Missions locales : l'hypothèse de la fusion avec Pôle emploi s'éloigne
Les missions locales ne seront pas fusionnées avec Pôle emploi, même à titre expérimental. C'est ce que pense Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales. Un temps avancée par le gouvernement, l'hypothèse ayant suscité de multiples oppositions n'est pas abordée par le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales évaluant le partenariat renforcé entre Pôle emploi et le réseau.
L'hypothèse, un temps avancée par le gouvernement, de fusionner des missions locales avec Pôle emploi ne semble plus d'actualité. C'est en tout cas l'avis de Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML), qui organise jusqu'au 22 mars 2019 la Semaine nationale des missions locales. "Je crois que nous avons fermé ce chapitre malheureux de la possibilité d'une fusion avec Pôle emploi", indique-t-il à Localtis. Et le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l'évaluation du partenariat renforcé entre Pôle emploi et les missions locales, mis en ligne le 15 mars 2019 (à télécharger ci-dessous), semble confirmer ses propos. Si le rapport aborde la question de la fusion entre missions locales de petite taille, il s'en tient à la "mise en commun d'activités" entre missions locales et agences de Pôle emploi. Les deux pouvant aller jusqu'à la constitution de groupement d'intérêt public (GIP) locaux et les expérimentations dans ce sens pouvant faire l'objet d'incitations financières.
"Ma mission locale, j'y viens, j'y tiens !"
Le gouvernement avait pourtant émis l'idée d'expérimenter la fusion des structures des missions locales au sein de Pôle emploi, au sein de collectivités territoriales volontaires. L'annonce, faite par le Premier ministre en juillet 2018, avait été confirmée par la diffusion fin septembre d'une note du ministère du Travail détaillant les modalités pour mener à bien ces expérimentations. Mais face aux oppositions qui se sont multipliées, de la part de l'UNML, de l'Association régionale des missions locales (ARML), mais aussi de l'Association des maires de France (AMF) et des régions, à travers une pétition "Ma mission locale, j'y viens, j'y tiens !", le gouvernement a renoncé à avancer. "Nous avons été surpris de la réaction des élus locaux ; ils étaient tous contre cette disposition et sont montés au créneau, Laurent Wauquiez, Xavier Bertrand… C'est devenu un objet de contestation du gouvernement." Les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Hauts-de-France ont en effet demandé au gouvernement de clarifier ses intentions et de garantir l'avenir du réseau des missions locales. La Nouvelle-Aquitaine a quant à elle adopté une motion mentionnant l'inquiétude des élus à ce sujet face à l'impact sur l'avenir des jeunes les plus en difficulté et leur opposition à tout projet d'expérimentation de fusion.
Un travail de dentelle très utile sur les territoires
Pas d'expérimentation de fusions, donc, pour les missions locales et un budget en légère baisse de 1,1% pour 2019. "Nous aurons 350 millions d'euros en tout, il y a un peu de tension mais les crédits sont bien prévus", rassure Jean-Patrick Gille. En intégrant l'ensemble des enveloppes qui participent au financement des missions locales (garantie jeunes, développement du parrainage notamment), au-delà de la participation de l'État qui correspond à 52% de leur fonds, leur budget s'établit pour 2019 à 356 millions d'euros.
"Avec plus de 6.000 points d'accueil, notre réseau dispose d'une grande capillarité, précise Jean-Patrick Gille. Nous avons développé tout ce qu'il faut pour l'accompagnement global des jeunes mais aussi pour aider les entreprises du territoire. Nous pouvons faire un travail de dentelle très utile sur les territoires." Un travail permettant de mettre à niveau les jeunes sans emploi ni formation pour leur permettre de présenter leurs candidatures aux entreprises en recherche d'employés. Pour ce faire, les missions locales utilisent tous les dispositifs disponibles, dont la garantie jeunes, l'apprentissage, mais aussi le plan d'investissement dans les compétences (PIC). "Nous avions été un peu écartés du plan 500.000 formations. Là, les missions locales sont rentrées dans la mécanique avec un objectif d'un million de jeunes clairement indiqué d'ici 2022 ; nous allons jouer le jeu à fond."
