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Education - Les projets de réussite éducative réussiront-ils à s'adapter à la nouvelle politique de la ville ?

Créés en 2005, les projets de réussite éducative (PRE) sont aujourd'hui pris dans la tourmente de deux réformes, celle de la politique de la ville et celle de l'éducation prioritaire. Le commissariat général à l'égalité des territoires souligne, dans une enquête portant sur les 493 PRE actifs en 2015, l'enjeu de l'évolution du partenariat financier de ces dispositifs. Une question de survie pour les 45 PRE sortis de la géographie prioritaire et qui ne pourront plus compter sur les financements "Ville" dès 2017.

"Le portage institutionnel des projets de réussite éducative se poursuit autour d'une dynamique historiquement communale", observe le commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) dans une enquête nationale portant sur les 493 projets de réussite éducative (PRE) actifs en juin 2015 (*). Ces 493 PRE ont consommé un budget de 100,7 millions d'euros de financements directs en 2015, dont 21 millions venant des communes (et 69 millions de l'Acsé/CGET). Le financement communal est "stable par rapport à 2014, après une forte baisse entre 2013 et 2014", souligne le CGET. Tous les PRE ne bénéficient pas de financements de leur commune, seuls 72 % sont dans ce cas.
A ces 100,7 millions d'euros de financements directs, s'ajoutent 13,5 millions de contributions non financières (mise à disposition de personnel, de locaux, de matériel), dont 9,3 millions d'euros provenant des communes (soit 69%). Un montant en baisse puisque l'année précédente les communes contribuaient à hauteur de 11,2 millions d'euros.
Au total, l'ensemble des contributions, financières et non financières, est estimé à 114, 2 millions d'euros, soit une moyenne de 234.100 euros par PRE (contre 246.355 euros en 2014 et 255.533 euros en 2013).
Quant aux structures porteuses de PRE, leur profil "évolue peu ces dernières années", constate le CGET. Les centre communaux et intercommunaux d'action social (CCAS et CIAS) sont porteurs de près de 6 PRE sur 10, puis les caisses des écoles d'un peu plus d'un tiers des PRE. Il y a aussi quelques groupements d'intérêt public (4%), établissements public local d'enseignement (2%) et régies (1%).

Un pas vers le droit commun ?

A côté de cette "dynamique historiquement communale", le CGET note "une implication de plus en plus fréquente du nombre de ses partenaires institutionnels". Grâce à cela, "les PRE consolident quelque peu leur tour de table institutionnel, ce qui est de nature à leur conférer une capacité à mobiliser le droit commun", se félicite-t-il.
Selon le CGET, "l'articulation avec le droit commun se réalise à travers un effort de complémentarité et de coordination avec d'autres interventions sur les territoires, en lien avec des dispositifs de la politique de la ville et d'autres contractualisations et / ou réflexions stratégiques". Il est également confiant quant à "l'activation effective des moyens des partenaires (...), qu'il s'agisse du financement des communes mais aussi de la variété des organismes et institutions concernés par la mise à disposition de moyens et / ou de ressources pour le PRE." Car même s'il reconnaît que "les PRE connaissent une baisse de leurs moyens sur ces dernières années", le CGET note "que les moyens humains baissent moins vite que les moyens financiers et que l'assise de financement des PRE garde une réelle diversité de ses sources, témoignant du partage partenarial de la priorité constituée par la réussite éducative."

Le PRE constitue-t-il vraiment le volet Education des contrats de ville ?

De l'eau a coulé sous les ponts depuis l'institution du programme de réussite éducative par le plan de cohésion sociale et la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005. Le programme constitue aujourd'hui le "dispositif central du volet éducation et la première priorité de la politique de la ville en termes d'engagements financiers en 2015", rappelle le CGET.
Il assure que "le PRE est résolument intégré au sein des contrats de ville nouvelle génération", comme le demandait une instruction de 2014 (voir notre article ci-contre du 8 décembre 2014). L'enquête montre pourtant que seuls 80 % des PRE "prévoient d'intégrer un contrat de ville" (ce qui en fait 20 % qui ne le prévoient pas) et que seuls 52 % des PRE constitueraient "un axe fort du volet éducatif" des contrats de ville (soit à peine plus de la moitié). De plus, "la prise en compte de la dimension intercommunale n'est que très peu prévue (moins d'1 PRE sur 10)", regrette le CGET, se rassurant à l'idée que "45% des PRE indiquent que cette prise en compte fait l'objet de réflexions". Pour l'anecdote, un seul PRE porte sur un territoire entrant de la géographie prioritaire.
A noter surtout que 45 PRE portent sur des territoires sortants de la politique de la ville, ce qui posera question en 2017, année de la "la fin de 'garantie' par l'Etat des financements ajustés pour les PRE couvrant les territoires sortant de la géographie prioritaire", rappelle à juste titre le CGET.

