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Loi Climat et résilience : ce qu'il faut retenir des mesures sur les énergies renouvelables

Le titre III "Produire et travailler" de la loi Climat et résilience du 22 août 2021 comporte un chapitre entier dédié aux énergies renouvelables. Implantation d'éoliennes, déclinaison de la programmation pluriannuelle de l'énergie par des objectifs régionaux de développement, hydroélectricité,  communautés citoyennes d'énergies renouvelables, obligation d'installer du photovoltaïque ou des toits végétalisés sur les surfaces commerciales dès 500 m2 et sur les immeubles de bureaux de plus de 1.000 m2… : récapitulatif des principales mesures intéressant les collectivités.

Titre III – Produire et travailler

Chapitre IV - Favoriser les énergies renouvelables

Possibilité pour le maire d'adresser ses observations sur l'implantation d'éoliennes (art.82). Le texte renforce la consultation des maires pour les projets éoliens terrestres dont la demande d'autorisation a été déposée plus de six mois après la promulgation de la loi. Après avoir reçu un "résumé non technique", les maires des communes d’implantation disposent d'un délai d’un mois pour envoyer leurs observations. En l'absence de réaction passé ce délai, le maire est réputé avoir renoncé à adresser ses observations. Lorsque le porteur de projet a reçu les observations dans les délais, il dispose encore d'un mois pour adresser une réponse, "en indiquant les évolutions du projet qui sont proposées pour en tenir compte".

Objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables (art.83). Le texte vise à assurer la déclinaison des objectifs nationaux de développement des énergies renouvelables en objectifs régionaux (nouveaux articles L141 5 1 et L141 5 2 du code de l’énergie). Ces "objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables" seront établis par décret pour le territoire métropolitain continental, "après concertation avec les conseils régionaux concernés", pour contribuer aux objectifs législatifs nationaux (dont celui d’atteindre 33 % d’énergies renouvelables en 2030) et ceux de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). "Ces objectifs prennent en compte les potentiels énergétiques, renouvelables et de récupération, régionaux mobilisables", précise la loi. Ce premier décret devra être pris "à compter de la première révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie mentionnée […] qui suit le 1er janvier 2023".  Pour assurer un suivi de ces objectifs "de façon partagée entre les régions et l’État", "une méthode et des indicateurs" sont définis selon des modalités fixées par décret.
Dans chaque région métropolitaine est instauré un "comité régional de l’énergie" coprésidé par le président du conseil régional et le préfet de région. La composition et les modalités de fonctionnement de cette instance seront précisées par décret mais elle devra au moins associer les communes ou groupements de communes, les départements, les autorités organisatrices de la distribution d’énergie et les gestionnaires des réseaux publics de distribution ou de transport intéressés.
Le comité sera chargé de "favoriser la concertation, en particulier avec les collectivités territoriales, sur les questions relatives à l’énergie au sein de la région". A la demande du ministre chargé de l'énergie, il aura en particulier à "élaborer une proposition d’objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables de la région", avant que le ministre ne définisse les objectifs prévus par décret. Il sera aussi "associé à la fixation ainsi qu’au suivi et à l’évaluation de la mise en œuvre des objectifs de développement des énergies renouvelables et de récupération du Sraddet [Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires] ou, en Île de France, du SRCAE [Schéma régional climat air énergie] et de son schéma régional éolien". Il aura la possibilité de "débattre et rendre des avis sur tous les sujets relatifs à l’énergie ayant un impact sur la région". Enfin, l’article introduit également une obligation de compatibilité entre les objectifs fixés par les Sraddet (et le SRCAE pour le cas francilien) et les objectifs régionaux fixés par décret et les objectifs nationaux de la PPE. La procédure de modification des schémas régionaux devra être engagée par les régions dans un délai de six mois à compter de la publication du décret relatif aux objectifs régionaux.

