Habitat - Logement social : que sont devenues les CUS ?
Dans un rapport récemment publié, le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGDD) se penche sur les conventions d'utilité sociale (CUS), mises en place par un décret du 3 décembre 2009 et obligatoires pour tous les organismes HLM. Le rapport rend compte, plus précisément, d'une "Mission d'expertise sur la négociation de la nouvelle génération de conventions d'utilité sociale". Il s'agit en l'occurrence de tenir compte des "évaluations intermédiaires et des évolutions institutionnelles intervenues depuis 2010 pour revoir le contenu des CUS et leur mode d'élaboration".
Des collectivités territoriales peu impliquées
Il est vrai qu'aux yeux du CGEDD, le constat sur la première génération du CUS est assez mitigé, même si le bilan quantitatif est plutôt satisfaisant, avec plus de 700 conventions déjà signées dès 2011 (voir notre article ci-contre du 13 octobre 2011). Ces dernières ont en effet été affectées par les circonstances de leur mise en place : contexte tendu avec des débats très vifs sur la vente de logements HLM par les bailleurs, sanctions prévues dans les textes et qui "ont crispé les organismes de logement social et eu un effet contre-productif", délais de signature trop courts qui ont limité la portée de la négociation...
La mission estime également que "la prise en compte des enjeux de territoire est restée faible". D'une part - et même si la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et de lutte contre l'exclusion (loi Molle) confère à l'Etat la mission de veiller à la cohérence entre CUS et PLH (programme de l'habitat) -, le rapport constate que "l'articulation entre CUS et PLH s'est révélée impossible". D'autre part, si la loi Molle prévoit une association des départements et des EPCI dotés d'un PLH à l'élaboration des CUS, "les collectivités territoriales se sont généralement peu impliquées".
Tout n'est cependant pas négatif et le rapport met en évidence deux éléments positifs. D'une part, l'élaboration des CUS a été, pour l'Etat, l'occasion "de préciser les enjeux de la politique du logement et d'acquérir une vision globale des métiers du logement social". D'autre part, malgré le travail très lourd qu'a représenté la mise en place des CUS et de leurs indicateurs, "les bailleurs se sont progressivement approprié l'outil CUS et ont développé des démarches innovantes".
Délégation de l'élaboration des CUS aux métropoles : une mauvaise idée
Face à ce constat, le rapport invite à revoir le contenu des CUS et leur mode d'élaboration. Il formule pour cela une vingtaine de préconisations. La mission recommande notamment de relativiser le poids des indicateurs - qui se sont révélés très lourds à gérer - pour laisser plus de place à d'autres aspects comme la politique sociale des bailleurs, les loyers et les charges, les enjeux du développement durable (au-delà de la seule rénovation thermique), l'amélioration du service rendu, l'association des locataires... Dans le même souci de recentrage et de simplification, le rapport préconise de passer de deux à trois ans l'intervalle entre deux évaluations.
Sur la question des collectivités, la mission considère que le périmètre des EPCI comme territoires de gouvernance est pertinent. Elle préconise d'organiser des "temps de travail" entre les services de l'Etat et les EPCI disposant, sur leur territoire, d'un parc social significatif. Pour autant, la mission "ne fait pas de la signature de la CUS par les EPCI une condition de leur validation, car elle estime nécessaire de rappeler que le cadre de la négociation est celui qui lie l'Etat et les organismes". La mission considère donc "que la délégation de compétence pour l'élaboration des CUS, qui peut être demandée par les métropoles, ne semble pas pertinente". Le rapport recommande d'ailleurs l'abandon pur et simple de cette possibilité.
Décaler la signature des nouvelles CUS à 2019 pour "acculturer" les collectivités
Autre élément, qui rappelle le contexte de 2009-2010 : la mission juge nécessaire de "desserrer de façon substantielle" le calendrier de négociation de la nouvelle génération de CUS, inscrit dans la loi. A ce jour, il prévoit une remise des projets de CUS aux services de l'Etat avant le 1er juillet 2016, pour une signature au 1er janvier 2017. Le rapport préconise de reporter cette signature au 1er janvier 2019.
Explication de ce décalage de deux ans : "si l'on veut associer les collectivités et leurs groupements aux réflexions sur la place du logement social dans les politiques locales de l'habitat, il faut leur laisser le temps de tirer les conséquences des réformes territoriales [...] en termes de gouvernance et de permettre leur acculturation aux problématiques du logement".