PLF 2025 : le Sénat commence à redessiner le volet "collectivités locales"

Le PLF dans sa version initiale arrive au Sénat, qui détient une occasion unique de marquer le texte de son empreinte, en particulier s'agissant des dispositions sur les finances locales. Ce 13 novembre, la commission des finances a adopté de premiers amendements sur la partie consacrée aux recettes, dont un qui annule la réduction de 800 millions d'euros du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Pour le rapporteur général du budget, Jean-François Husson, les collectivités doivent cependant participer à "l'effort collectif" de maîtrise des comptes publics.

Avec le rejet par l'Assemblée nationale de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 (voir notre article), c'est le texte intégral du PLF pour 2025 déposé par le gouvernement qui arrive au Sénat. Ce scénario inédit donne un rôle de premier plan à la chambre des territoires dans la discussion sur le projet de budget. Ce qui devrait sourire aux collectivités.

La première salve d'amendements adoptés ce 13 novembre par la commission des finances du Sénat et les intentions affichées le même jour devant la presse par le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (LR), l'ont confirmé.

"L'état d'urgence budgétaire (…) nous impose un redressement massif et inédit" et les collectivités ne devront pas être "exonérées" de cet effort, a estimé Jean-François Husson au cours d'une conférence de presse. Mais les modalités de contribution de ces dernières "doivent et devront donc être justes et défendables", a-t-il complété. 

Le FCTVA défendu

Parmi les mesures d'économies inscrites dans le projet de budget pour 2025, la réduction du taux et de l'assiette du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) – qui doit réduire cette recette locale de 800 millions d'euros l'an prochain - est particulièrement critiquée par les élus locaux. La commission des finances du Sénat les a entendus ce 13 novembre, en supprimant purement et simplement la disposition inscrite dans le PLF 2025. "Le dispositif voulu par le gouvernement frappe rétroactivement les collectivités qui ont investi et les pénalise (…) alors que nous souhaitons préserver les capacités d'investissement locales, facteurs de création de richesses", a souligné le rapporteur général du budget, à l'initiative de l'amendement. Il a aussi mis en avant une mesure "qui parfois pèserait plus lourdement sur les petites collectivités".

Les sénateurs n'ont pas touché aux autres mécanismes du PLF 2025 qui doivent permettre aux collectivités de contribuer à un effort de maîtrise des comptes publics de 5 milliards d'euros l'an prochain. S'il n'est certes "pas une mesure favorable aux collectivités", le gel de la TVA affectée aux collectivités "me semble défendable", a soutenu le rapporteur général du budget, en relativisant : la disposition gouvernementale, qui va enlever 1,2 milliard d'euros aux collectivités, "se contente de créer une 'année blanche'". Suivant l'avis de Jean-François Husson, la commission des finances du Sénat a décidé de la laisser inchangée.

"Rendre le fonds de précaution plus acceptable"

Le fonds de précaution auquel les grandes collectivités et intercommunalités devront contribuer pour 3 milliards d'euros en 2025 figure dans la seconde partie du PLF 2025. En vue de la discussion à venir, le Sénat travaille, notamment avec le gouvernement, à "des propositions rendant le dispositif acceptable et raisonnable", a déclaré le rapporteur général du budget. Ce dernier veut éviter que le dispositif ne "casse la dynamique d'investissement des collectivités". Jean-François Husson a également estimé que le mécanisme de mise en réserve ne devra pas pénaliser "les collectivités fragiles" – en particulier les départements – mais au contraire "leur bénéficier". 

De nombreux départements connaissent en effet des difficultés financières croissantes. Faut-il, au-delà, les autoriser à relever le taux plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui est aujourd'hui de 4,5% ? Jean-François Husson s'est montré plutôt réservé sur la question, devant les journalistes. "Un petit bonus" pourrait permettre aux départements de "traverser le gué". Mais cette mesure qui serait nécessairement "temporaire et très contenue" ne "servi[rait] pas davantage le logement" et "alourdi|rait] encore un peu la pression fiscale", a-t-il critiqué. Du côté du gouvernement, la ministre chargée du Partenariat avec les territoires, Catherine Vautrin ne fait pas d'une possible hausse des DMTO une recette miracle. "Le revenu par habitant généré par les DMTO n'a rien à voir entre les Alpes-Maritimes et les Ardennes. C'est un élément de réponse, mais qui ne répond pas à tous les sujets", indiquait-elle ce 13 novembre, devant la commission du développement durable du Sénat.

"Version zéro"

Le projet de budget initial est "une version zéro" qui peut être amendée et le gouvernement a "la volonté de travailler (…) avec chacune des states pour apporter des réponses", a aussi déclaré la ministre. En soulignant que dans tous les cas, l'exécutif n'acceptera pas de revoir à la baisse le montant des économies escomptées dans ce projet de budget. Autrement dit, toute remise en cause des mesures formulées initialement dans le PLF 2025 (comme la réduction du FCTVA) devra, selon le gouvernement, se traduire par de nouvelles économies.

Voilà bien cadré le débat qui sera entamé le 25 novembre dans l'hémicycle du Sénat. Il faut dire que les sénateurs n'ont jamais eu un si beau rôle. Lorsque le 12 décembre, ils auront procédé au vote sur l'ensemble du projet de budget pour 2025, c'est leur copie qui sera examinée dans la foulée par la commission mixte paritaire (CMP) composée de sept députés et sept sénateurs. Une configuration qui donnera encore une place prépondérante au Sénat. Car en s'appuyant sur ses représentants - majoritairement de droite et du centre -, le gouvernement peut espérer parvenir à un accord entre les parlementaires. Il n'aurait recours à l'arme du 49.3 qu'au stade de la lecture définitive du texte par l'Assemblée nationale.