"Paquet Mobilité verte" : la Commission adopte quatre nouvelles initiatives
La Commission a adopté ce 14 décembre quatre nouvelles initiatives en matière de mobilité durable. Elle entend compléter et moderniser le réseau RTE-T, promouvoir le ferroviaire, singulièrement le transport de voyageurs longue distance, sécuriser et fluidifier le transport routier et renforcer la mobilité durable dans les villes, notamment via le déploiement des plans de mobilité urbaine durable.
La semaine aura été particulièrement riche pour le collège de la Commission, qui a adopté plusieurs initiatives en lien avec le pacte vert. Parmi elles, quatre nouvelles propositions du paquet "mobilité verte", qui donnent corps – ou font écho – à la stratégie de mobilité durable et intelligente présentée le 9 décembre 2020 (voir notre article du 27 janvier 2021).
Compléter et moderniser le réseau RTE-T
La Commission vise d’abord à compléter et moderniser le réseau RTE-T, réseau européen de voies ferrées, de voies navigables intérieures, de voies maritimes de courte distance et de routes reliant 424 grandes villes aux ports, aéroports et terminaux ferroviaires. La Commission demande à ces villes d’élaborer un plan de mobilité urbaine durable (PMUD, ou SUMP, pour sustainable urban mobility plan) d’ici 2025 afin de promouvoir une mobilité zéro émission et de développer et d'améliorer les transports publics et les infrastructures réservées à la marche et au vélo. Proposés en 2013 et équivalents des plans de déplacements urbains français, on compterait 1.000 plans "ou assimilés" déjà en place dans l’Union. La Commission introduit une échéance intermédiaire, en 2040, pour accélérer la réalisation des principales parties du réseau, qui doit être complet en 2050 (le cœur de réseau devant l’être en 2030). Sont également visés davantage de terminaux de transbordement, une réduction des temps d’attentes aux passages frontaliers ferroviaires, une vitesse minimale de 160km/h pour le transport de passagers, la possibilité de transporter des camions par train sur l’ensemble du réseau, des aires de stationnement sécurisées et équipées d’infrastructures de carburant alternatifs pour les chauffeurs commerciaux ou encore des obligations sur la disponibilité des infrastructures de recharge et de ravitaillement. La Commission prévoit également la création de "neuf corridors de transport européens", reliant les anciens corridors de réseau central aux corridors de fret ferroviaire, qui feront l’objet d’une attention prioritaire. À noter qu’elle a également présenté une communication sur l’extension du réseau RTE-T aux pays tiers voisins.
Promouvoir le transport ferroviaire longue distance et transfrontalier de voyageurs
La Commission a également présenté un plan d’action pour développer le transport ferroviaire, longue distance et transfrontalier, de voyageurs. Il vise le doublement du trafic ferroviaire à grande vitesse d’ici 2030 (date à laquelle les "déplacements collectifs programmés" de moins de 500 km au sein de l’UE devraient être neutres en carbone), et son triplement d’ici 2050. Afin de le rendre plus attractif, la Commission plaide entre autres pour la suppression des "règles techniques et opérationnelles nationales redondantes", l’essor d’une "billettique multimodale conviviale" (une proposition législative serait déposée l’an prochain), une meilleure disponibilité du matériel roulant, la modernisation des infrastructures, la facilitation de l’accès des opérateurs à ces dernières afin de renforcer la concurrence ou encore l’introduction de transports collectifs transfrontaliers et/ou multimodaux durables, le cas échéant via des "obligations de service public". Est également annoncée l’étude d’une exonération de la TVA à l’échelle de l’Union pesant sur les billets de train.
La data pour une route plus fluide et sûre
Le paquet comprend encore une proposition de mise à jour de la directive 2010/40/UE relative aux systèmes de transport intelligents dans le transport routier, notamment afin de renforcer la mise à disposition au format numérique de données sur les routes et le trafic, comme les limitations de vitesse, les plans de circulation, les travaux routiers... L’ambition de 0 mort sur les routes en 2050 est réaffirmée. Pour y parvenir, la Commission compte notamment sur les véhicules connectés et automatisés pour "réduire les erreurs humaines".
