Loi "anticasseurs", loi de programmation, continuum de sécurité… le gouvernement trace sa ligne sécuritaire pour 2019
Deux jours après l'acte VIII du mouvement des "gilets jaunes", le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur ont fortement durci le ton face aux "casseurs". Ils apportent leur soutien à une proposition de loi sénatoriale instaurant un régime d'interdiction de manifester qui arrivera à l'Assemblée, début février.
Le texte n’avait pas été prévu contre les "gilets jaunes" mais contre les "black blocs" qui s'étaient notamment illustrés lors de la manifestation du 1er mai. Mais pour le gouvernement, la proposition de loi du sénateur LR Bruno Retailleau prévoyant une interdiction de manifester arrive à point nommé. Adoptée par le Sénat le 23 octobre, elle sera examinée début février à l’Assemblée, avec le soutien du gouvernement. "Il faut préserver la liberté de manifester en France et sanctionner ceux qui veulent enfreindre ce droit à manifester", a déclaré avec fermeté le Premier ministre, lundi, au 20H de TF1, deux jours après l’Acte VIII des gilets jaunes qui a donné lieu à des violences de part et d’autre. La création d’un régime d’interdiction de manifester "est une question que nous nous posons depuis quelques mois", a aussi expliqué le Premier ministre indiquant que, parallèlement à la proposition de loi sénatoriale, un groupe de travail entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice avait été institué sur cette question.
Ce nouveau régime s’inspirerait des interdits de stades qui "a bien fonctionné", a estimé le chef du gouvernement. Sur ce même mode, le texte du sénateur prévoit en effet la création d’un fichier national sur les "interdits de manifestation". Il permettra aussi "de sanctionner ceux qui ne respectent pas l’obligation de déclaration" des manifestations, "qui participent à des manifestations qui ne sont pas déclarées" ou "qui arrivent aux manifestations cagoulés", a développé le Premier ministre.
5.600 gardes à vue depuis le début du mouvement
5.600 gardes à vue ont été prononcées depuis le début de la mobilisation des gilets jaunes, conduisant à 1.000 condamnations, a encore signalé le Premier ministre, indiquant qu’une "mobilisation considérable" des forces de police serait déployée samedi prochain pour l’acte IX des gilets jaunes. "Près de 80.000 agents des forces de l’ordre" seront mobilisés, dont "près de 5.000 à Paris". "Nous allons faire en sorte de procéder à de nombreuses interpellations", a-t-il prévenu.
"A l'ultra violence nous opposerons l'ultra fermeté", a pour sa part déclaré le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, lors de ses voeux aux forces de sécurité, lundi. À la demande du Premier ministre, le ministre devra "repenser" la doctrine du maintien de l’ordre. Les rassemblements des dernières semaines "nous obligent à plus de souplesse et de flexibilité, et à plus d’efficacité", "à travailler en amont avec évidemment les meilleurs outils pour le renseignement", "à veiller sur les réseaux sociaux, à travailler main dans la main avec les collectivités, les commerçants et les acteurs de la sécurité privée pour mieux prévenir les désordres", a-t-il détaillé.
Loi de programmation
Par ailleurs, le ministre présentera au président de la République et au Premier ministre une loi de programmation "qui fixera à long terme notre vision pour la politique de sécurité intérieure", a-t-il annoncé. "Elle ne se limitera pas à la police et à la gendarmerie nationale mais intégrera notre vision globale du continuum de sécurité". Ce texte, a précisé Christophe Castaner, "fixera les objectifs opérationnels prioritaires, l’organisation et les moyens, et les exigences en matière de performance". Au sujet du "continuum de sécurité", le ministre de l'Intérieur a indiqué que les discussions sur le rapport des députés Alice Thourot (LREM, Drôme) et Jean-Michel Fauvergue (LREM, Seine-et-Marne) commenceront "dans les semaines qui viennent" avec les représentants des policiers municipaux et les acteurs de la sécurité privée.
Christophe Castaner entend donner un "second souffle" à la police de sécurité du quotidien (PSQ) lancée par son prédécesseur Gérard Collomb. Il a ainsi annoncé le doublement du nombre de quartiers de reconquête républicaine qui devaient être déployés en 2019 : soit un total de 30 au lieu des 15 prévus, s’ajoutant à ceux déjà lancés à l’automne 2018. Ces nouveaux quartiers pourront être déployés en zone gendarmerie, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici.