L’Igedd présente le nouvel inventaire national des plans d’eau

La diversité des plans d’eau (retenues de barrages, réservoirs, plans d’eau de carrière, plans d’eau de mine, bassins d’orage, marais salants, etc.), l’hétérogénéité de leur distribution géographique et l’importance des enjeux qui leur sont associés, notamment dans le contexte de l’adaptation au changement climatique, sous-tendent le besoin de les inventorier et d’en améliorer la connaissance. L’inventaire national des plans d’eau (INPE) 2024, réalisé sous la coordination de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd), est prêt à être diffusé et utilisé. Dans un rapport dédié, l’institution formule des recommandations pour en accompagner la gouvernance, l’animation ou ses utilisations territoriales.

Face aux enjeux associés aux plans d’eau, en termes de biodiversité et d’écologie, de disponibilité de la ressource en eau, notamment dans le contexte de l’adaptation au changement climatique et de la gestion des risques (sécheresse, inondations), la feuille de route des Assises de l’eau en 2019 et les conclusions du Varenne agricole de l’eau et du changement climatique en 2022 prévoient la réalisation d’un inventaire national des plans d’eau (INPE). L’Inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) s’y est attelée, et vient de mettre en ligne un rapport présentant la démarche qui a guidé la réalisation de cet inventaire, tout en formulant des recommandations pour sa gouvernance et son déploiement ultérieurs. 

La finalité est double : constituer une base de connaissance nationale référentielle des plans d’eau, aux côtés des référentiels cours d’eau et zones humides, en décrivant leurs caractéristiques, leurs usages, leur environnement, leurs fonctions et leurs impacts ; aider les acteurs de l’eau à assurer leurs missions sur les territoires en mettant à leur disposition un outil métier, de construction collaborative, et de partage des connaissances.

Il s’agit d’un outil au service des politiques publiques, qui permet entre autres d’identifier de façon homogène et systématique les plans d’eau concernés par une réglementation et de capitaliser l’information collectée lors des procédures. L’INPE n’a cependant pas de portée juridique et n’a pas vocation à être opposable juridiquement. Il ne constitue en particulier pas une base pour l’instruction des documents d’urbanisme ou de planification dans le domaine de l’eau, qui relève de l’expertise et de la responsabilité des acteurs locaux compétents. 

Synergie entre inventaire national et inventaires locaux

Les plans d’eau, définis par le système d’administration des données et référentiels sur l’eau (Sandre) comme des "étendues d’eau continentale de surface, libre, stagnante" couvrent environ 1% du territoire national (approximativement 500.000 hectares) et présentent une capacité de stockage cumulée d’environ 17 milliards de m3. Le produit principal de la mission conduite de mi-2022 à mi-2024 est l’Inventaire national des plans d’eau lui-même, accessible sur la plateforme Géoservices et géré par l’IGN. Car jusqu’ici, l’on ne disposait pas d’un inventaire national des plans d’eau, mais d’une myriade d’inventaires locaux résultant d’initiatives territoriales à des échelles très variées (du syndicat de rivière à l’agence de l’eau), outils essentiellement internes couvrant des besoins informationnels hétérogènes. 

Très attendu, l’outil devient plus complexe : "Il doit rendre compte de multiples problématiques et hybrider des données relativement invariantes systématiquement décrites pour tous les plans d’eau, et des données techniques et de gestion plus détaillées, parfois fluctuantes, qui doivent être acquises localement et expertisées." L’inventaire présente ainsi simultanément des attributs renseignés exhaustivement et des attributs très peu renseignés, qui le seront progressivement au rythme des enquêtes dans les territoires. 

Concrètement, la diffusion repose également sur un guichet collaboratif permettant de consulter, corriger et enrichir l’INPE. "Un acteur peut ainsi aisément accéder à l’INPE sur son territoire, l’utiliser comme base de travail ou en extraire l’information pertinente pour enrichir son inventaire local", souligne l’Igedd. Des expérimentations ont d'ailleurs été menées avec deux EPTB : le syndicat mixte pour le développement durable de l’estuaire de la Gironde (Smiddest) et le syndicat mixte d'études et d'aménagement de la Garonne (Smeag).  