Un nouveau cadre pour la mobilité urbaine
La Commission a enfin présenté une communication relative à un "nouveau cadre européen pour la mobilité urbaine", qui vise à lutter contre les dommages collatéraux de la mobilité en ville : congestion, émissions, bruit…. Elle y annonce la publication fin 2022 d’une recommandation sur un programme national visant à soutenir les régions et villes dans le déploiement de plans mobilité urbaine durable (SUMP précédemment évoqués) "améliorés", qui devront notamment intégrer les plans de logistique urbaine durable (PLUD, ou SULP). La Commission entend également encourager la coopération avec la Convention des maires pour le climat et l'énergie afin d’aligner ces SUMP avec les plans d’action pour l’énergie durable et le climat (SECAP) – que les signataires de la Convention des maires s’engagent à mettre en œuvre dans les deux ans (86 plans de collectivités françaises acceptés ou en cours d’évaluation sont recensés) - et de compléter et rationaliser son guide sur ces SUMP. Les projets s’appuyant sur ces derniers seraient également prioritaires pour l’obtention de certains financements, comme ceux du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe ou d’Horizon Europe.
La Commission y prône notamment un renforcement du réseau de transports publics – elle entend "travailler avec les administrations nationales et locales […] pour garantir que cette forme de transport reste l’épine dorsale de la mobilité urbaine et pour lutter contre les inégalités d’accès", notamment celui aux gares. Elle envisage la fourniture obligatoire des données en temps réel des opérateurs via les points d’accès nationaux ou encore que, dans le cadre du RTE-T, les nœuds urbains soient tenus de permettre aux voyageurs d’accéder à l’information, de réserver, payer et récupérer leurs billets via des services de mobilité numérique multimodale. Elle entend également proposer une initiative législative d'ici 2022 sur la fourniture et l'utilisation de données commercialement sensibles pour les services de mobilité numérique multimodale, améliorant également l'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite. Un espace européen commun de données sur la mobilité serait développé en 2022. Une étude détaillée sera entreprise la même année afin de cartographier et de préciser les solutions numériques disponibles "pour rendre plus efficaces et plus conviviales" les zones à faibles émissions et autres systèmes de régulation de l'accès des véhicules aux zones urbaines.
Elle entend également renforcer les exigences relatives à la continuité et l’accessibilité des pistes cyclables. Elle a par ailleurs publié un guide thématique SUMP dédié à l'utilisation sûre des dispositifs de micromobilité (en anglais) pour aider les planificateurs de la mobilité urbaine et les autorités locales à en assurer le déploiement et annonce préparer des règles de sécurité en la matière. Elle devrait également publier d’ici fin 2022 des orientations sur les exigences d'infrastructure de qualité pour les usagers de la route vulnérables. Par ailleurs, elle annonce l’adoption de lignes directrices en 2022 pour rendre plus durable le transport à la demande (taxis, VTC)
Elle plaide encore pour une logistique du dernier kilomètre 0 émission et l’essor des terminaux multimodaux et de centres de groupage de fret. Elle indique qu’une proposition pour réviser les normes de performance en matière d’émissions de CO2 des poids lourds sera faite d’ici fin 2022 et entend soutenir le partage volontaire de données pour améliorer l’efficacité du transport urbain de marchandise.
Signalons engin que la Commission rationalisera d’ici 2022 les indicateurs de mobilité urbaine durable déjà identifiés et l’outil de "benchmarking" associé, et lancera en 2023 un programme de soutien, dans le cadre du Mécanisme pour l’interconnexion de l’Europe, pour la collecte de données afin de suivre les progrès réalisés par les nœuds urbains du réseau RTE-T.