Naufrage programmé pour l’artisanat du bâtiment

Lors de la présentation de ses chiffres 2024, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) a fait état d’une activité en baisse de 3,9% et réagi avec virulence à la stratégie gouvernementale, qui "ignore le potentiel" de la rénovation énergétique. Chez les artisans, l’inquiétude grimpe.

Il n’y avait pas beaucoup de suspense quant à l’issue de l’année 2024 pour les artisans du bâtiment en France. Devant la presse mardi 21 janvier, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) a révélé que le secteur signait, au quatrième trimestre 2024, son septième trimestre de baisse consécutive d’activité. L’année s’achève ainsi avec un recul moyen de -3,9% du volume d’activité, avec une contribution largement négative de la construction neuve (-8,5 % sur l’année en moyenne). L’entretien-amélioration, pourtant plus résilient, recule également et termine l’année sur une tendance moyenne de -1 %. Les travaux de performance énergétique ne permettent pas de redresser cette tendance générale : ils reculent également, avec -0,5% sur l’année. 

Des difficultés qui se retrouvent à l’échelle régionale, où toutes les zones, à l’exception de l’Île-de-France, font face à une accélération du recul d’activité. Les régions Bourgogne-Franche-Comté et Pays de la Loire sont particulièrement affectées, avec des baisses atteignant respectivement 8% et 7%. Le recul de l’activité en glissement annuel demeure relativement plus contenu en région Hauts-de-France (-4,5%), Bretagne, Grand Est et Occitanie (-5,5%). 

Des perspectives incertaines

L’artisanat du bâtiment débute ainsi 2025 dans un contexte de fragilité économique. "L’absence de budget voté pénalise le secteur en empêchant l’entrée de vigueur des mesures de simplification, de lutte contre la fraude et l’accès aux aides à la rénovation énergétique", a estimé la Capeb. Si les perspectives restent incertaines, la capacité du secteur à se réinventer doit également pouvoir "s’appuyer sur une politique du logement qui prend en compte les spécificités des entreprises artisanales pour répondre aux besoins du marché et redynamiser une activité en berne".

La Capeb a en outre déploré que le gouvernement ne "concentre ses efforts que sur la construction neuve", une stratégie qui serait loin d’être à la hauteur des besoins. "Selon l’Ademe, le parc de logements neufs nécessaire se situe entre 120.000 et 350.000 unités par an. Avec 330.900 autorisations et 258.500 mises en chantier prévues pour 2025, nous estimons que l’effort de construction neuve est déjà dans les fourchettes des besoins identifiés. Les réservations de logements sont nettement inférieures aux mises en vente de logements neufs, ce qui interroge sur une politique qui continue de porter uniquement sur la construction neuve."

Coup de rabot sur MaPrimeRénov : une "faute politique"

La rénovation offrirait pourtant un potentiel relativement considérable de logements : 11 millions de logements, soit un tiers du parc français, se trouvent en effet dans le bâti ancien ou patrimonial. Dans le même temps, 5,8 millions de passoires thermiques sont comptabilisées sur le territoire. 

“Au lieu d’agir dans ce sens, le gouvernement fait le choix d’amputer fortement les moyens dédiés à MaPrimeRénov’ pour réduire les dépenses de l’État. C’est une faute politique qui va aggraver la situation déjà fragile des TPE du bâtiment et qui va passer à côté des besoins réels des Français”, a dénoncé la Capeb. 

"Un défi sociétal et environnemental majeur est devant nous, mais nos entreprises, qui s’emploient à le relever, ne figurent toujours pas parmi les priorités nationales. À ce jour, les actes politiques ne traduisent aucune réelle compréhension des enjeux auxquels font face les artisans. Nous alertons sur l’ineptie économique et sociale d’ignorer le potentiel que représente la rénovation et de tout miser sur la construction neuve, et nous continuerons à proposer des solutions. Il est désormais impératif de les mettre en œuvre", a conclu Jean-Christophe Repon, président de la Capeb.

 

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