Formation professionnelle - Plan 500.000 formations : les cinq premières conventions régionales signées
C'est Philippe Richert, président du Conseil régional d'Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine et de l'Association des régions de France (ARF) qui a donné le coup d'envoi du positionnement des régions volontaires pour participer au plan gouvernemental "500.000 formations supplémentaires" pour les demandeurs d'emploi. Le 18 mars, en présence de Myriam El Khomri, ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, Philippe Richert a signé, avec la préfecture de région, la première convention régionale suite à la réunion quadripartite (Etat, régions, représentants des organisations d'employeurs et syndicats) qui a eu lieu au ministère du Travail, le 29 février, sur le "plan 500.000", mis en place dans le cadre du plan d'urgence pour l'emploi décidé par le président de la République le 18 janvier dernier. Les représentants des partenaires sociaux de la région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine étaient présents et seront signataires de cette première convention dès l'installation du Comité paritaire interprofessionnel régional pour l'emploi et la formation professionnelle (Coparef). A la suite de ce premier conventionnement, quatre autres régions ont suivi : Centre-Val de Loire, le 21 mars, Bretagne et Nord-Pas-de-Calais-Picardie le 23 mars; et Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, le 25 mars. Bourgogne-Franche-Comté devrait être la prochaine région à s'engager dans cette opération.
Les modalités de mise en œuvre régionale du plan "500.000" dans le cadre de conventions tripartites entre l'Etat, les conseils régionaux et les Coparef ont été définies par une instruction de la Délégation générale à l'emploi et la formation professionnelle n°DGEFP/PFC/2016 du 8 mars 2016 "relative au déploiement du plan 'un million de formations pour les personnes en recherche d'emploi'". Les mesures d'urgence annoncées par François Hollande le 18 janvier visent en effet à doubler le nombre de formations au bénéfice des demandeurs d'emploi, en le portant à un million. Pour financer ce plan de formations régionales, dont la coordination est confiée aux conseils régionaux, l'Etat dégage "à titre exceptionnel" un milliard d'euros. Les régions ont jusqu'au 31 mars 2016 pour s'engager dans le cadre du plan "500.000".
La conclusion des conventions Etat/Région/Coparef est possible sous réserve du respect de "trois clefs", décrites dans l'instruction du 8 mars 2016. D'une part, la région qui s'engage doit "reconduire en 2016 son effort propre de formation à destination des personnes en recherche d'emploi au niveau des réalisations 2015, en nombre d'actions et en montant financier" ; d'autre part, la région doit s'engager à "réaliser en 2016 des formations supplémentaires pour le même public, avec compensation par l'Etat sur la base d'un coût moyen établi nationalement afin d'assurer le respect de l'enveloppe globale de un milliard d'euros". Enfin, il y aura "un phasage des versements en trois étapes précisément définies à l'échelle nationale". Les services extérieurs du ministère du Travail sont invités, parallèlement à leurs échanges avec les conseils régionaux, à "veiller à associer les partenaires sociaux (Coparef) à la préparation de la mise en œuvre régionale du plan, afin qu'ils puissent, s'ils le souhaitent, être signataires de la convention régionale, dans un partenariat quadripartite avec la région et l'Etat". Ce point est "essentiel dans la démarche de conventionnement", a confié à Localtis l'entourage de Clotilde Valter, secrétaire d'Etat auprès de Myriam El Khomri, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage, qui a ajouté : "L'objectif est de faire vivre le quadripartisme de manière optimale". Clotilde Valter a d'ailleurs confié à l'un de ses conseillers, Yanic Soubien (ancien vice-président de la région Basse-Normandie en charge de la formation professionnelle tout au long de la vie et de la politique de l'emploi), la fonction de "Chargé des relations avec les acteurs de la quadripartite". L'entourage de la secrétaire d'Etat l'a assuré : "Tous les acteurs sont désormais mûrs et ont envie d'avancer ensemble" sur les questions de formation professionnelle et d'emploi. Si la région ne souhaite pas conclure de convention, la mise en œuvre régionale du plan sera alors confiée à Pôle emploi, "l'Etat étant garant de l'homogénéité des efforts sur l'ensemble du territoire national", indique l'instruction.
