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Mobilité - Les transports publics redoutent les effets de la crise

Malgré des indicateurs au vert en termes de fréquentation et de recettes, les professionnels des transports publics craignent que la crise économique et financière ne vienne freiner la dynamique qui s'est amplifiée depuis deux ans en leur faveur.

"Les transports publics sont fortement consommateurs d'investissements pour améliorer leur offre. Or, avec la crise financière et les difficultés rencontrées par leur principale banque, les collectivités territoriales risquent de se heurter à des problèmes de financement", a mis en garde Michel Cornil, président de l'Union des transports publics (UTP) en présentant le 28 octobre les chiffres clés 2007 du secteur et ses estimations pour 2008. Autre difficulté pointée par le président de l'UTP : la crise économique qui peut entraîner un reflux des déplacements liés aussi bien aux loisirs, aux achats qu'au travail. "Si la situation de l'emploi se détériore, les transports publics, qui sont devenus le moyen privilégié utilisé pour les déplacements domicile-travail dans les grandes agglomérations, seront directement touchés." Enfin, leur fréquentation est sujette aux fluctuations des prix du pétrole, surtout dans les agglomérations de taille moyenne où la concurrence avec la voiture reste forte.
En dépit du pessimisme ambiant, les professionnels se réjouissent tout de même des tendances de fond pressenties en 2006 et confirmées en 2007. Le nombre de voyages par habitant et par an dans les réseaux de province a franchi l'an passé la barre symbolique de la centaine (109 exactement, soit une hausse de 5,2% en moyenne sur l'année) alors que la production kilométrique a progressé deux fois moins vite. La croissance de la recette par voyage s'est accélérée tandis que la dépense s'est stabilisée. Résultat : pour la première fois depuis 10 ans, la tendance à la baisse du ratio recettes/dépenses s'est inversée.

 

Les grands réseaux creusent l'écart

Mais les résultats 2007 montrent de fortes disparités selon les tailles de réseaux. Si les agglomérations de moins de 100.000 habitants affichent de bonnes performances pour la deuxième année consécutive (nombre de voyages en hausse de 2,3%, augmentation des recettes de 6,7%), ce sont les réseaux des agglomérations de plus de 250.000 habitants qui tirent les résultats du secteur vers le haut (141 voyages par an et par habitant, + 9,1% de recettes commerciales en 2007). 
"Tous ceux qui développent une politique ambitieuse de transports en commun en site propre (TCSP), qu'il s'agisse de lignes de métro, de tramway ou de bus à haute qualité de service, enregistrent de fortes évolutions et chaque amélioration de l'offre entraîne une hausse de la demande", souligne Michel Cornil. Aux TCSP qui concentrent en moyenne 63% du trafic se sont ajoutés d'autres facteurs favorables aux transports publics dans les grandes agglomérations : offre tarifaire attractive (abonnements annuels notamment), hausse du prix de l'essence et congestion des villes qui ont fait reculer l'usage de la voiture.
Par contre, dans les réseaux de taille moyenne (de 100.000 à 250.000 habitants), le trafic n'a augmenté que de 0,7% et les recettes de 4,7%. "Si les villes n'ont pas de politique volontariste en termes de réglementation de la circulation, de stationnement et de réservation de voirie, les ratios ne sont pas favorables aux transports publics", constate le président de l'UTP.
Les résultats du premier semestre 2008 tendent à confirmer l'engouement pour les transports publics mais la baisse récente des prix des carburants pourrait peser sur le trafic. La RATP pour sa part a commencé à ressentir dès ce premier semestre les effets du tassement de l'activité économique et de la mobilité en Ile-de-France.
Dans ce contexte, les professionnels appellent à soutenir les investissements du secteur. "La demande reste aujourd'hui très importante aussi bien dans les réseaux denses pour achever le maillage en améliorant la fréquence, la ponctualité, la rapidité, qu'en deuxième ou en troisième couronne des villes où les investissements ont été moins importants jusqu'à présent", souligne Bruno Gazeau, délégué général de l'UTP. Reste à trouver les ressources nécessaires à la fois pour les réaliser et surtout pour assurer le fonctionnement des nouveaux réseaux, d'autant que les aides d'Etat prévues par le Grenelle de l'environnement ont été revues à la baisse. "Toutes les collectivités n'ont pas épuisé les possibilités offertes par le versement transport mais leur principal problème sera leur capacité à trouver les fonds nécessaires si la crise financière perdure", estime Michel Cornil.

 

Anne Lenormand