856.000 plans d’eau sur le territoire national

L’INPE dénombre de l’ordre de 856.000 plans d’eau sur le territoire national, dont environ 333.000 plans d’eau de plus de 0,1 ha (39% des effectifs) et 523.000 de moins de 0,1 ha (61% des effectifs). Il est "quasi-exhaustif" pour les plans d’eau de superficie supérieure à 0,1 ha (soumis aux dispositions de l’arrêté "plans d’eau" du 9 juin 2021), mais pas en deçà. Il identifie les 17.695 plans d’eau de plus de 3 ha soumis à autorisation : 12.343 retenues (dont la capacité de stockage totale est évaluée à environ 14,1 milliards de m3), 2.268 plans d’eau de gravières, 1.312 réservoirs-bassins, 1.647 plans d’eau naturels, 125 bassins portuaires. On dispose ainsi de la localisation et géométrie de l’ensemble des plans d’eau des départements de métropole et d’outremer (hors Guyane où des contraintes techniques doivent être levées), chacun doté d’un identifiant INPE unique. Cette géométrie sera actualisée annuellement (apparition de nouveaux plans d’eau, identification de faux plans d’eau). 

Au-delà des caractéristiques constantes de chaque plan d’eau, l’INPE doit fournir des informations sur sa dynamique via un dispositif de suivi satellitaire en temps réel des plans d’eau : leur superficie en eau est mesurée environ tous les 5 jours et traduite en volume stocké et taux de remplissage. Démontré sur 350 retenues sur la période 2017-2023, ce dispositif montera en puissance à 5.000 retenues en 2024 puis 9.000 retenues en 2025, dans le cadre d’un programme France 2030 Hydro. Une estimation pour les 250.700 retenues de plus de 0,1 ha (retenues de barrages, retenues collinaires, étangs…), qui stockent l’essentiel du volume mobilisable pour la gestion quantitative, fournit une capacité de stockage cumulée de 17 milliards de m3 (+/- 0,8 milliard de m3). 

Gouvernance et déploiement de l’INPE

L’INPE est "plus qu’une simple couche d’information géographique", relève l’Igedd qui consacre la dernière partie de son rapport à une série de recommandations pour accompagner le déploiement de cet outil. Développer l’utilisation de l’INPE et la synergie entre l’inventaire national et les inventaires locaux requiert ainsi "un travail d’accompagnement et d’animation qui doit être confié à un animateur national". Un rôle qui pourrait être confié à l’Office français de la biodiversité (OFB). 

Pour renforcer l’interopérabilité des bases de données et la cohérence des outils publics sur l’eau, le rapport prône l’intégration de l’INPE dans le système national d’information sur l’eau (SIEau). A moyen terme (à partir de 2025), sa diffusion pourrait également être assurée via le portail Eau France. Il serait en outre pertinent de confirmer le guichet collaboratif INPE au sein de l’espace collaboratif de l’IGN, et de constituer le réseau national et territorial des acteurs institutionnels dits "acteurs référents", habilités à modifier l’INPE et traiter les signalements.

L’INPE n’a pas été conçu pour la régularisation, mais peut être mobilisé à son service. L’effort de régularisation pourrait ainsi porter prioritairement sur les retenues, réservoirs-bassins et plans d’eau de gravières, soit 15.923 plans d’eau. Le rapport appelle de surcroît à promouvoir les utilisations territoriales de l’INPE. Quelques-unes sont développées en annexe 6 : l’utilisation par les PTGE ; l’identification de plans d’eau re-mobilisables ; l’appui à la pisciculture d’étangs et pêche ; l’appui à l’évaluation environnementale. Enfin, l’Igedd cible plusieurs améliorations techniques à apporter. 

 

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