88% des jeunes satisfaits des services des missions locales
Reste une éventualité à débattre avec le gouvernement : la possibilité d'élargir à 16-29 ans la cible des missions locales (contre 16-25 ans actuellement), à l'image des contrats d'apprentissage maintenant accessibles aux jeunes jusqu'à 29 ans révolus, dans le cadre de la loi Avenir professionnel. "Nous n'avons pas encore avancé sur ce sujet, mais certaines missions le font déjà".
Quoi qu'il en soit, les jeunes concernés pour le moment par les missions locales sont satisfaits de l'accompagnement qu'elles leur procurent. Selon l'enquête menée auprès de 20.000 d'entre eux et publiée à l'occasion de la Semaine nationale des missions locales, 88% des jeunes usagers des missions locales sont satisfaits, dont 32% très satisfaits des services proposés. 93% des jeunes qualifient leur relation avec leur conseiller référent de très positive et 71% déclarent avoir pris confiance en eux lors de leur accompagnement en mission locale, un chiffre en augmentation de 5 points sur un an. Trois points forts des missions locales sont particulièrement appréciés : leur ancrage local, leur approche globale mais aussi leur fonction de "porte d'entrée unique" pour répondre à leurs attentes liées à leur insertion professionnelle.
L'Igas évalue le partenariat renforcé entre les missions locales et Pôle emploi
Rédigé en décembre 2018 mais rendu public le 15 mars 2019, le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l'évaluation du partenariat renforcé entre Pôle emploi et les missions locales, propose plusieurs axes de collaboration entre les deux parties prenantes pour "franchir une nouvelle étape", dont, au niveau national : la généralisation de l'outil de prescription de formations Oui'form, actuellement en cours ; la création d'une application numérique facilitant l'inscription des jeunes à distance, que ce soit à Pôle emploi, dans une mission locale, ou dans les deux, selon des modalités identiques pour tous ; l'articulation entre la prise en charge socioprofessionnelle proposée par les missions locales et l'accompagnement global mis en place par Pôle emploi avec les conseils départementaux. Au niveau local, le rapport propose de lancer des expérimentations pour favoriser la mise en place de prestations cogérées et d'ateliers coanimés, la création d'un outil commun de prescription de l'ensemble des offres de service des partenaires, mutualisant leurs offres de service et la construction d'une offre de service commune socle, "ainsi que la tenue de permanences de conseillers de Pôle emploi dans les points d'accueil des missions locales, en particulier dans les zones rurales". En matière de financement, elle propose de moduler les crédits versés par Pôle emploi aux missions locales en fonction des critères de performance de la convention pluriannuelle d'objectifs.
En revanche, le rapport reste très prudent sur les expérimentations de fusions pourtant annoncées par le gouvernement en juillet 2018 entre des missions locales et Pôle emploi, pour les collectivités territoriales volontaires. Le rapport propose simplement qu'une part significative des crédits soit réservée à la mise en œuvre de fusions entre missions locales de trop petite taille d'une part, et d'autre part à la mise en commun d'activités entre missions locales et agences Pôle emploi".
Par ailleurs, le rapport estime que la gouvernance du partenariat renforcé n'est pas suffisamment structurée et outillée pour permettre un pilotage et un suivi efficaces de l'accord. "Le comité stratégique, qui réunit la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), l’Union nationale des missions locales (UNML) et Pôle emploi, dont le nombre annuel de réunions a décru fortement au fil du temps, n’a pas pris la mesure de ses missions et a centré ses travaux exclusivement sur le suivi comptable du déploiement de l’accord, la répartition de l’enveloppe financière régionale et infrarégionale, l’impulsion des laborieuses améliorations dans les échanges entre les systèmes d'information et le suivi d'un tableau de bord dont seuls six des onze indicateurs sont renseignés", souligne le document. À l'inverse, le rapport signale que les acteurs locaux se sont largement impliqués dans la déclinaison territoriale du partenariat. "La conclusion de projets locaux de coopération a été quasi-généralisée", précise le rapport.