Développement de la filière de l'hydrogène décarboné (art.87 et 88). Le texte entend conforter le cadre de soutien, stratégique, administratif et extrabudgétaire, applicable à l’hydrogène renouvelable et bas carbone. La future loi quinquennale sur l’énergie devra préciser les objectifs de développement des énergies renouvelables et bas carbone pour l’hydrogène (en plus des objectifs de développement des énergies renouvelables pour l’électricité, la chaleur, le carburant et le gaz) pour deux périodes successives de cinq ans. En outre, l’article 87 permet aux installations de production d’hydrogène renouvelable et bas carbone produit par électrolyse de l’eau, de bénéficier de souplesses pour leur implantation sur le domaine public de l’État (à l’instar de celles d’électricité et de gaz renouvelables). L’article 88 vise, lui, à permettre aux régions, départements, communes et à la ville de Paris de participer activement au développement de la filière de l’hydrogène décarboné, tant pour l’utiliser comme carburant pour le transport public que pour décarboner l’industrie, en partenariat avec des industriels.

Hydroélectricité (art.89). Ce long article reprend une partie de la proposition de loi sur le sujet adoptée par le Sénat en avril dernier (lire notre article). En préalable à l’élaboration de la prochaine révision de la PPE, qui aura lieu lors du prochain quinquennat, le gouvernement devra évaluer "les possibilités d’augmenter la capacité installée de production d’électricité d’origine hydraulique à l’horizon 2035, y compris la part que pourraient prendre dans l’augmentation de ces capacités les installations hydrauliques dont la puissance est inférieure à 4,5 MW, ainsi que les possibilités d’augmenter les capacités installées d’installations de stockage sous forme de stations de transfert d’énergie par pompage, en tenant compte des besoins de stockage d’électricité à un horizon de moyen terme".
La politique énergétique (précisée à l’article L100 4 du code de l’énergie) a parmi ses missions celle d’encourager la production d’énergie hydraulique, notamment la petite hydroélectricité, "en veillant à maintenir la souveraineté énergétique, à garantir la sûreté des installations hydrauliques et à favoriser le stockage de l’électricité", précise encore le texte. La loi quinquennale devra porter, s’agissant des objectifs de développement de l’électricité d’origine hydraulique, "sur l’évolution des capacités de production des installations hydrauliques, autorisées et concédées […], ainsi que des stations de transfert d’électricité par pompage" (article L100-1 A). Quant à la PPE (article L141 2 du code de l’énergie), ses volets relatifs aux énergies renouvelables et à l’équilibre des réseaux devront préciser "les modalités de mise en œuvre" des objectifs de la loi quinquennale et de la politique énergétique pour les installations hydrauliques autorisées et concédées. Le volet renouvelable "évalue, à titre indicatif, les capacités de production, existantes et potentielles, nationales et par région, sur sites vierges ou existants, de ces installations, en fonction de leur puissance maximale brute".
En outre, dans le cadre des projets de loi de finances, le gouvernement devra présenter en annexe "une évaluation des dispositifs visant à favoriser la production d’électricité d’origine hydraulique, un bilan des autorisations délivrées ou renouvelées au cours du dernier exercice budgétaire pour les installations hydrauliques autorisées, un bilan des renouvellements et prolongations des concessions hydroélectriques ainsi qu’un bilan des créations des sociétés d’économie mixte hydroélectriques".
Le Parlement assurera le suivi de ces mesures via un bilan triennal du gouvernement, transmis au Comité national de l’eau, au Conseil supérieur de l’énergie ainsi qu’au Parlement à compter du 1er janvier 2022. "Ce bilan permet d’évaluer l’incidence des dispositions législatives et réglementaires sur la production d’énergie hydraulique ainsi que sur son stockage", indique le texte.
L’article L311-1 du code de l’énergie a également été modifié pour préciser que seront désormais considérées comme de nouvelles installations de production d’électricité - et donc soumises à une procédure d’autorisation - les installations hydrauliques dont la puissance installée est augmentée d’au moins 25% (alors que ce taux est maintenu à 20% pour celles utilisant d’autres énergies).
L’article L524-1 du code de l’énergie a aussi fait l'objet d'une modification pour abaisser à 500 MW (au lieu de 1.000 MW) le seuil des chaînes d’aménagements hydrauliquement liés pour lesquels la création du comité d’information et de suivi est de droit. Il précise aussi qu’en cas de projet de changement de concessionnaire, de renouvellement ou de prorogation de la concession, de regroupement de plusieurs concessions ou de prorogation de la concession contre la réalisation de travaux, le préfet en informe sans délai les maires et présidents d’EPCI intéressés et, le cas échéant, le comité de suivi de l’exécution de la concession et de la gestion des usages de l’eau ou la commission locale de l’eau en tenant lieu.
Une autre disposition du texte porte sur la continuité écologique des cours d’eau, confiant à l’État le rôle d' "encourage[r], en lien avec les collectivités territoriales concernées, la mise en place de processus de conciliation amiable, non obligatoires et non contraignants, à la demande des porteurs de projets ou des gestionnaires d’installations hydrauliques relevant du régime de l’autorisation". Un bilan de ses actions de conciliation devra être effectué par l’État dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi.
Le texte institue aussi un "médiateur de l’hydroélectricité", à titre expérimental et pour une durée de quatre ans à compter de la promulgation de la loi, sur un périmètre géographique précisé par décret en Conseil d’État. Son rôle sera d'"aider à rechercher des solutions amiables, non obligatoires et non contraignantes, aux difficultés ou aux désaccords rencontrés dans l’instruction ou la mise en œuvre des projets d’installations hydrauliques relevant du régime de l’autorisation […] ou aux difficultés ou désaccords rencontrés dans l’exploitation de telles installations, à la demande des porteurs de projets ou des gestionnaires des installations hydrauliques susmentionnées ou à la demande de l’État et avec l’accord de ces porteurs de projets ou gestionnaires d’installations et de l’État." Le directeur de l’énergie et le directeur de l’eau et de la biodiversité assurent conjointement le pilotage, le suivi et l’évaluation de l’expérimentation. Un décret en Conseil d’État viendra préciser les modalités d’application. Et un bilan sera effectué par le gouvernement "six mois avant la fin de l’expérimentation" et transmis au Parlement.
La loi instaure également un "portail national de l’hydroélectricité" qui "constitue, pour l’ensemble du territoire, le site national pour l’accès dématérialisé, à partir d’un point d’entrée unique", aux Sdage, aux Sage, aux listes de cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux établies en application des 1° et 2° du I de l'article L.214-17 du code de l'environnement, aux Sraddet, aux schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables, aux classements des cours d’eau et lacs établis en application de l'article L.2111-7 du code général de la propriété des personnes publiques, aux évaluations et identifications prévues pour l’électricité d’origine hydraulique dans la PPE ainsi qu’aux éléments d’information figurant dans l’évaluation prévue dans le cadre des projets de lois de finances.

