Lutte contre l'artificialisation des sols : une liste de 424 projets d’envergure nationale ou européenne en consultation
Coconstruite dans le cadre d’échanges nourris avec les régions, la liste des projets d’envergure nationale ou européenne qui seront retranchés de la consommation d’espace imputable aux collectivités pour la période 2021-2031 vient d’être dévoilée, ce 10 avril, avant sa mise en consultation publique. Ces projets qui totalisent à ce stade déjà 11.870 hectares - sur les 12.500 hectares du forfait national - relèvent de plusieurs domaines significatifs tels que l’énergie, les infrastructures de transport (pour moitié) et la relance industrielle (pour près d’un tiers), dans la continuité des dispositions portées par la loi Industrie verte.
Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, a dévoilé, ce 10 avril, une première liste de projets d’envergure nationale ou européenne (PENE) d’intérêt général majeur, dont la consommation d’espaces sera mutualisée dans le cadre d’un forfait national (de 12.500 hectares sur la décennie 2021-2031), de sorte à ne pas peser sur les trajectoires régionales et locales, comme le prévoit la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre du zéro artificialisation nette (ZAN). Après consultation des régions, de la nouvelle conférence régionale de gouvernance, le projet d'arrêté listant ces projets en fonction des catégories définies par la loi doit désormais être soumis à consultation du public "dans les prochains jours", et ce pendant un mois, avant une publication prévue "courant mai", précise le ministère. Un courrier vient d'être adressé en ce sens aux présidents de région. Les informations relatives à ces projets, notamment leur localisation, seront par ailleurs accessibles via une cartographie qui sera mise en ligne par le Cerema sur l’observatoire de l’artificialisation des sols.
La loi Climat et Résilience a fixé l’objectif d’atteindre le "zéro artificialisation nette des sols" en 2050, avec un objectif intermédiaire sur la période 2021-2031, de réduire de moitié le rythme de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) par rapport à la décennie précédente. La consommation d’Enaf au cours de la période de référence de la trajectoire nationale (de 2011 à 2021) a été de 243.136 ha. Sa réduction de moitié constitue l’enveloppe nationale cible pour la décennie suivante (de 2021 à 2031), soit 121.568 ha.
Deux listes distinctes en fonction du degré de maturité des projets
Les 424 projets retenus - sur les 750 projets remontés initialement par les territoires - s’articulent en réalité en deux listes. La liste 1 recense ainsi 167 projets. Ce sont les projets les plus "matures", dont les caractéristiques sont bien définies et dont le calendrier est relativement certain. Il s’agit pour moitié de projets d’infrastructures de transport, à l’exemple du controversé autoroute A69, de l’axe ferroviaire Lyon-Turin, du Canal Seine Nord Europe, de l’extension de l'aéroport de Nantes-Atlantique, du réseau de transport public du Grand Paris, du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) Bordeaux-Toulouse ou encore des aménagements des grands ports de Dunkerque ou Marseille.
La liste 2 identifie à l’inverse les projets pour lesquels les informations disponibles à ce jour ne permettent pas leur inscription en liste 1, notamment au regard d’incertitudes quant à leur nature, la réalisation effective du projet ou la consommation d’espaces qu’ils emportent sur la période 2021-2031.
Aucun projet industriel recalé
"Ces projets d’envergure, ainsi que le dispositif dans lequel ils s’inscrivent, permettent de concilier nos objectifs de transition écologique avec le développement économique et territorial", souligne le ministère. 30% d’entre eux sont d’ailleurs des projets industriels. "Aucun projet industriel n’a été refusé sur la liste, et aucun n’a été bloqué par la mise en œuvre du ZAN", insiste-t-il. Une façon de clore le débat suite aux propos du ministre Bruno Le Maire qui, lors de sa visite officielle à l’usine Renault de Sandouville, le 29 mars dernier, invitait à "(s’) interroger sur la mise en oeuvre du ZAN (…) si nous voulons dégager les terrains suffisants pour l’industrie". Pour enfoncer le clou, le ministère de la Transition écologique précise que l’arrêté "pourra faire l’objet de modifications ultérieures pour refléter des nouveaux projets qui émergeront au cours de la décennie à venir quelque soit leur nature". Cette liste a donc vocation à être actualisée régulièrement, a minima une fois par an, et "autant que de besoin" à la faveur de la connaissance de nouveaux projets. Évidemment, les trois EPR, dont les travaux doivent être lancés dans la prochaine décennie (Penly, Gravelines et Bugey) sont retenus, "avec leur assiette foncière large qui permettra aussi des aménagements associés, et à des entreprises de venir s'installer dans une visée de réindustrialisation globale de ces territoires", souligne également le ministère.
Le projet de liste de projets d’envergure nationale ou européenne d’intérêt général majeur totalise à ce stade 11.870 ha sur le forfait de 12.500 ha. Mais là encore, l'enveloppe n’est pas figée et pourra parfaitement être "dépassée". L’arrêté couvre la période 2021-2031, et certains projets sont d’ailleurs déjà en cours. En revanche, les projets qui se "décaleraient" dans le temps, après 2031, "n’ont pas vocation a être comptabilisés au titre de cet arrêté".