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Discriminations - L'ONU pointe des faiblesses dans la délégation des compétences en matière de lutte contre la discrimination raciale

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, instance de l'ONU, adresse des recommandations à l'Etat français dont celle de "prendre les mesures nécessaires" concernant le transfert de compétences de l'Etat aux collectivités pour les compétences liées à la garantie des droits des étrangers, des migrants et des mineurs non accompagnés. Une autre recommandation porte sur la production d'outils statistiques à l'échelle des collectivités. A noter que le comité évoque la "création de ghettos territoriaux" et le risque de "ségrégation raciale".

Le CERD, le comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale (en anglais : "Committee on the Elimination of Racial Discrimination"), qui veille à l'application de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre 1965, "prend note des progrès législatifs et institutionnels" accomplis par la France et formule dans ses "observations" de fin avril-début mai, un certain nombre de recommandations, dont plusieurs intéressent les collectivités locales.

Compétences déléguées par l'Etat aux collectivités - Le tout premier sujet de préoccupation du Comité porte sur le fait que les collectivités territoriales exercent "certaines compétences qui sont liées à la garantie des droits prévus par la Convention" que l'Etat français leur a déléguées, concernant les étrangers, les migrants et les mineurs non accompagnés. Le Comité recommande à l'Etat de "prendre les mesures nécessaires visant à ce que le transfert de compétences aux collectivités territoriales n'affecte pas la jouissance des droits des personnes et des groupes vulnérables protégés par la Convention et de doter les collectivités locales de la formation nécessaire et des ressources suffisantes à l'exercice des compétences lié aux obligations de l'Etat (...) et d'assurer un contrôle approprié dans ce domaine".

Données statistiques - La deuxième préoccupation du Comité porte sur la "Composition démographique de la population". Il invite l'Etat français à "poursuivre une réflexion sur l'affinement des outils lui permettant de collecter et de publier des données démographiques de la composition de sa population par collectivités territoriales". Il lui recommande également "de lui communiquer tout indicateur sur la composition de sa population ainsi que toute autre information émanant d'études socioéconomiques et de renseignements sur les langues maternelles, les langues couramment parlées, ou fondés sur les lieux de naissance ou d'origine tirés d'enquêtes sociales". Il précise que cela doit se faire "sur la base de l'auto-identification, l'anonymat et le volontariat". L'objectif tant que l'Etat "puisse évaluer la situation de sa population du point de vue de la jouissance et de l'exercice des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en condition d'égalité".

"Ghettos territoriaux" - Le CERD s'est également intéressé à la "situation des populations vivant dans les banlieues" françaises, "notamment des personnes d'origine étrangère et des non-ressortissants". Il se dit "préoccupé par le fait que la concentration de certaines populations d'origine étrangère ou de migrants dans des zones spécifiques conduit à la création de ghettos territoriaux et peut conduire à la ségrégation raciale au sens de l'article 3 de la Convention". Ledit article disant que "Les Etats parties condamnent spécialement la ségrégation raciale et l'apartheid et s'engagent à prévenir, à interdire et à éliminer sur les territoires relevant de leur juridiction toutes les pratiques de cette nature". Le Comité "encourage vivement" l'État français à "poursuivre et à renforcer sa politique et les autres mesures visant à améliorer les conditions de vie dans les banlieues des grandes villes". Il lui recommande de "surveiller constamment la situation des personnes vivant dans ces zones, d'adopter des politiques publiques ciblées et d'intensifier les mesures visant à lutter fermement contre toutes discriminations rencontrées par ces personnes dans les domaines de l'emploi, du logement, de la santé et de l'éducation".

Gens du voyage - Le Comité note avec satisfaction "les différentes mesures prises pour améliorer la condition des Gens du voyage", mais regrette notamment "le manque d'aires d'accueil en nombre suffisant" ainsi que "les difficultés d'accès aux aires d'accueil qui existent et une mise en oeuvre partielle de la loi Besson relative à l'accueil et à l'habitat des Gens du voyage". Il relève également "les difficultés et le faible taux de scolarisation des enfants des Gens du voyage". Et recommande d' "intensifier" les efforts en la matière.