Logement - Logement social : l'USH ne goûte guère la Vefa
Dans un article publié sur le site de l'USH (Union sociale pour l'habitat), son délégué général, Frédéric Paul, prend position sur "La maîtrise d'ouvrage sociale : un métier d'ensemble qui doit s'exercer globalement". L'article pose surtout la question du recours à la Vefa (vente en l'état futur d'achèvement) par les bailleurs sociaux. Difficile de ne pas y voir un prolongement de l'étude récemment publiée par la direction des fonds d'épargne de la Caisse des Dépôts, dans sa lettre "Conjoncture" (voir notre article ci-dessous du 4 mai 2017). Cette étude montre en effet que la Vefa représente désormais près de 40% de la production de logements sociaux. Sa part est passée de 1% en 2007 à 39% en 2016...
Un éloignement des missions d'origine et une perte de savoir-faire
Le délégué général de l'USH rappelle que la maîtrise d'ouvrage sociale dans les organismes HLM "renvoie à une définition originelle précise : construire et gérer. Construire en vue de gérer des logements répondant à des caractéristiques fixées par l'autorité administrative et destinés aux personnes et aux familles disposant de ressources modestes". Pour l'USH, il s'agit là d'un métier d'ensemble, qui doit s'exercer globalement.
Or, "au moment où une part importante de la production est réalisée par le recours à la Vefa, cette Vefa doit être regardée comme un démembrement de la vocation, lui-même porteur d'un affaiblissement des organismes, mais surtout de la cause du logement social. Car le sens, les intérêts servis par la production, selon qu'elle se réalise en régie directe ou en Vefa, ne sont évidemment pas les mêmes". En d'autres termes, le très large recours à la Vefa constitue non seulement une remise en cause des missions sociales des organismes HLM, mais aussi une perte de savoir-faire pour les bailleurs sociaux.
Certes, "la Vefa ne fait pas l'objet d'un refus de principe de la part du mouvement HLM, mais lorsque son niveau devient tel qu'il fait croire à certains que le mode de production est neutre, au regard d'une culture et du devenir des acteurs qui l'incarnent, s'il permet d'augmenter facilement le patrimoine, alors il devient nécessaire de réagir".
Le salut dans une réforme de la loi MOP ?
Cette réaction et les voies de sa mise en œuvre ne font cependant pas nécessairement consensus au sein du mouvement HLM. Pour l'USH, la réponse est à chercher du côté d'une révision de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée (loi MOP). Son délégué général estime en effet que le processus complexe prévu par ce texte - avec en particulier l'intervention en séquences successives du maître d'ouvrage, de la maîtrise d'œuvre, puis des entreprises choisies dans le cadre d'un marché public - "crée une distorsion de conditions d'activité avec la promotion privée, qui ne subit aucune contrainte pour réaliser un même produit totalement administré". Et cela malgré la possibilité de dérogation expérimentale à la loi MOP ouverte jusqu'en 2018.
Pour l'USH, "le séquençage de la loi MOP apparait hors du temps, tandis que la maquette numérique appelle dès l'amont, à travers la conception-réalisation, les collaborations entre le maître d'ouvrage, la maîtrise d'œuvre, les entreprises". L'association juge aussi que la formule de l'entreprise générale, plutôt que l'actuel allotissement, peut être, dans certains cas, la plus adaptée pour définir au mieux et réaliser dans les meilleures conditions les logements devenus un produit de plus en plus technologique.
Dans ces conditions, l'USH se dit "à la fois déterminée à obtenir les adaptations que la pérennité de la maîtrise d'ouvrage sociale exige, mais elle est en même temps attentive à la prise en compte de la place de ses partenaires et de leur rôle indispensable dans l'acte de construire".