Chiffrage des engagements régionaux
Au-delà de l'acceptation des trois points clefs définis dans le document de la DGEFP, "la convention ne sera complète qu'une fois les engagements chiffrés validés". L'Etat a défini un nombre cible d'actions supplémentaires, région par région, pour l'année 2016. Le tableau de ces objectifs est joint en annexe de l'instruction. Pour l'Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine par exemple, l'Etat fixe un objectif de 74.581 entrées en formation pour les demandeurs d'emploi en 2016. Pour l'Ile-de-France, l'objectif est de 118.500 entrées, pour Auvergne-Rhône-Alpes, il est de 90.574. Les objectifs ont été définis sur la base des formations 2015 des régions en faveur des demandeurs d'emploi. "Il appartient à la région de déterminer le nombre d'actions supplémentaires sur lequel elle souhaite s'engager dans le cadre de la convention", souligne l'instruction. Plusieurs cas de figure peuvent se présenter. Si la région retient un nombre d'actions égal à l'objectif de l'Etat, "la compensation allouée sera égale à la quote-part de l'enveloppe de un milliard d'euros prévue par l'Etat sur le territoire de la région". Si elle retient un nombre d'actions supplémentaires inférieur, "la compensation allouée sera proratisée ; les financements nécessaires à la réalisation des actions supplémentaires non inscrites dans la convention seront confiés à Pôle emploi". Enfin, si la région souhaite réaliser plus d'actions supplémentaires, "le surplus de formations par rapport à l'objectif faisant l'objet d'une compensation par l'Etat sera à la charge du conseil régional".
Dans tous les cas, la convention comprendra, "outre la reconduction de l'effort 2015 de la région, un engagement sur un nombre plancher d'actions à conduire et sur un plafond de compensation de dépenses par l'Etat, calculé sur la base d'un coût moyen unitaire national de 3.000 euros par formation". La mise en œuvre de la convention Etat/Région/Coparef nécessite en plus la signature d'une convention entre la région volontaire et Pôle emploi, définissant la part des formations supplémentaires confiées à l'opérateur, et une convention entre la région et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) dans laquelle sera prise en compte la quote-part régionale de l'abondement décidé par les partenaires sociaux gestionnaires du FPSPP pour financer la formation des chômeurs. Christian Janin, président du Comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation (Copanef) explique que ce dernier "a décidé que chaque fois que le Coparef signerait une convention régionale Etat/Région, une convention FPSPP/région pour le financement du Compte personnel de formation (CPF) des demandeurs d'emploi serait associée". Ce qui ne rend plus nécessaire la reconduction de l'accord signé en mai 2015 entre l'ARF et le Copanef sur cette question. Des accords régionaux pourront aussi prévoir le déploiement avec le concours du FPSPP d'autres dispositifs qu'il finance pour les demandeurs d'emploi : préparation opérationnelle à l'emploi (POE), contrat de sécurisation professionnelle (CSP), CIF-CDD, etc.
L'instruction de la DGEFP précise en outre qu'il convient de "veiller à l'articulation" entre les conventions tripartites et celle pouvant lier l'Agefiph à la région. Enfin, le suivi de la mise en œuvre de ces conventions sera effectué par les comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop). Ces comités devront s'assurer notamment du respect des "deux objectifs principaux" du plan : le ciblage prioritaire (mais pas exclusif) sur les publics pas ou peu qualifiés et les chômeurs de longue durée, et la satisfaction des besoins de formations locaux et sectoriels.
Les premières conventions
Dans sa convention conclue le 18 mars, la région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine s'est engagée à maintenir en 2016 son effort de formation à destination des demandeurs d'emploi au même niveau que les actions financées en 2015 par les trois anciennes régions Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine, soit 204,14 millions d'euros de dépenses mandatées dans les comptes de l'exercice 2015 et 26.881 actions de formation réalisées du 1er janvier au 31 décembre 2015. Dans le cadre du plan pour l'emploi, la nouvelle grande région devra réaliser 24.965 formations supplémentaires au cours de l'année 2016 au titre de la convention signée. Elle recevra en compensation de l'Etat, 74,89 millions d'euros en trois versements. Au total, au titre du "plan 500.000", la région inscrira 75 millions d'euros à son budget primitif. Philippe Richert a salué "le respect par l'Etat de son engagement".
