Lyon-Turin : près de 60 parlementaires appellent le président de la République à ne plus tergiverser

Près de 60 parlementaires de tous courants politiques lancent un appel au président de la République pour lever les obstacles français au Lyon-Turin. Les inquiétudes grandissent alors que le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures propose de repousser la mise en service des voies nouvelles de la section française et que la déclaration d'utilité publique arrive à échéance en 2028.

"Monsieur le Président, le Lyon-Turin, c’est maintenant !" C’est par cette interpellation que 57 parlementaires de tous courants politiques, dont l’ancien ministre de la Cohésion des territoires Joël Giraud, exhortent Emmanuel Macron à "donner une puissante impulsion politique afin de lever les pesanteurs politico-administratives qui freinent ce programme phare du pacte vert européen".

Une DUP en voie d’extinction

Le temps presse, estiment les élus. Le Comité pour la Transalpine met en avant "le risque d’extinction de la déclaration d’utilité publique" (DUP) de la section française (voir notre article du 28 août 2013), qui arrive à échéance en 2028 et qui n’a à ce jour "pas été suivie de décisions permettant sa traduction opérationnelle". Une perspective qui leur semble d’autant plus aberrante que le coup est déjà, en partie, parti. "Le tunnel de 57,5 km en cours de creusement sous les Alpes [le comité évoque plus de 30 km de galeries déjà creusées] est irréversible et sera livré à l’horizon 2032. En toute logique, l’Italie a pris les décisions pour livrer ses voies d’accès à l’ouvrage en même temps", soulignent les parlementaires. Pour eux, "la première urgence est de lancer au plus vite les études d’avant-projet détaillé de la section française sans lesquelles la DUP ne sera pas prolongée".

Le coût de l’attente

Le Comité pour la Transalpine souligne également le risque "de rater d’importants financements européens", alors que "le prochain appel à projets de la Commission sera lancé en septembre 2023". "Bruxelles a été claire ces derniers mois : faute d’une décision française dans les semaines à venir, l’Italie et la France risquent de passer à côté de plusieurs centaines de millions de financements communautaires dans le cadre de la programmation 2021-2027", indique-t-il. Il observe qu’avec "un taux maximal proposé de 50%, le reste à charge pour la France serait seulement de 10 millions d’euros par an sur 5 ans". Plus encore, il estime que "chaque année de retard au-delà de 2032 représentera un coût pour la collectivité de l’ordre de 500 millions d’euros", calcul dressé en tenant compte "de l’inflation et sur la base des avantages socio-économiques du Lyon-Turin évalués dans l’enquête publique".

Les collectivités contre le COI ?

Pour les promoteurs du dispositif, l’inquiétude grandit depuis la remise du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI - voir notre article du 24 février). "En proposant de repousser au-delà de 2045 la mise en service des voies d’accès françaises et en privilégiant durablement la ligne historique Dijon-Modane, le COI met sérieusement en péril le succès de la plus grande infrastructure européenne de mobilité bas-carbone", relèvent les parlementaires. Le Comité pour la Transalpine estime de même qu’en suivant cette voie, "les infrastructures françaises seraient un injustifiable goulet d’étranglement". Une voie qui serait selon lui par ailleurs "contestée par la quasi-totalité des élus locaux. Les six intercommunalités savoyardes traversées par la ligne Dijon-Modane, qui longe le lac du Bourget et passe au cœur de Chambéry, ont ainsi exprimé leur opposition aux propositions du COI". Les parlementaires mettent encore en avant l’exaspération des habitants des vallées et pré-vallées alpines "exposées aux lourdes nuisances des circulations routières", le Comité soulignant que le trafic y est en forte progression. 

L’Italie s’impatiente

Enfin, les parlementaires invoquent les "vives inquiétudes de nos partenaires internationaux". En tête l’Italie, avec laquelle la France a réaffirmé naguère "l’intérêt stratégique du développement coordonné et durable de la mobilité ferroviaire transalpine" dans le traité du Quirinal. Et dont le Comité rappelle qu’elle "contribue environ 10% de plus que la France (près de 800 millions d’euros), alors même que 80% de l’ouvrage sont situés en territoire français".