Opérations d'autoconsommation collective (art.91). La loi donne la possibilité aux bailleurs sociaux d’intégrer des associations dans leurs opérations d’autoconsommation collective et élargit les compétences du Médiateur national de l’énergie aux litiges relatifs aux opérations d’autoconsommation individuelle.

Développement de l'éolien en mer (art.93). Le rythme d’attribution des capacités installées est porté à "au moins un gigawatt" d’ici à 2024 et non plus "à un gigawatt". Le texte prévoit également que la personne chargée de l'organisation de la procédure de participation du public "invite les collectivités territoriales situées sur le littoral de la façade maritime à formuler un avis".  
Lorsque le ministre chargé de l’énergie souhaite lancer une ou plusieurs procédures de mise en concurrence en application de l’article L311-10 du code de l’énergie pour la construction et l’exploitation d’installations de production d’énergie renouvelable en mer et de leurs ouvrages de raccordement aux réseaux publics d’électricité, il saisit la Commission nationale du débat public qui détermine, dans les conditions prévues à la présente section, les modalités de la participation du public. À la demande du ministre chargé de l’énergie, l’objet de cette participation porte sur plusieurs procédures de mise en concurrence qu’il envisage de lancer sur une même façade maritime. Le public est notamment consulté sur le choix de la localisation de la ou des zones potentielles d’implantation des installations envisagées.

