PLF 2021 : près de 43 milliards de dépenses favorables à l'environnement selon le premier "budget vert"
Présenté comme une "première mondiale" par le ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance, le rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État a été publié ce 30 septembre. Destiné à accompagner le projet de loi de finances (PLF) 2021, il a passé au crible 574 milliards d'euros de dépenses au regard de six objectifs environnementaux. Sur près de 53 milliards d'euros identifiés comme ayant un impact sur l'environnement, 42,8 milliards d'euros ont été évalués comme favorables à l'environnement et 10 milliards d'euros comme défavorables. Les 100 milliards d'euros du plan de relance ont aussi été analysés selon la même méthode. Plus de 32 milliards d'euros ont été jugés favorables à au moins un objectif environnemental et aucune dépense n'a d'impact défavorable à l'environnement.
Qualifié de "première mondiale" par Bruno Le Maire, lors de la présentation du projet de loi de finances (PLF) 2021 en début de semaine, le rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État a été dévoilé ce 30 septembre. Le document, qui constitue désormais une annexe du PLF, recense l'ensemble des impacts du budget de l'État, qu'ils soient positifs ou négatifs, au regard de six objectifs environnementaux : la lutte contre le changement climatique ; l'adaptation au changement climatique et la prévention des risques naturels ; la gestion de la ressource en eau, l'économie circulaire, les déchets et la prévention des risques technologiques ; la lutte contre les pollutions ; la biodiversité et la protection des espaces naturels, agricoles et sylvicoles. La méthodologie employée pour passer au crible chaque dépense (crédits budgétaires, taxes affectées plafonnées et dépenses fiscales rattachées aux différentes missions du budget de l'État) a été élaborée en 2019 par l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD).
Près de 43 milliards d'euros de "dépenses vertes"
Au total, un peu plus de 574 milliards d'euros de dépenses ont été analysées dans ce PLF 2021. 52,8 milliards d'euros de dépenses sont considérées comme ayant un impact sur l'environnement, la majorité des dépenses (masse salariale, prestations sociales aux ménages) étant classées neutres. 42,8 milliards d'euros sont au final cotés comme favorables à l'environnement. Parmi ces dépenses, 38,1 milliards d'euros sont considérés comme de vraies "dépenses vertes", c'est-à-dire qu'elles sont favorables à l'environnement sur au moins un des six objectifs précédemment cités. On trouve dans cette catégorie les dépenses en faveur du développement des énergies renouvelables (6,9 milliards d'euros), une partie de l’aide publique au développement (1,9 milliard d'euros), les taxes affectées aux agences de l’eau (2,2 milliards d'euros), les dépenses pour l’accompagnement de la transition énergétique, en particulier la prime de rénovation énergétique (800 millions d'euros), la part de taxes affectées à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) fléchées vers les projets les plus vertueux en termes environnementaux - exploitation ferroviaire et transports en commun notamment - pour 800 millions d'euros également ou encore la subvention pour charges de service public de l’Ademe (600 millions d'euros).
Les dépenses fiscales représentent 3,4 milliards d'euros de dépenses "vertes". Les plus importantes recouvrent l’application du taux réduit de TVA à 5,5% pour les travaux d'amélioration énergétique (1,2 milliard d'euros), les dispositifs de défiscalisation dans le logement ancien (300 millions d'euros), les réductions de taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (200 millions d'euros) ou encore l’électricité utilisée dans les transports en commun (200 millions d'euros également).
Sont aussi comptabilisées dans les dépenses favorables à l'environnement les dépenses "mixtes", c'est-à-dire ayant un impact favorable sur un ou plusieurs objectifs environnementaux mais défavorable sur d'autres. Leur montant est évalué à 4,7 milliards d'euros dans le PLF 2021. Il s'agit principalement des infrastructures de transport, notamment ferroviaire, qui peuvent générer des atteintes à la biodiversité. Le gouvernement estime que l'ensemble des dépenses vertes ont augmenté de 8,5 milliards d'euros dans le PLF 2021 par rapport à 2020.
