Personnes âgées : les directeurs d'Ehpad ne veulent plus des départements
La Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et de services pour personnes âgées (Fnadepa) a présenté le 10 mars une plateforme de 25 propositions sur la prise en charge du grand âge. Parmi ces propositions, celle d'un "big bang de la gouvernance" consistant à confier aux ARS "la compétence exclusive sur tout le secteur du grand âge". Donc sur les Ehpad, mais aussi les résidences autonomie et les services à domicile. Les sections soins et dépendance des Ehpad seraient fusionnées.
À l'occasion d'une conférence de presse le 10 mars, la Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d'établissements et de services pour personnes âgées) a présenté "25 mesures pragmatiques et ambitieuses, fondées sur l'expertise de ses 1.200 adhérents, tous directeurs d'établissements et services pour personnes âgées". Objectifs de cette démarche, rendus encore plus impératifs par les enseignements de la crise sanitaire : "faire avancer le débat public" et "réformer rapidement et durablement l'accompagnement des personnes âgées". Il s'agit aussi de faire pression, afin de faire aboutir le projet de loi Grand Âge et autonomie, qui "ne cesse d'être repoussé malgré la promesse du président de la République".
Un "big bang de la gouvernance"
Ces propositions sont regroupées en "trois axes majeurs", intitulés respectivement : "Soutenir les professionnels du grand âge : une urgence sociale", "Optimiser le parcours de vie des personnes âgées : un impératif éthique" et "Stabiliser la gouvernance et les financements des territoires : des moyens essentiels". Les départements, très fortement impliqués dans les politiques en faveur des personnes âgées, ne devraient pas manquer de s'intéresser au troisième axe, et plus particulièrement à la proposition n°20. Celle-ci propose rien moins qu'un "big-bang de la gouvernance", consistant à "confier aux ARS la gouvernance exclusive du secteur du grand âge : Ehpad, mais aussi résidences autonomie et services à domicile (Saad/Ssiad)". Pour l'occasion, les ARS seraient transformées en Arsa (agences régionales de santé et de l'autonomie). Ces Arsa deviendraient l'autorité de tarification unique.
Pour mémoire, on rappellera que lors de la discussion de la loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires) un amendement adopté par le Sénat avait déjà retenu cette dénomination, avant qu'elle soit finalement écartée au profit du terme ARS (voir notre article du 28 mai 2009). Dans la proposition de la Fnadepa, les départements poursuivraient néanmoins leurs missions en matière de prévention, notamment par le biais des conférences des financeurs et des "centres d'aides et d'informations aux personnes âgées", que la Fédération propose de développer.
Pour une fusion des sections soins et dépendance
Toujours en termes de gouvernance, la Fnadepa propose de fusionner les sections soins et dépendance des Ehpad, avec en outre la création d'une valeur de point GIR nationale. Le devenir de l'APA dans ce schéma n'apparaît pas très clairement. Dans le même esprit, et face à l'existence d'écarts entre départements, la Fnadepa propose "d'engager prioritairement une réforme de l'aide sociale à l'hébergement et d'établir un socle de règles minimales communes dans un objectif de simplification et de lisibilité".
L'association préconise également de faire de la prévention de la perte d'autonomie une priorité de santé publique, notamment avec la création d'un "rendez-vous de prévention" à l'âge de 60 ans. Sur le financement de l'ensemble, la Fnadepa reprend l'évaluation du rapport Libault, avec un besoin de l'ordre de 9,2 milliards d'euros à l'horizon 2030.
Parcours de vie et revalorisation de métiers du grand âge
Sur le parcours de vie des personnes âgées, la Fnadepa formule une dizaine de préconisations. On en retiendra notamment la création de dispositifs spécialisés dans la prise en charge urgente des personnes âgées et la création de places d'accueil en urgence dans les Ehpad et résidences autonomie (ce qui changerait passablement la vocation de ces dernières), une conception repensée des Ehpad – organisés comme une "véritable plateforme de ressources gérontologiques" et beaucoup plus ouverts sur l'extérieur –, ou encore le développement de solutions d'habitat intermédiaire (réforme de l'accueil familial, systèmes de relayage...).
Sur le soutien aux professionnels du grand âge, les enjeux sont tout aussi forts, avec 350.000 professionnels à former d'ici à 2025. Mais les propositions sont plus classiques. La Fnadepa préconise ainsi, sans surprise, d'"augmenter le nombre de professionnels de manière pérenne et significative, aussi bien dans les établissements que les services à domicile" et de renforcer l'attractivité médicale au sein des Ehpad, avec la création de postes de médecins salariés. D'autres propositions concernent la formation des professionnels – notamment aux nouvelles technologies –, l'instauration d'une démarche participative autour de la qualité de vie au travail (QVT), mais aussi le "décloisonnement" des rémunérations. En clair, il s'agirait "d'étendre les mesures de revalorisations salariales du Ségur de la santé à tous les professionnels du grand âge", y compris le secteur du domicile. Une proposition qui rejoint, en élargissant son périmètre, la négociation en cours animée par Michel Laforcade. Les départements, principaux financeurs de l'aide à domicile avec les caisses de retraite, étant mis hors-jeu de la gouvernance au profit des Arsa, il resterait toutefois à savoir qui financerait cette revalorisation conséquente du secteur...