Finances - PLF 2013 : encore un effort
"Assurer une réduction du déficit public à 3% en 2013 et permettre d'atteindre l'équilibre des comptes publics sur la législature, dans un esprit solidaire et responsable." Les premières lignes du compte-rendu du Conseil des ministres de ce vendredi 28 septembre entendent donner la couleur du projet de loi de finances pour 2013 et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.
Le retour du déficit public à 3% du PIB se fera au prix d'un effort de 36,9 milliards d'euros, dont 24 milliards de hausses d'impôts. Un tel effort, "le plus important depuis 30 ans" selon François Hollande, sera "inédit" en période de croissance très faible et de chômage élevé. Les hausses d'impôts concernent les "ménages les plus aisés" et les grands groupes. Il s'agit bien, a assuré vendredi le ministre Pierre Moscovici devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, de "préserver le pouvoir d'achat des ménages, en particulier celui des ménages les plus modestes". Et d'épargner les PME et TPE, "génératrices de croissance et d'emploi", en réduisant de 30% "l'écart de taux implicite d'imposition entre les PME et les grandes entreprises".
Autre grand axe du projet de budget : l'Etat s'engage à faire un effort de 10 milliards d'euros sur ses dépenses, en gelant ses effectifs et en s'attaquant notamment aux excès des agences opératrices de l'Etat récemment montrés du doigt par deux rapports. En parallèle, le projet de budget prévoit des créations d'emplois dans les secteurs jugés prioritaires. Ces créations seront "strictement compensées" ailleurs, selon Bercy.
Une donnée est également mise en avant dans le compte-rendu du Conseil des ministres : "Les collectivités locales prennent leur part à l'effort global." Un effort qui, pour 2013, se traduit comme prévu par "la stabilisation des concours versés par l'Etat, hors FCTVA". Et qui devrait donner lieu, à une "baisse des concours en 2014 et 2015". Cette baisse "sera conduite en concertation avec les collectivités sur les modalités de sa répartition", est-il précisé, le compte-rendu mettant également en avant le fait que "cet effort sera équitable, grâce à un renforcement de la péréquation". Autant de grandes lignes qui avaient été détaillées la veille devant le Comité des finances locales (voir ci-contre notre article du 27 septembre).
"Les crédits du fonds de compensation de la TVA augmentent de 120 millions d'euros. Les dotations liées à la réforme de la taxe professionnelle sont maintenues.
Au total, les concours de l'Etat aux collectivités locales augmentent globalement de 120 millions d'euros par rapport à 2012. Compte tenu de l'évolution tendancielle de ces dépenses, estimée par la Cour des comptes à environ 500 millions d'euros, cette évolution correspond à un effort de près de 400 millions d'euros réalisé par les collectivités locales", résume le dossier de présentation du PLF diffusé par Bercy.
S'agissant de la péréquation, les chiffres suivants sont donnés : "Pour les communes, la dotation de solidarité urbaine augmente de 120 millions d'euros, la dotation de solidarité rurale de 78 millions d'euros et la dotation nationale de péréquation de 10 millions d'euros. Pour les départements, la dotation de péréquation urbaine et la dotation de fonctionnement minimale augmentent globalement de 20 millions d'euros. Enfin, la dotation de péréquation des régions augmente de 10 millions d'euros." Et pour la péréquation horizontale, la montée en charge du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) est confirmée : "360 millions d'euros seront répartis en 2013 contre 150 millions d'euros en 2012."
deci delà, Quelques points qui retiennent l'attention
Plus de 12.000 postes supprimés dans les ministères non prioritaires
Le PLF 2013 prévoit la suppression de 12.298 postes dans les ministères "non prioritaires" au profit de la création de 11.000 postes dans l'Education, la Justice, et la Police, afin d'assurer une stabilité globale des effectifs. La masse salariale de l'Etat est pratiquement stabilisée à 80,6 milliards d'euros (contre 80,4 milliards en 2012) et les dépenses de fonctionnement des ministères sont globalement réduites de 5%, portant l'effort global à 2,8 milliards d'euros. Bercy souligne que "ce chiffre reste très inférieur aux 30.000 suppressions environ opérées chaque année par le gouvernement précédent".
Le ministère le plus touché est la Défense (-7.234 postes), devant l'Economie et les Finances (-2.353 postes), l'Egalité des territoires (-662), l'Ecologie (-614), l'Intérieur hors police et gendarmerie (-614) et l'Agriculture (-280).
Le projet de budget prévoit également une participation des opérateurs "à l'effort de redressement et de stabilisation des effectifs". Ces 556 organismes, dont la mission de service public, le financement et le contrôle sont définis par l'Etat - comme les agences régionales de la Santé, Météo France, Pôle Emploi ou le musée d'Orsay -, emploient 430.000 personnes. En 2013, ils seront financés par l'Etat à hauteur de 38,9 milliards d'euros, soit une stabilisation en valeur, et perdront 1.303 postes en équivalent temps plein, en tenant compte notamment des 2.000 créations de postes à Pôle emploi.
Préfectures : accueillir mieux en dépensant moins
Les préfectures, sommées de réaliser 7% d'économies en 2013, se voient également demander d'améliorer l'accueil des usagers, notamment des étrangers. "L'administration centrale et territoriale de l'Etat" - qui regroupe plus de 27.000 emplois dans les préfectures et 5.800 à l'administration centrale - doit perdre 554 emplois en 2013 et réaliser 6,6 millions d'économies, selon la PLF. Ses moyens hors pensions doivent passer de 2,22 milliards d'euros en 2012 à 1,96 milliard en 2013. "Il convient de relever que cet effort d'économies est plus prononcé dans les services centraux (- 10,4 %) que dans le réseau préfectoral (- 7 %)", est-il précisé.