Dépenses "brunes" : le poids des exonérations de taxes sur les carburants
Les dépenses "brunes", qui ont un impact défavorable sur au moins un axe environnemental sans avoir d'impact favorable sur les autres, sont, elles, évaluées à 10 milliards d'euros. Elles recouvrent principalement des dépenses fiscales (7,2 milliards d'euros), en particulier les exonérations ou taux réduits sur les taxes intérieures (TIC) des produits énergétiques relatives aux carburants (5,1 milliards d'euros), ainsi que des dépenses budgétaires, notamment les aides à la production d'énergie hors de la métropole (1,5 milliard d'euros) et les dépenses en faveur du transport aérien (300 millions d'euros). Mais selon le gouvernement, "ces dépenses peuvent répondre à des préoccupations ou d'autres enjeux de politiques publiques légitimes, par exemple de solidarité ou de péréquation entre les territoires."
La méthodologie du "budget vert" a aussi été appliquée aux 100 milliards d'euros du plan de relance. L'analyse a conclu qu'aucune dépense prévue par le plan n'avait d'impact défavorable. Sur la durée du plan, 32 milliards d'euros de dépenses, soit 32% du total, ont été cotées comme favorables dont 5,2 milliards d'euros de "dépenses mixtes".
Suivi dans le temps
Ce "budget vert" sera reconduit et offrira un suivi dans le temps des dépenses ayant un impact sur l'environnement, assure le gouvernement. Le budget vert 2020 exécuté sera ainsi présenté avec le PLF 2022. Autre volonté gouvernementale : améliorer, affiner et fiabiliser cet exercice au fil des ans. Les parlementaires, les associations de parties prenantes et tous les acteurs publics sont invités à s'en saisir pour faire des retours et "identifier les verrous à la transition écologique". Enfin, des analyses complémentaires sont prévues pour mieux caractériser certaines dépenses aujourd'hui classées comme neutres, comme par exemple le fonctionnement courant des ministères, certaines activités régaliennes ou encore les concours financiers globalisés versés à l'Union européenne et aux collectivités territoriales.
Convention citoyenne pour le climat : le gouvernement annonce de nouveaux amendements au budget 2021
Le gouvernement a présenté ce 30 septembre six amendements au projet de loi de finances (PLF) 2021 destinés à s'aligner sur les demandes de la Convention citoyenne sur le climat. Parmi les mesures dévoilées à la vingtaine de représentants de la Convention citoyenne reçus dans la matinée à Matignon, figure notamment le relèvement du forfait mobilité durable de 400 à 500 euros. Le dispositif, entré en vigueur en mai dernier seulement et versé par les entreprises, est destiné à encourager les salariés à se rendre au travail en vélo ou covoiturage. La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a également annoncé une révision du barème de l'indemnité kilométrique dans l'impôt sur le revenu, "pour ne pas avantager les voitures les plus émettrices" de Co2. Par ailleurs, un amendement s'attaquera à la "fiscalité sur les carburants pour l'aviation de loisir".
Des mécanismes incitatifs seront également proposés : réduction de la taxe sur les contrats d'assurance pour les véhicules électriques, prolongation d'un an de l'expérimentation de la taxe pour l'enlèvement des ordures ménagères incitative (Teomi) ou encore prorogation jusqu'à fin 2024 du "dispositif de sur-amortissement des véhicules de plus de 2,6 tonnes acquis neufs qui utilisent certaines énergies propres", selon Barbara Pompili. La ministre a précisé que le travail se poursuivait sur d'autres mesures : "écotaxe sur les billets d'avion, mesures sur le transport routier de marchandises ou encore la fiscalité sur les engrais azotés".
Interrogée sur les accusations de "détricotage" des 149 mesures de la Convention - dont 146 ont été retenues par l'exécutif - Barbara Pompili a souligné qu'il pouvait "y avoir des discussions, des débats". "Forcément il y a pas mal de mesures qui peuvent interroger. Mais à la fin nous aurons une décision qui sera prise par le chef du gouvernement", a-t-elle assuré.
"J'adore le tricot", a-t-elle encore plaisanté. "Et ce qu'on est en train de faire c'est de tricoter un beau pull vert que vous pourrez mettre à Noël", a-t-elle insisté. À cette date, un projet de loi reprenant une partie des préconisations de la Convention devra avoir été présenté en Conseil des ministres, pour une adoption définitive à la fin du premier semestre 2021.
AFP