Développement des installations de production de biogaz (art.94 et 95). L’article 94 vise à relever de 40 à 60% le plafond maximal du taux de réfaction applicable aux installations de production de biogaz raccordées aux réseaux de distribution de gaz naturel et l’article 95 vise à mettre en place un dispositif de certificats de production de biogaz. 

Projets citoyens et communautés d'énergies renouvelables (art.98, 99 et 100). L’article 98 a pour objet d’augmenter le taux de prise en charge par le tarif de réseau pour des projets citoyens. Pour des puissances inférieures à 500 kilowatts, ce taux sera porté à 60% et, dans le cas de certaines opérations nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques nationaux, à 80%. L’article 99 ajoute le développement des communautés d’énergie renouvelable et des communautés énergétiques citoyennes dans les missions de la programmation pluriannuelle de l’énergie. L’article 100 modifie l’article L291-1 du code de l’énergie afin de mentionner les associations parmi les potentiels adhérents des communautés d’énergie renouvelable. "Les associations autorisées à participer à une communauté d’énergie renouvelable sont celles dont les adhérents sont des personnes physiques, des PME, des collectivités territoriales ou leurs groupements", stipule le texte. Un décret précisera les conditions de participation des associations.

Obligations d'installer du photovoltaïque ou des toits végétalisés sur certains bâtiments (art.101). A partir du 1er juillet 2023, les constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage commercial, industriel ou artisanal, les constructions de bâtiments à usage d’entrepôt, les constructions de hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale et les constructions de parcs de stationnement couverts accessibles au public, lorsqu’elles créent plus de 500 mètres carrés d’emprise au sol, ainsi que les constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage de bureaux, lorsqu’elles créent plus de 1.000 mètres carrés d’emprise au sol, devront intégrer :
-    soit un procédé de production d’énergies renouvelables,
-    soit un système de végétalisation basé sur un mode cultural ne recourant à l’eau potable qu’en complément des eaux de récupération, garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité,
-    soit tout autre dispositif aboutissant au même résultat,
-  et, sur les aires de stationnement associées lorsqu’elles sont prévues par le projet, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols.
Un arrêté du ministre chargé de la construction fixera les caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés sur le bâtiment.
La loi précise que cette obligation s’appliquera également aux extensions et rénovations lourdes de bâtiments selon des critères détaillés dans le texte et qui seront encore précisés par un décret en Conseil d’État.
S’agissant des obligations réalisées en toiture du bâtiment ou sur les ombrières surplombant les aires de stationnement, elles devront porter sur une surface au moins égale à 30 % de la toiture ou des ombrières. Des exemptions à cette obligation seront possibles de la part de l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme, notamment si elles se fondent sur des contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales ou, dans le cas des rénovations lourdes, si les conditions économiques ne sont pas acceptables. Là encore, les critères relatifs à ces exonérations sont précisés par décret en Conseil d’État.
Un arrêté du ministre chargé des installations classées définira par ailleurs les cas dans lesquels tout ou partie de l’obligation est écartée ou soumise à des conditions de mise en œuvre spécifiques pour les installations classées soumises à autorisation, enregistrement ou déclaration, "dès lors que les obligations sont incompatibles avec les caractéristiques de l’installation".
À ces mesures s’ajoute une autre obligation portant sur les parcs de stationnement extérieurs de plus de 500 mètres carrés associés aux bâtiments ou parties de bâtiment auxquels s’applique la première obligation, introduite à l’article L111 19-1 du code de l’urbanisme : ils devront "intégrer sur au moins la moitié de leur surface des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation". "Ces mêmes parcs doivent également intégrer des dispositifs végétalisés ou des ombrières concourant à l’ombrage desdits parcs sur au moins la moitié de leur surface, dès lors que l’un ou l’autre de ces dispositifs n’est pas incompatible avec la nature du projet ou du secteur d’implantation et ne porte pas atteinte à la préservation du patrimoine architectural ou paysager." Si ces parcs comportent des ombrières, celles ci doivent intégrer un procédé de production d’énergies renouvelables sur la totalité de leur surface. Là encore, des exemptions sont précisées et un décret en Conseil d’État est prévu pour préciser les critères d’exonération.