L'Education nationale, le partenaire institutionnel le plus mobilisé

Du côté de l'Education nationale, les PRE ne semblaient pas encore, en juin 2015, s'être adapté à la nouvelle géographie de l'éducation prioritaire. Trois mois auparavant, le comité interministériel à l'Egalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015 avait annoncé que "dans chaque collège REP+ et dans les écoles associées, les programmes de réussite éducative (PRE) seront progressivement déployés là où ils sont absents et davantage mobilisés là où ils existent". A ce moment-là, seuls 293 PRE (sur 493) ont déclaré porter sur au moins un collège en REP, et 153 sur au moins un collège en REP + (sur 732 REP et 350 REP+).
Pour autant, "l'Education nationale reste le partenaire le plus fortement mobilisé, avec une présence en tant que partenaire institutionnel, mais également en tant que partenaire de terrain dans la quasi-totalité des projets en 2014-2015 (99%)", souligne le CGET.
Du point de vue institutionnel, elle est suivie par les conseils départementaux, avec une participation toutefois en nette diminution au fil des ans (81 % durant l'année scolaire 2014-2015, contre 87% les deux années précédentes).
A l'inverse, les Directions départementales de la cohésion sociale (DDCS) ou Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) s'impliquent de plus en plus fréquemment dans les projets (77% contre 74% en 2014 et 71% en 2013), tout comme les délégués du préfet à la politique de la ville (72%, contre 64% en 2014) et les caisses d'allocations familiales (64%, contre 57% en 2014).
Les associations d'éducation populaire/d'éducation sont mobilisées dans un PRE sur deux.

Valérie Liquet

(*) Depuis qu'il a repris les missions de l'Acsé, le CGET assure le développement, le suivi et la gestion du programme de réussite éducative.

500 projets de réussite éducative : 100.000 enfants soutenus

Le programme de réussite éducative est né du plan de cohésion sociale et de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005. Il invite à la mise en œuvre des projets de réussite éducative (PRE) en direction des enfants de 2 à 16 ans résidant "prioritairement" dans les quartiers de la politique de la ville et qui "présentent des signes de fragilité et/ou qui ne bénéficient pas d'un environnement social, familial et culturel favorable à leur développement harmonieux". Un PRE est mené par une ou plusieurs équipes pluridisciplinaires de soutien (EPS) composées de professionnels de champs variés et complémentaires (scolaire, socio-éducatif, social, sanitaire, etc.) et issus de différents organismes (communes, personnels de l'Education nationale et des CAF, services sociaux du conseil général, associations habilitées, etc.) Ces équipes interviennent selon une approche "globale et multidimensionnelle", en liaison avec les familles, et sur la base d'un repérage préalable des difficultés.
1.314 EPS sont recensées comme étant actives, en 2015, travaillant dans les 493 projets de réussite éducative (PRE). 4.744 postes sont mobilisés pour leur mise en œuvre, correspondant à 1.637 ETP (équivalents temps pleins). 97 % des PRE déclarent travailler avec des acteurs de l'Education nationale, 77 % avec des associations de loisirs, sportives ou culturelles (contre 87% durant l'année scolaire 2013-2014), 76 % avec des structures de 1er recours ou médico-social, 76 % avec des centres sociaux, 69 % avec des éducateurs de rue, 68 % avec l'aide sociale à l'enfance, 49 % avec des associations de soutien scolaire, 37 % avec les CAF, 31 % avec des Ateliers santé ville (contre 26% durant l'année scolaire 2012-2013), 27 % avec des éducateurs jeunesse et sports (27 %), 23 % avec des associations familiales type Unaf et 16 % avec des associations de parents d'élève.
8.642 établissements scolaires sont couverts par les PRE : 3.286 écoles maternelles, 3.712 écoles élémentaires, 1.358 collèges et 286 lycées. 104.279 enfants de 2 à 16 ans étaient bénéficiaires d'un PRE durant l'année scolaire 2014-2015 (soit 214 enfants par PRE), soit 10 % de moins que l'année précédente. 79% de ces enfants bénéficient d'un parcours personnalisé (contre 72 % en 2014). 231 PRE ont un taux d'individualisation de 100%.

Sources : Enquête annuelle 2015 de suivi du programme de réussite éducative pour l'année scolaire 2014-2015, CGET.

V.L.