouvelle lecture à l'Assemblée.

"Le monde agricole se meurt et ce texte n'y change rien"

Sur le fond, les sénateurs de la commission estiment que la future loi introduit "de nouvelles contraintes qui pèseront lourdement sur les agriculteurs, mais aussi sur les industriels français, le secteur de la restauration et les collectivités territoriales". Surtout, ils jugent que "les députés LaREM ont oublié l’essentiel tout au long des débats : améliorer le revenu agricole", en "[refusant] aux agriculteurs le droit de s’appuyer sur des indicateurs incontestables pour la construction de leur prix". "À défaut d'accord des interprofessions, les distributeurs imposeront leurs propres indicateurs, ce qui aggravera leur pression sur les agriculteurs : ils fixeront leurs prix en fonction du prix de revient", a déploré Michel Raison (LR, Haute-Saône). "Le monde agricole se meurt et ce texte n'y change rien", a embrayé Cécile Cukierman (CRCE, Loire), dont le groupe s'est abstenu.

Indicateurs : imposer un "cadre gradué" et rappeler aux filières leurs "engagements"

Regrettant le choix des sénateurs de ne pas poursuivre la discussion, Stéphane Travert, ministre de l'Agriculture, a estimé que la "stéréo mal réglée" des revendications contradictoires "indique peut-être, finalement, que nous avons placé le curseur au bon endroit, entre les attentes sociétales qui voudraient des solutions immédiates, et la transformation de notre modèle agricole, qui doit tenir compte du contexte économique et social".
Sur la fixation des prix, "nous imposons un cadre gradué, nous nous appuyons sur les engagements pris par les filières qui ont signé la charte le 19 novembre ; je saurai les leur rappeler !", a tenté de rassurer le ministre. "Comment croire à votre capacité à rééquilibrer les rapports entre les cinq centrales d'achats et les 12.000 fournisseurs et 600.000 agriculteurs ?", a interrogé en retour Laurent Duplomb (LR, Haute-Loire).
La commission des affaires économiques du Sénat "créera un groupe de suivi sur l'application de la loi", a annoncé Michel Raison. Le projet de loi pourrait être adopté définitivement le 2 octobre à l'Assemblée nationale.