Littoral - Menaces face à la mer : comment organiser le repli ?
Organiser le repli des habitations face à la mer, c'est l'objectif de l'appel à projets sur la relocalisation des activités et des biens lancé en mars 2012, en conformité avec la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte. Sept sites présentant des morphologies différentes avaient été retenus en décembre 2012 : Lacanau (Gironde), La Teste-de-Buch (Gironde), Labenne (Landes), Ault (Somme), Vias (Hérault), Hyères (Var) et Petit Bourg (Guadeloupe). Le GIP (Groupement d'intérêt public, ndlr) Littoral Aquitain a travaillé sur trois sites : Lacanau (Gironde), La Teste (Gironde) et Labenne (Landes). Il est sûrement le plus avancé dans ses réflexions et ses propositions. D'autant que l'hiver 2013-2014, particulièrement dévastateur pour la côte Atlantique, a montré l'urgence d'intervenir sur ces sites.
Faire participer les propriétaires
Le premier problème identifié par le GIP : la suppression des biens. "On ne sait pas déconstruire préventivement des biens privés menacés à court, moyen ou long terme sur les côtes sableuses. Il n'y a ni obligation du propriétaire de le faire, ni dispositif opérationnel adapté permettant une appropriation publique", souligne l'étude. "Le fonds Barnier intervient pour les côtes rocheuses, mais il ne fonctionne pas pour les risques d'érosion sur les côtes sableuses. L'expropriation est inapplicable car les biens visés ont actuellement une valeur financière trop importante. Il n'existe donc pas aujourd'hui d'outils appropriés ni financièrement, ni juridiquement pour nous permettre d'intervenir", explique Arnaud Gueguen, chargé de mission au GIP.
Le GIP littoral avance deux propositions. La première : faire participer les propriétaires aux frais de protection. Pour l'instant, la puissance publique prend en charge l'ensemble des frais des constructions d'ouvrages défensifs, sans contrepartie. Le GIP propose que le propriétaire cède la nue-propriété des biens protégés, tout en conservant l'usufruit. Deuxième piste : la décote des biens. "Grâce aux cartes d'aléa, on peut prévoir aujourd'hui à quel moment les biens menacés seront submergés. L'idée est de monétariser le temps qu'il reste. Par exemple, si un bien a 30 ans de vie, il perd 1/30e de sa valeur par an", développe le chargé de mission.
Prévoir des transferts d'urbanisation
Seconde difficulté : la réimplantation des biens. "En l'état actuel du droit, il est impossible de reconstruire un bâtiment à vocation commerciale menacé d'érosion, en le repositionnant quelques dizaines de mètres en arrière dans une position moins vulnérable, car cela contreviendrait au principe de continuité de la loi Littoral (article L.146-4 du CU)", souligne l'étude, en se basant sur l'exemple de Lacanau (un restaurant et un club de surf concerné). "Le permis de construire est nécessaire même pour des activités mobiles. Nous demandons donc de pouvoir prévoir dans la loi des transferts d'urbanisation à capacité constante", explique le chargé de mission.
Petit-Bourg : reconstruire en arrière littoral
Parmi les sept communes retenues, l'une se situe en outre-mer : Petit-Bourg en Guadeloupe. L'île est confrontée au problème des constructions illicites (8.000) bâties sans permis de construire dans la zone des 50 pas géométriques. "C'est un héritage de la fin de l'esclavage et une régularisation est en cours depuis 1996 pour les constructions antérieures à cette date", précise Mélanie Arnaudies, chargée de mission à l'agence des 50 pas géométriques. Exception depuis 2010 : les constructions en zone rouge au plan de protection des risques (inondation, mouvement de terrain ou submersion par la houle cyclonique). Sur l'ensemble de l'île, 2.000 habitations doivent ainsi être relocalisées.
A Petit-Bourg, 100 habitations situées sur des falaises argileuses sont menacées à court terme par des mouvements de terrain. "Elles sont pour beaucoup occupées par des personnes âgées difficiles à déplacer", souligne la chargée de mission. L'idée de la commune est de réfléchir à l'échelle globale de son PLU en prévoyant à long terme de redéployer son centre bourg en arrière du littoral. Ce nouvel écoquartier, bâti sur des zones naturelles agricoles non exploitées, permettrait dans un premier temps de reloger les habitants des maisons menacées par l'érosion.