Malgré ces restrictions budgétaires, "un effort significatif sera fait en matière d'accueil en préfecture, notamment des étrangers". "Je compte sur l'imagination des préfets" pour y parvenir, a déclaré à la presse le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls.
Le budget de l'emploi passe le cap des 10 milliards
Le budget du gouvernement directement consacré à l'emploi va repasser au-dessus de 10 milliards d'euros en 2013 pour financer notamment les recrutements à Pôle emploi et le déploiement de 100.000 emplois d'avenir.
Les moyens globaux du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle augmentent de 4% à 10,949 milliards, selon le ministère. L'augmentation ne compense toutefois pas la coupe sévère opérée en 2012 (-12%).
Plus précisément, le PLF affecte 10,12 milliards d'euros à la mission "Travail et Emploi" (+1,7% par rapport à 2012) et prévoit 825 millions d'euros pour des fonds spécialement affectés au financement "de la modernisation et de l'apprentissage". Le reste des dépenses se décompose comme suit : 13% pour les opérateurs (Pôle emploi, missions locales...), 5% de dépenses de personnel et 2% de dépenses de fonctionnement.
Une enveloppe de 2,6 milliards d'euros est consacrée aux emplois aidés dont 470 millions pour les emplois d'avenir. Le reste permet de reconduire 390.000 contrats aidés classiques (dont 340.000 pour le secteur non marchand). Au passage, le Contrat d'autonomie, lancé en 2009 par Fadela Amara, est supprimé. Les maisons de l'emploi voient leur budget maintenu, ainsi que les missions locales. Les crédits pour les contrats d'apprentissage et de professionnalisation sont revus à la baisse (1,249 milliard d'euros) car tous n'avaient pas été épuisés en 2012. Enfin, pour l'emploi des personnes handicapées, un effort de 337 millions d'euros (+9%) est programmé pour 1.000 postes aménagés de plus. Le coût des contrats de génération n'est pas inscrit au budget, "pas encore calibré". Il fera l'objet au printemps d'une loi rectificative. Le budget du ministère de l'Emploi ne représente qu'un dixième des dépenses totales en faveur du marché du travail.
Education : 10.000 créations de postes
Le PLF 2013 prévoit 10.011 créations de postes dans l'enseignement, l'une des priorités de François Hollande qui a promis 60.000 créations de postes dans ce secteur pendant le quinquennat. Ces mesures s'ajoutent aux postes créés à la rentrée 2012 dans la loi de finances rectificative, portant au total à près de 17.000 le nombre de postes créés dans l'éducation, l'enseignement supérieur et l'enseignement agricole. La concertation pour la refondation de l'école, qui touche à sa fin, va définir des orientations, rappelle le dossier de présentation du projet de loi : "développer le numérique à l'école à travers les Tice", "améliorer les rythmes scolaires", "relancer l'éducation prioritaire et lutter contre le décrochage scolaire, "construire un grand service public de l'orientation" et "prévenir la violence au sein des établissements scolaires". Le ministère de l'Education "contribue à l'effort de maîtrise des dépenses publiques par une stabilisation des dépenses" hors personnels et bourses, tout en "préservant les dépenses sociales et l'accompagnement des élèves en situation de handicap", souligne le texte. Le budget 2013 de l'enseignement scolaire (éducation et enseignement technique agricole) s'élève à 45,70 milliards d'euros. Il atteindra 46,10 milliards d'euros en 2014 et 46,58 milliards d'euros en 2015.
Jeunesse ou Sports ?
Le budget de la mission Jeunesse, Sports et Vie associative est en baisse de près de 6%. De nouvelles hausses sont toutefois prévues à partir de 2014. Les missions Sports d'une part, Jeunesse et Vie associative d'autre part, se voient attribuer 0,23 milliard d'euros chacune. La partie Jeunesse et Vie associative gagne 14%, au détriment des Sports dont les crédits doivent, comme chaque année, être ajoutés à ceux du CNDS (centre national pour le développement du sport) qui se montent à environ 0,27 milliard d'euros. L'essentiel de l'augmentation de la mission Jeunesse et Vie Associative ira prioritairement au service civique. Côté sports, l'accent doit être mis sur la lutte contre les inégalités d'accès, le développement des pratiques, la promotion de la santé par le sport, et la reconversion des sportifs de haut niveau.
Culture : plusieurs projets abandonnés
Le budget de la mission Culture est en baisse de 4,3% et confirme l'abandon de plusieurs projets. Afin de "contribuer au redressement des comptes publics" et de "financer les priorités" de la mission, "les grands projets culturels annoncés par le précédent gouvernement sans être financés seront abandonnés, ou, pour certains, redimensionnés ou reportés", indique le PLF 2013. La ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, avait déjà fait part de ces arbitrages début septembre.
Social : la prime de Noël pérennisée
La prime de Noël, aide exceptionnelle accordée aux bénéficiaires de minima sociaux, est pérennisée dans le projet de budget 2013. Cette prime n'avait jusqu'ici pas de financement assuré. "Cela rajoutait de l'incertitude, c'était une source d'instabilité", a-t-on indiqué dans l'entourage de la ministre déléguée en charge de la Lutte contre l'exclusion, Marie-Arlette Carlotti. Le financement sera assuré via une hausse de 0,35 point du taux de contributions additionnelles aux prélèvements sociaux sur les revenus du capital affectées au Fonds national des solidarités actives (FNSA), qui cofinance le RSA. La taxe était jusqu'ici de 1,1%. Elle va donc passer à 1,45%. En 2010, la prime de Noël avait concerné 1,7 million de bénéficiaires. Son coût en 2012 était estimé à environ 410 millions d'euros. Elle avait été attribuée pour la première fois en 1998 par le gouvernement Jospin.