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Montée en puissance des "groupements de prévention agréés" : des retraités bénévoles au chevet des entreprises en difficulté

Créés au milieu des années 1980, les groupements de prévention agréés fonctionnent à plein régime avec la crise du coronavirus, déployant leurs conseils pour aider les entreprises en difficulté à éviter la liquidation. S'appuyant sur l'expérience réussie du Centre-Val de Loire, Régions de France et la CPME proposent à toutes les régions de soutenir ce dispositif qui fait appel à des retraités bénévoles.

"En période ordinaire, les groupements de prévention agréés (GPA) travaillent un quart du temps, là, avec la crise du coronavirus, ils travaillent cinq jours sur sept." Comme l'indique à Localtis François Bonneau, président de la région Centre-Val de Loire et président-délégué de Régions de France, l'épidémie du coronavirus et la multiplication des difficultés économiques et financières pour les entreprises ont provoqué une accélération du recours aux GPA. Ces modes d'intervention existent pourtant depuis de nombreuses années. Les GPA ont ainsi été créés dans le cadre de la loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises.

Ils sont constitués en association et composés de retraités bénévoles, anciens banquiers, avocats, chefs d'entreprise ou experts comptables... Leur intervention répond à des informations données par des "lanceurs d'alerte". "Nous avons créé des conventions avec par exemple l'Urssaf, qui, avant de déclencher un recouvrement, propose à l'entreprise d'entrer en contact avec un GPA", explique Bernard Hibert, président de la CPME du Centre-Val de Loire.

Une fois sollicité par une entreprise, le GPA dresse un diagnostic économique en toute bienveillance, qui va rendre compte de la gestion du personnel de l'entreprise, de son environnement économique, son marché, de la concurrence, et de ses difficultés. Il préconise ensuite l'intervention d'un expert et émet des recommandations pour améliorer le fonctionnement et la situation économique et financière de l'entreprise concernée. Un outil de médiation qui couvre tous les secteurs et toutes les formes de sociétés, des PME aux artisans, en passant par les commerçants et les startups. Objectif : éviter aux entreprises l'écueil des enrôlements aux tribunaux de commerce.

"La sinistralité des entreprises est un business"

Principale différence avec d'autres réseaux comme les chambres consulaires, par exemple, qui traitent aussi de ces sujets auprès des chefs d'entreprise : leur composition. "Ce sont tous des retraités bénévoles qui mettent leur expertise au service d'une entreprise, ils lui offrent une expérience éclairée, à 360°, qui va être tout de suite vécue par le chef d'entreprise comme une source de conseils et de soutiens", détaille François Bonneau. Pour Bernard Hibert, la spécificité des GPA tient aussi à leur caractère désintéressé. "Des auxiliaires de justice vivent de cette activité, tout comme des administrateurs, des mandataires judiciaires… La sinistralité des entreprises est un business", explique-t-il, précisant que 80% des enrôlements en France se terminent par une liquidation. "Nous avons étudié ce phénomène durant la crise de 2008 considérant qu'il n'était pas possible que l'on ne puisse pas sauver des entreprises, et qu'il ne fallait pas confondre toutes les situations", souligne Bernard Hibert.

Après une expérience réussie du GPA de Loir-et-Cher, et au moment où les régions ont été confortées dans leur compétence de développement économique dans le cadre de la loi Notr du 7 août 2015, la région Centre-Val de Loire a décidé de généraliser le dispositif.

Au total, en 2019, quelque 500 entreprises ont été accompagnées par les six GPA de la région : une majorité d'entre elles (72%) sont toujours en activité, 28% sont quant à elles accompagnées vers une liquidation, un redressement ou une transmission/vente. Avec la crise du coronavirus, les GPA s'attendent à une très forte poussée, avec déjà 850 à 900 entreprises accompagnées en 2020. 48% des entreprises accompagnées comptent entre un et neuf salariés, 38% de zéro à un et 14% plus de dix. Les principaux secteurs sont le bâtiment (25%), le commerce (20%), l'industrie (18%) et les services (15%). En Loir-et-Cher, 547 emplois ont été sauvés par ce biais en 2019. Et sur les 79 entreprises reçues par le GPA, 81% sont toujours viables.

Une généralisation des GPA à toutes les régions

La région soutient les GPA à hauteur de 20.000 euros par an par GPA pour participer à 50% aux frais de fonctionnement. Un budget qui pourrait évoluer à l'issue de la crise, étant donné l'implication des GPA. Le dispositif est en cours de déploiement dans d'autres régions : la Provence-Alpes-Côte d'Azur, Grand Est mais aussi les Pays de la Loire, les Hauts-de-France et l'Occitanie.

Et le dispositif pourrait bientôt concerner toutes les régions de France : dans un communiqué du 20 avril 2020, Régions de France et la CPME proposent ainsi aux régions de soutenir financièrement, à l'image du Centre-Val de Loire, ces groupements. "Cela pourrait permettre une généralisation des GPA sur tout le territoire, mais aussi une harmonisation des actions car actuellement certaines régions ont peu doté les GPA", détaille Bernard Hibert.

Pour François Bonneau, leur action est complémentaire des autres dispositifs existants et de ceux qui ont été spécifiquement créés dans le cadre de la crise du coronavirus. "Nous intégrons cette offre de suivi dans nos dispositifs, souligne-t-il, chaque semaine, l'équipe de notre agence de développement économique contacte les entreprises du territoire et selon les besoins oriente vers les GPA."