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Logement social - Paris veut créer un dispositif de viager "public et solidaire"

Lors de sa session du 20 au 22 mars, le conseil de Paris a adopté, sur proposition du groupe écologiste, une délibération sur la mise en place "d'un dispositif de viager public et solidaire". Initialement, le projet de délibération prévoyait le lancement de ce viager "d'ici juillet 2019". La disposition votée est finalement plus modeste, dans la mesure où la ville s'engage uniquement à s'assurer de la faisabilité d'une telle initiative et de présenter les résultats de cette étude avant la mi-2019. L'annonce de cette démarche n'est cependant pas une surprise, dans la mesure où ce projet figurait en toutes lettres dans le "Plan seniors 2017-2021" adopté en juin dernier (voir notre article ci-dessous du 13 juin 2017).

Des viagers qui deviennent des logements sociaux

Ce n'est pas non plus la première fois que le recours au viager est envisagé, notamment dans le cadre de la prise en charge de la dépendance, la mobilisation du patrimoine immobilier devenant alors une source de financement.
Le mécanisme envisagé par la ville de Paris s'adresse aux personnes âgées propriétaires de leur logement, mais disposant de faibles ressources. Selon la logique du viager, la ville acquerrait le logement auprès des personnes âgées volontaires - qui continueraient d'occuper le logement - et verseraient à ces dernières une rente à vie, fonction notamment de la valeur du bien. Au décès de l'intéressé, la ville deviendrait alors propriétaire du logement. Le groupe EELV souhaite que les biens ainsi acquis soient alors transformés en logements sociaux, notamment dans les quartiers déficitaires de l'ouest parisien.
Pour Galla Bridier, adjointe (EELV) à la maire de Paris chargée des seniors, "si le viager n'a pas bonne presse, les esprits évoluent. D'ailleurs, on observe un volume important des offres de viager à Paris". L'élue reste néanmoins prudente, en indiquant que "l'idée est belle, mais elle demande à être expertisée".

"Un aspect morbide qui pose une question éthique"

S'il est soutenu par les écologistes, le groupe PS et les radicaux et indépendants, le projet suscite néanmoins des réserves sur les bancs du conseil de Paris. Le principe même du viager, qui consiste en un "pari" sur le décès du bénéficiaire, pose problème. Pour Eric Azière (UDI-Modem), il y a dans le viager "un aspect morbide qui pose une question éthique". Pour Julien Bargeton, du groupe Démocrates et progressistes, "les bonnes intentions ne sont pas suffisantes. Le viager est un pari sur la mort d'une personne, qui déshérite les ayant-droits". Pour Sylvie Ceyrac (LR), "ce dispositif est plein d’arrières pensées : capter leurs logements pour les transformer en logements sociaux à moindre coût".
Au-delà des aspects éthiques et politiques, le projet de création d'un viager "public et solidaire" soulève aussi plusieurs questions. En particulier, quel serait l'intérêt d'un particulier de recourir à un viager municipal plutôt de conclure un viager de droit privé, les offres ne manquant pas sur la capitale. De même, acquérir par ce biais des logements sociaux dispersés et isolés pourrait se révéler coûteux en termes de gestion pour les OPH attributaires. Les réponses devraient figurer dans les résultats de l'étude que va engager la ville de Paris.