New Deal Mobile : malgré des avancées tangibles, le plus dur reste à faire
À l’occasion des 4 ans du New Deal Mobile, la Fédération française des télécoms s’est félicitée du succès de ce programme visant à accélérer la couverture 4G du territoire. Le bilan sur la migration vers la 4G est cependant nettement plus flatteur que celui de la couverture ciblée avec à peine 1.115 sites livrés.
En janvier 2018, l’État signait avec les quatre opérateurs de téléphonie mobile, le "New Deal Mobile", accord au terme duquel ils s’engageaient à accélérer la couverture mobile 4G moyennant la renonciation de l’État à quelques 3 milliards d’euros de licences 4G. À mi-parcours d’un programme s’étendant jusqu’à 2026, la Fédération française des télécoms s’est fendue d’un communiqué pour saluer "un pari réussi".
98% des sites en 4G
Ainsi selon les données de la fédération - plus actualisées que le dernier tableau de bord du New Deal Mobile de l’Arcep - 98% des sites des opérateurs mobiles sont en 4G, représentant 91.305 antennes et 37.394 sites 4G. La totalité des sites 3G ont notamment basculé en 4G comme les opérateurs s’y étaient engagés. En outre, le taux de couverture 4G des axes routiers prioritaires serait supérieur à 99%. Côté couverture ciblée - où les sites sont négociés localement avec les élus et font l’objet d’un arrêté donnant un délai maximal de deux ans à l’opérateur chef de file pour construire le site - les chiffres sont en revanche moins impressionnants. On rappellera que l’accord prévoyait que chaque opérateur déploie 5.000 sites, dont 2.000 sites en zone blanche, soit environ 14.000 sites au total, déduction faite des sites mutualisés entre les quatre opérateurs. Or à ce jour, seulement 1.115 sites ont été livrés sur les quelque 3.500 emplacements validés par le gouvernement début 2022.
Les zones grises en suspens
Des sites dont la particularité est d’être en zone blanche pour "98% d’entre eux", nous précise la FFTélécom. Or à bien des égards ils sont plus faciles à déployer. Non seulement ils arrivent dans des zones où l’internet mobile était impraticable, mais en plus les quatre opérateurs y mutualisent le pylône comme les équipements actifs, selon le principe dit de RAN-Sharing. Pour les zones grises, où au moins l’un des quatre opérateurs est déjà présent, c’est une autre histoire. Les habitants et les élus voient d’un très mauvais œil l’arrivée d’un nouveau pylône quand il en existe déjà. Officiellement, la mutualisation des équipements passifs est vivement encouragée pour la 4G et obligatoire pour la 5G. Une réponse ministérielle du 13 janvier 2022 à une question du sénateur de l’Oise Édouard Courtial vient de le réaffirmer. Le ministère de la Cohésion du territoire explique en effet que "les opérateurs doivent privilégier toute solution de partage avec un pylône existant, veiller à ce que l'accueil ultérieur d'opérateurs soit rendu possible ou encore répondre aux demandes raisonnables de partage de ces pylônes émanant d'autres opérateurs, sous réserve de la faisabilité technique de cette mutualisation".
Une mutualisation pas toujours possible ?
Mais tout est dans "la faisabilité technique". "Les opérateurs y sont favorables", assure Olivier Riffard directeur des affaires publiques à la FFTélécom avant de préciser que le site doit pouvoir "s’insérer dans le réseau global de l’opérateur chef de file" tout en répondant aux besoins des autres opérateurs. Les pylônes existants ne sont par ailleurs "pas tous en capacité d’accueillir d’autres équipements". Quant à rehausser les antennes, notamment pour pouvoir installer des faisceaux hertziens quand il n’y a pas de fibre pour la raccorder au réseau, ce n’est pas toujours faisable. Néanmoins, n’en déplaise à la FFTélécom, la mutualisation apparaît comme largement perfectible comme l’a estimé la Cour des comptes dans une enquête demandée par le Sénat. Ce constat a du reste conduit les sénateurs à intégrer dans la loi sur le numérique environnemental (notre article du 30 septembre 2021) l’information des maires sur les raisons ayant poussé un opérateur à ne pas mutualiser. Un pis-aller faute de pouvoir formellement obliger à la mutualisation dans un pays qui a fait le choix de la concurrence par les infrastructures.
Alerte sur la zone littorale
Enfin, la couverture des zones littorales serait "vraiment problématique". La loi littorale impose en effet que les nouvelles constructions soient situées dans la continuité des zones urbaines existantes comme l’a encore rappelé encore le Conseil d’État, le 11 juin 2021, au sujet d’un projet concernant une commune du Finistère. Une contrainte qui n’est pas forcément compatible avec l’objectif d’améliorer la couverture dans les zones touristiques et côtières. "Nous estimons que plusieurs centaines de projets sont bloqués pour cette raison", confie l’expert de la fédération. La FFTélecom souhaite qu’un aménagement législatif soit adopté dans le même esprit que ce qui a été voté lors de la dernière loi montagne. Pour le moment, toutes les tentatives d’y remédier ont avorté mais la fédération ne désespère pas d’y arriver.
Des communes qui retombent en zone blanche
Une centaine de communes pourraient retomber en zone blanche alerte la FFTélécom. Ces communes sont celles qui ont accepté la reprise d’un bail concernant une antenne de téléphonie mobile par une société foncière leur promettant un loyer mirobolant. Des loyers que ne sont cependant pas prêts à payer les opérateurs et qui pourraient conduire ces derniers à quitter le site… Un phénomène qui a conduit les sénateurs à exiger que ces sociétés fournissent la preuve aux élus qu’elles sont bien mandatées par un opérateur. Le texte n’est cependant pas rétroactif.