La région Centre-Val de Loire s'est, elle, engagée le 21 mars à réaliser près de 12.000 formations supplémentaires (sur un total de plus de 32.000 formations financées par la région en 2016 pour les chômeurs), pour lesquelles l'Etat apportera 35,2 millions d'euros. La région s'engage à maintenir son effort financier de 38,4 millions d'euros au titre de l'achat, en 2015, de formations collectives pour les demandeurs d'emploi. Le président de la région, François Bonneau a précisé que la réalisation de la convention régionale sera principalement confiée à Pôle emploi. C'est là "le signe de vos excellents rapports partenariaux", a salué Myriam El Khomri, lors de la signature de la convention.
En Bretagne, le protocole régional signé le 23 mars 2016 en présence de Clotilde Valter, a prévu de quasiment doubler le nombre de formations pour les demandeurs d'emploi pour les porter de 28.000 en 2015 à 47.000 en 2016. Cette convention rassemble tous les acteurs de la formation (Etat, conseil régional, partenaires sociaux et Pôle Emploi) "autour d'un objectif commun: organiser 47.000 formations, tous dispositifs confondus", a précisé le conseil régional qui participe par ailleurs à l'opération "Territoires zéro chômeur de longue durée".
"Devant l'urgence d'agir pour l'emploi, la politique n'a pas de couleur. Faire reculer le chômage est notre priorité", a déclaré Xavier Bertrand président (LR) de la nouvelle région Nord-Pas-de-Calais-Picardie (Hauts-de-France), le 23 mars. La région va reconduire en 2016 les actions réalisées l'an dernier par les deux anciennes régions, et il s'engage à mettre en œuvre 33.000 parcours supplémentaires en partenariat avec Pôle emploi. La part du conseil régional dans la mise en place du plan s'élève à 176 millions d'euros (rémunération des stagiaires incluses), soit 47% du total (372 millions d'euros). La compensation financière de l'Etat (99 millions d'euros) représente 27% du total, la part financière de Pôle emploi représente 17% du total et celle des partenaires sociaux, 9% (21,25 millions d'euros).
Le 25 mars, l'Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes (ALPC) a bouclé cette première semaine de signatures. Elle s'engage à maintenir en 2016 son effort propre de formation en direction des chômeurs, soit 96,54 millions d'euros de dépenses de formation mandatées dans les comptes 2015 et 38.721 actions de formation réalisées du 1er janvier au 31 décembre 2015. Au-delà, la nouvelle grande région s'engage à réaliser 26.777 formations supplémentaires en 2016 au titre de la convention tripartite. Cet effort supplémentaire fera l'objet d'une convention avec Pôle emploi "pour permettre de définir quelle part de ces 26.777 actions de formation sera confiée" à l'opérateur public. Le financement de l'Etat s'élève à 80,33 millions d'euros. De son côté, le Coparef s'engage à mobiliser les OPCA au titre du financement de la POE et à faire financer par le FPSPP le CPF des demandeurs d'emploi, le tout pour un montant de 17,92 millions d'euros. La région s'engage à mettre en place des parcours mêlant formations qualifiantes, POE, adaptations au poste, acquisition du certificat CléA, etc. Cette convention constitue, d'après le conseil régional, "une première étape pour obtenir le positionnement de la région ALPC comme pilote du service public de l'emploi (SPE), conformément à la mise en œuvre de la loi Notr, et tel que demandé par le président de la République". L'objectif, ajoute l'exécutif régional, est de "faire face à l'irrationalité de l'organisation actuelle du SPE et de mettre en place les bases d'une animation et d'une coordination des prescripteurs de formation, ainsi que le pilotage de l'accompagnement des demandeurs d'emploi vers l'entreprise".