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Offre de soins critiques : le gouvernement se prépare à la prochaine crise sanitaire

Olivier Véran a présenté aux acteurs de l'hospitalisation la feuille de route visant à "tirer les enseignements de la crise sanitaire afin de renforcer la filière de soins critiques" et de "mieux affronter les crises de demain". Celle-ci s'appuie sur un rapport de l'Igas, qui ne préconise par une augmentation massive du nombre de lits installés mais avant tout une "élasticité maximale de l'offre" pour mieux faire face aux variations.

Tirer les leçons de la pandémie de Covid-19 et préparer la prochaine crise sanitaire : Olivier Véran a réuni, le 10 mars, les acteurs de l'hospitalisation publique et privée, afin de leur présenter la "feuille de route sur les soins critiques 2022-2025". Celle-ci s'appuie sur le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) consacré au sujet et sur la concertation qui s'en est suivie. L'objectif de la feuille de route est notamment de "renforcer la filière de soins critiques en France et de l'armer pour mieux affronter les crises sanitaires de demain".

L'Igas estime le besoin à pas plus de 500 lits supplémentaires d'ici à 2030

Intitulé "L'offre de soins critiques, réponse au besoin courant et aux situations sanitaires exceptionnelles", le rapport de l'Igas a été remis en juillet 2021, mais est rendu public en même temps que la feuille de route. Il rappelle que le lancement de la réforme des soins critiques est antérieur à la pandémie de Covid-19, puisqu'il remonte à 2017, avec pour objectif de "bâtir une véritable filière de soins critiques, davantage intégrée et homogène", avec une gradation à trois niveaux fondée sur les 5.081 lits de réanimation (dont disposait la France à la date du rapport) et incluant également les unités de surveillance continue (USC) et les unités de soins intensifs de spécialité (USI). Mais la crise sanitaire incite à aller plus loin et à bâtir une véritable filière des soins critiques.

Globalement, l'Igas conclut "que l'accroissement prévisible des besoins de réanimation, lié principalement au vieillissement démographique, n'appelle pas d'augmentation massive du nombre de lits installés mais suppose en premier lieu de renforcer la fluidité des parcours des patients". Il s'agit en l'occurrence de fluidifier le parcours des patients en amont et en aval, afin de répondre à l'accroissement prévisible des besoins, sans pour autant nécessiter une augmentation massive des capacités. Dans ce contexte, le rapport évalue au maximum à 500 lits sur l'ensemble du territoire, d'ici à 2030, l'augmentation résiduelle du nombre de lits de réanimation qui pourrait être nécessaire. Il conviendrait en outre de privilégier l'ouverture des lits déjà autorisés, mais fermés en raison d'un manque de personnel (soit environ 10% du nombre de lits ouverts). Pour cela, il faudra, en premier lieu, lever les "fortes tensions" qui pèsent aujourd'hui sur les effectifs médicaux et paramédicaux des services de réanimation.

L'Igas juge également nécessaire de renforcer le pilotage des soins critiques et la coopération entre établissements. Enfin, il convient d'aménager "une élasticité maximale de l'offre de soins critiques", afin de répondre aux variations saisonnières et aux situations sanitaires exceptionnelles. Ceci passe notamment par la mise en œuvre, prévue par la réforme de 2017, de la transformation des unités de soins critiques (USC) en unités de soins intensifs polyvalents (Usip), principalement accolées aux unités de réanimation. Dotés de plateaux de soins critiques, les lits d'Usip pourraient être convertis à tout moment en lits de réanimation supplémentaires.

Suppression de la gradation actuelle en trois niveaux

La feuille de route 2022-2025 sur les soins critiques reprend très largement les préconisations de l'Igas et les conclusions de la concertation. Prolongeant la réforme engagée en 2017, elle prévoit de réformer le cadre de fonctionnement de ces activités, avec notamment la suppression de la gradation actuelle en trois niveaux, "qui a conduit à la multiplication d'unités isolées, avec une hétérogénéité de fonctionnement, et une activité ne relevant pas toujours de soins critiques". Le nouveau cadre repose donc sur des réanimations, des unités de soins intensifs polyvalents (Usip) ou de spécialités, "ayant vocation à se constituer en plateaux de soins critiques de taille suffisante pour garantir de bonnes conditions de fonctionnement.

Par ailleurs, la feuille de route prévoit l'ouverture de "plus de 1.000 lits de réanimation et d'aval de réanimation". Conformément aux préconisations de l'Igas, il s'agit plus précisément de rouvrir environ 500 lits de réanimation déjà autorisés mais fermés en raison d'un manque de personnel et de créer environ 500 lits de "soins de rééducation post-réanimation pour améliorer la récupération des fonctionnalités par le patient après son hospitalisation en réanimation et fluidifier les parcours". Certaines régions, présentant des capacités très en-deçà des moyennes nationales, devraient bénéficier d'un "rattrapage rapide", notamment la Bretagne, les Pays de la Loire, la Guyane et Mayotte.

Un renforcement significatif des moyens humains

Sur la question des moyens humains, la feuille de route prévoit de faire bénéficier les spécialités de médecine intensive en réanimation, d'anesthésie-réanimation et de médecine péri-opératoire d'un soutien à hauteur de 400 postes sur 10 ans. Celui-ci a d'ailleurs débuté dès 2021, avec 21 postes supplémentaires de MIR (médecine intensive réanimation) et 16 postes de MAR (médecin anesthésiste-réanimateur). Dans le même temps, les ratios d'encadrement des lits spécialisés seront rehaussés, tandis que seront mis en place une formation de huit semaines pour les infirmiers arrivant en réanimation et une prime pérenne de 100 euros, à compter de janvier 2022, pour les infirmiers de réanimation. Par ailleurs, les équipes de soins critiques seront renforcées avec d'autres paramédicaux : masseurs-kinésithérapeutes, psychologues, ergothérapeutes, orthophoniste, gages d'une meilleure qualité de prise en charge. L'élaboration d'un cahier des charges national, en concertation avec les acteurs de la filière, permettra d'avoir une approche homogène tout en s'adaptant aux situations de chaque région et de chaque territoire, et de disposer d'une meilleure coordination, sous l'égide de l'ARS.

Enfin, dans la perspective de prochaines crises sanitaires, chaque établissement disposant de soins critiques devra notamment mettre en place un "plan de montée en charge de son capacitaire et de ses ressources humaines en cas de situations sanitaires exceptionnelles", ainsi qu'un volet de formation "pour constituer et maintenir sur site une réserve de professionnels de santé formés pour venir en renfort des services de soins critiques en cas de situation sanitaire exceptionnelle".