Culture - Musée des Tissus de Lyon : dans la guerre entre collectivités, la région rafle la mise
Le long feuilleton de la survie du musée des Tissus de Lyon, aux collections inestimables mais à la fréquentation chancelante, s'achève par un - dernier ? - coup de théâtre. Alors qu'il laissait entrevoir depuis quelques jours la perspective d'une fermeture pure et simple du musée, Emmanuel Imberton, le président de la CCI de Lyon Métropole qui est propriétaire et gestionnaire du musée, a finalement annoncé, le 9 octobre, qu'il cédait le musée à la région Auvergne-Rhône-Alpes pour un euro symbolique, écartant ainsi la proposition de la ville et de la métropole de Lyon.
Deux projets concurrents
La CCI estime n'avoir plus les moyens, depuis 2014, de financer un musée qui abrite l'une des plus riches collections de tissus au monde avec environ 2,5 millions de pièces. Un accord semblait avoir été trouvé en 2016 entre l'Etat, la région Auvergne-Rhône-Alpes, la métropole de Lyon et la ville de Lyon, afin de sauver l'établissement, déjà au bord de la fermeture (voir notre article ci-dessous du 11 mars 2016). Mais l'accord n'aura pas résisté longtemps face aux tensions entre collectivités, qui portaient des projets concurrents et difficilement conciliables.
Le projet de la ville et de la métropole prévoyait, pour un investissement de l'ordre de 15 à 18 millions d'euros, de transférer le musée dans les locaux contigus de l'actuel musée des Arts décoratifs dans l'hôtel Lacroix-Laval et de céder l'hôtel de Villeroy, siège actuel du musée des tissus, pour financer l'opération. Dans ce projet, une bonne partie des collections aurait été transférée à d'autres musées lyonnais, comme celui des Beaux-Arts et le musée des Confluences, ce qui pouvait apparaître comme un démembrement.
Le projet de la région Auvergne-Rhône-Alpes, finalement retenu, est radicalement différent. Il prévoit de maintenir la configuration actuelle du musée, tout en modernisant les lieux et la présentation des collections. Le musée devrait également s'ouvrir davantage sur la cité, en accueillant des expositions, des événements et des spectacles, mais aussi en hébergeant des artistes en résidence.
Une rénovation à 30 millions d'euros
En contrepartie de l'euro symbolique, la région s'engage à investir dix millions d'euros pour la rénovation et le réaménagement des lieux, puis à apporter un million d'euros par an pour le fonctionnement. L'euro n'est toutefois pas totalement symbolique, puisque la région devient, du même coup, propriétaire des deux hôtels particuliers de Lacroix-Laval et de Villeroy, cédés par la CCI et dont la valeur est estimée à 16 millions d'euros.
Dans un communiqué du 9 octobre, Laurent Wauquiez précise qu'"une rénovation sera engagée à hauteur de 30 millions d'euros". En tenant compte des 10 millions de la région, de 5 millions apportés par l'Etat et d'un million provenant d'Unitex (l'association des industries du textile), il reste donc 14 millions d'euros à trouver, "la ville et la métropole n'ayant pas, pour le moment, souhaité s'engager dans ce projet".
Selon le président de la région, ce financement complémentaire "sera trouvé auprès de mécènes et grâce à une opération de crowdfunding". Le communiqué de Laurent Wauquiez précise aussi qu'une association de préfiguration du nouveau musée sera rapidement mise sur pied et que "des travaux pourraient démarrer dès 2019 pour donner un nouvel élan aux collections de l'établissement, notamment grâce à une muséographie modernisée, l'ouverture d'un restaurant, et des évènements en partenariat avec des grandes institutions de niveau international".