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Environnement-Transports - Notre-Dame-des-Landes : le rapporteur public demande l'annulation de quatre arrêtés autorisant les travaux

Nouveau rebondissement dans le feuilleton de l'aéroport controversé de Notre-Dame-des-Landes, que le gouvernement voulait lancer cet automne : lors de l'audience du lundi 7 novembre, le rapporteur public de la cour administrative d'appel de Nantes, la magistrate Christine Piltant, a demandé l'annulation de quatre arrêtés préfectoraux dits "loi sur l'eau" et "espèces protégées" indispensables à tout démarrage des travaux. Or l'avis du rapporteur public est généralement suivi par la justice administrative. Il faut maintenant attendre le 14 novembre à 14h00 pour connaître la décision de la cour.
La magistrate a préconisé le réaménagement de l'actuel aéroport, Nantes-Atlantique, "une alternative crédible", voire "satisfaisante", à la construction d'une nouvelle infrastructure sur le site de Notre-Dame-des-Landes, une zone humide à 98% qui abrite une centaine d'espèces protégées. Or, seule l'absence d'alternative avérée ou satisfaisante permet de déroger à la destruction d'une zone humide, ainsi qu'à la destruction et au transfert des espèces protégées, dans le cas de Notre-Dame-des-Landes pour réaliser la plateforme aéroportuaire mais aussi sa desserte routière.
Sur le long terme, ce réaménagement, dont le coût a été évalué à 825 millions d'euros pour une capacité de neuf millions de passagers, dans un rapport d'experts missionnés par la ministre de l'Environnement, Ségolène Royal, "présente des inconvénients moins dommageables" que la construction d'un nouvel aéroport, a ajouté le rapporteur public. Nantes-Atlantique n'est "pas l'aéroport idéal". Mais "peut-on vivre sans aéroport idéal ? La réponse est oui. Peut-on vivre sans eau ? La réponse est non", a lancé Christine Piltant.
Le rapporteur public a par contre demandé le rejet de trois requêtes dirigées contre un cinquième arrêté préfectoral qui déclarait d'utilité publique le programme de travaux d'aménagement et de sécurisation des voies existantes autour du futur site, dénommé "programme viaire". "Ce sont des conclusions très très motivées en droit et en faits. Ça va être d'autant plus difficile pour la cour de les contourner", a réagi Thomas Dubreuil, l'un des avocats des requérants. Dix recours au total avaient été déposés par les principales associations opposées au projet, des associations de protection de l'environnement, des agriculteurs et des particuliers.

Le volet environnemental, talon d'Achille du projet pour ses opposants

"Je suis extrêmement satisfaite d'entendre de la bouche d'une magistrate les arguments de fond qu'on développe depuis si longtemps et en vain", a déclaré Françoise Verchère, l'une des requérantes, ancienne élue (Front de gauche) de Bouguenais, où est situé l'actuel aéroport nantais. "Pas de triomphalisme" pour autant, "la cour peut tout à fait décider d'autre chose", a-t-elle nuancé.
"Il serait prématuré d'en envisager les conséquences", a estimé dans un communiqué le préfet de Loire-Atlantique, Henri-Michel Comet, également préfet de région, qui réunissait lundi après-midi les collectivités finançant le projet et son concessionnaire, une filiale de Vinci, pour faire le point sur le projet de transfert de l'actuel aéroport vers Notre-Dame-des-Landes, "à la demande du Premier ministre" Manuel Valls. Les électeurs du département ont voté le 26 juin à plus de 55% pour dire "oui" au projet, qui "a fait, à ce jour, l'objet de 168 décisions de justice favorables", a rappelé le préfet.
Pour les opposants, le volet environnemental est le talon d'Achille du projet. Ils dénoncent notamment l'insuffisance des mesures prises par le concessionnaire du site, Aéroports du Grand Ouest (AGO), pour compenser la destruction des espaces naturels et des espèces qui y vivent, et l'absence de garantie sur leur efficacité.
En première instance, le 17 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes avait validé la méthode de compensation environnementale prévue dans le projet d'aéroport, considérant qu'elle ne portait pas atteinte à l'état de conservation des espèces et à la qualité de l'eau. La majeure partie des requérants avaient fait appel de ces jugements, à l'exception d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV).
Les travaux préalables à la construction de l'aéroport, déclaré d'utilité publique en 2008, sont suspendus depuis les dernières tentatives d'expulsion des occupants du site, à l'automne 2012, retardant sine die une ouverture, initialement prévue en 2017, de la nouvelle infrastructure, à une vingtaine de kilomètres au nord de Nantes.