Logement social - Portrait des Sem immobilières deux ans avant Elan
La fédération des entreprises publiques locales (EPL) actualise son observatoire des EPL immobilières (1). L'édition 2018 s'appuie sur des données de 2016. Elle dresse ainsi un portrait des EPL immobilières avant la réforme du secteur du logement social mise en œuvre par le gouvernement actuel.
A cette époque, il y avait 176 EPL immobilières possédant ou gérant un parc de 561.155 logements locatifs (2) (dont un peu moins de 400.000 conventionnés), soit un patrimoine moyen de 3.188 logements par EPL. En 2007, il y avait davantage d'EPL (230), pour un parc plus petit (480.540 logements locatifs) et un patrimoine moyen par EPL plus petit également (2.200 logements par EPL). Bref, le mouvement naturel (moins d'organismes gérant davantage de logements) allait dans le sens de la stratégie Logement du ministère de la Cohésion des territoires et du projet de loi Elan actuellement en fin de parcours parlementaire (la commission mixte paritaire se réunira le 19 septembre). Dans le même sens certes, mais pas assez rapidement pour le gouvernement au regard des besoins en logement des Français, et en logement social en particulier.
10.000 logements, le seuil d'Elan (à moins que ce ne soit 15.000)
En l'état actuel du projet de loi Elan, à sa sortie du Sénat en juillet, une Sem agréée pour exercer une activité de construction et de gestion de logements sociaux et qui gère moins de 10.000 logements sera dans l'obligation de rejoindre un regroupement d'organismes de logement social. Deux exceptions : les Sem immobilières dont le logement social ne constitue pas l'activité principale et qui n'a pas construit ou acquis plus de 600 logements sociaux depuis 6 ans ; les Sem immobilières ayant leur siège dans un département dans lequel il n'y a pas d'autre organisme de logement social ni regroupement. (Pour rappel, le gouvernement avait fixé un seuil à 15.000 : cela fera partie des négociations de la CMP du 19 septembre).
Par ailleurs, le ministre du Logement pourrait retirer l'agrément à une Sem gérant moins de 1.500 logements sociaux et qui n’en a pas construit au moins 500 pendant 10 ans.
7,4% des EPL gèrent 51% du patrimoine
En l'occurrence, l'observatoire des EPL immobilières nous dit qu'en 2016, il n'y avait que 10 EPL avec un patrimoine supérieur à 10.000 logements. Dix EPL sur 176, qui représentaient 51% du parc total ! Dit autrement : "7,4% des EPL gèrent près de 51% du patrimoine", calcule la fédération. Si on élargit le cercle, 34 EPL possédaient en 2016 un parc de plus de 3.000 logements, représentant cette fois 79,5% du parc locatif global des EPL. A l'inverse, les EPL de moins de 500 logements représentaient 39% des sociétés, mais seulement 3,1% du parc.
La fédération observe que, depuis 2001, "ce sont les structures de 500 à 2.999 logements qui ont le plus diminué, soit parce qu’elles ont grandi, soit parce qu’elles ont fusionné avec d’autres" ou parce qu'il y a eu des "cessions du parc immobilier d’EPL dont ce n’est pas l’activité prépondérante" ou encore des "arbitrage" d’actionnaires".
Elle observe aussi que les EPL immobilières avaient eu tendance à recentrer leur activité sur la construction et la gestion des logements (au lieu de l'aménagement, la promotion, la maîtrise d'ouvrage locative…), cette activité représentant 91,5% de leurs revenus en 2016. La fédération anticipe un délaissement de cette activité (et donc entre les lignes une menace de construire moins de logements) dès lors que, avec Elan, les EPL devront "s'inscrire dans les objectifs fixés par le gouvernement".
9% des EPL mettent en chantier 87% des logements
De même que l'observatoire révèle une concentration des parcs immobiliers, il note également une contribution très inégale des EPL sur la question des mises en chantier : 9% des EPL ont mis en chantier 87% des logements, tandis que 64% des EPL n’en ont lancé aucun sur l’exercice. Est-ce les mêmes qui gèrent plus de 10.000 logements ? Quoi qu'il en soit, "une grande partie des EPL participent à l’effort de construction, quelle que soit la taille de leur parc", souligne la Fédération.
Au total, les EPL avaient augmenté leurs mises en chantier de 4,4% en 2016, l'équivalent de 18.573 logements. La production était "majoritairement de type locatif et essentiellement social" est la croissance était "conforme à celle observée l’année passée, et supérieure aux mises en chantier de l’année 2010 qui atteignaient 18.308 logements".
En 2016, 17.837 logements avaient été mis en service, soit 3% du parc total.
63% des EPL en bonne santé financière
Quant à la santé financière globale des EPL, la fédération assure qu'"une majorité d’EPL" est en "bonne" ou "excellente situation". Elles étaient précisément 51% en "bonne" santé en 2016, 12% en "excellente" santé, mais 13% étaient dans une situation financière "fragile" et 8% "difficile" (16% se déclarant dans une situation financière "moyenne"). La Fédération indique que "29 sociétés sont particulièrement suivies car elles présentent des signes avérés de fragilité financière, le plus souvent dus à une production trop importante au regard des capacités financières de l’EPL ou au contexte territorial qui entraîne de la vacance". Elle ne précise pas s'il s'agit de petites ou de grandes structures, et donc si le regroupement obligatoire avec d'autres organismes de logements sociaux leur sera salvateur.
(1) Dans le domaine du logement social, on a tendance à utiliser indifféremment les termes "EPL immobilières" et "Sem immobilières". Les EPL (Entreprises publiques locales) regroupent trois statuts : les Sem (Sociétés d'économie mixte), les SPL (Sociétés publiques locales) et les SemOp (Sem à opération unique). Or seules les EPL sous statut Sem peuvent avoir un agrément pour construire et gérer du logement social.
(2) dont 272.650 en Ile-de-France et 121.950 en Outre-Mer.